L’année 1816 fut parait-il une année sans été. Un volcan en colère explose. L’éruption équivaut 10.000 fois les bombes d’Hiroshima et Nagasaki. Cette catastrophe parait même sur les toiles de grands maîtres, et l’imagination de personnages funestes apparaît dans ce décor funeste
Nuage
L’éruption volcanique la plus meurtrière de l’histoire a engendré Frankenstein
Huile sur toile de Frederic Church, 1861 | via Wikimedia Commons (domaine public)
En 1815, il y tout juste 200 ans, le volcan Tambora est entré en éruption. Un événement spectaculaire qui s’est répercuté dans le monde entier et a inspiré la peinture et la littérature.
En avril 1815, le volcan Tambora, en Indonésie, est entré en éruption. L’éruption la plus puissante du dernier demi-millénaire, équivalente à l’explosion de 10.000 fois les bombes d’Hiroshima et Nagasaki réunies. Elle a provoqué une catastrophe si vaste que les scientifiques peinent encore à en mesurer les conséquences à travers le monde.
Aux alentours, environ 10.000 personnes ont péri, brûlées vives, tuées par des chutes de rochers ou mortes de faim, les cultures étant étouffées par les cendres. Mais le pire était à venir. Un nuage géant de minuscules particules s’est répandu dans le monde entier, a bloqué les rayons du soleil et provoqué trois ans de refroidissement planétaire.
L’année 1816 qui a suivi fut officiellement déclarée «l’année sans été». Chutes de neige rouge ou marron, tempêtes, gel des récoltes, famine, pandémie… Ni l’Amérique, ni l’Europe, ni l’Asie n’ont été épargnées.
Quelques belles choses sont tout de même nées de ce chaos planétaire: des créations artistiques. Dans son livre Tambora: the Eruption that Changed the World (c’est-à-dire Tambora: l’éruption qui a changé le monde), Gillen D’Arcy Wood détaille cet héritage culturel, comme le raconte le New York Times.
Spectaculaires couchers de soleil
Son livre reproduit par exemple une peinture à l’huile de 1816, Weymouth Bay (peinte dans la baie anglaise de Weymouth Bay, donc), par l’artiste romantique John Constable:
Weymouth Bay, peinture de John Constable | via Wikimedia Commons (domaine public)
«Il y avait des vents volcaniques très forts à l’époque et de violents orages», explique Gillen D’Arcy Wood.
Les particules présentes dans l’atmosphère ont aussi produit de spectaculaires couchers de soleil, capturés par le peintre britannique William Turner. Par exemple dans sa toile Le Canal de Chichester:
Winchester Canal, peinture de William Turner | Wikimedia Commons (domaine public)
Ou dans Ovide banni de Rome:
Ovide banni de Rome, de William Turner | via Wikimedia Commons (domaine public)
Ou encore Flint Castle:
Peinture de William Turner, Flint Castle | via WikiArt (domaine public)
La littérature du XIXe siècle, marquée par le romantisme, s’est aussi nourrie de l’événement. Et a donné naissance au monstre de Frankenstein et aux vampires.
En juin 1816, l’écrivain Mary Shelley, alors âgée de 18 ans, passe l’été en Suisse, sur les bords du lac Léman. Par ce temps froid et sombre, elle est à l’abri dans une villa aux côtés d’autres personnalités de la littérature anglaise, dont Percy Shelley (son futur mari) et Lord Byron. Le vin et l’opium coulent à flot, les flammes des bougies tremblent… C’est dans cette atmosphère étrange que Mary écrit l’histoire de Frankenstein, qu’elle publiera deux ans plus tard.
Illustration par Theodore Von Holst de l’édition de 1831 de Frankenstein | via Wikimedia Commons (domaine public)
Lord Byron, lui, écrit Le Vampire, nouvelle qui popularisa la légende de ce démon dans la littérature, et le poème Darkness (obscurité).
Cela étant, espérons que les artistes n’auront pas à peindre ou à écrire sur une catastrophe similaire avant longtemps. D’après les travaux menés par des scientifiques, une éruption d’une telle ampleur aujourd’hui serait encore plus meutrière, au vu de la densité démographique, et pourrait mener à l’extinction de l’humanité.
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