Au Canada, il y a des refuges pour les femmes violentés physiquement et moralement, mais dans des pays comme le Kenya ou la femme est une propriété de l’homme, ce genre de maison n’existe pas. Pourtant, des femmes qui ont été excisées, mariées de force, violées, répudiées ont érigé un village pour elles dont aucun homme n’a le droit d’y pénétrer, ce qui est un affront pour leur virilité, surtout qu’elles se débrouillent très bien sans eux
Nuage
Un village pour femmes seulement
Monique Crépault
Il existe dans le nord du Kenya, à 380 kilomètres de Nairobi, un village ceinturé d’épines où ne vivent que des femmes et leurs enfants. Les hommes y sont interdits.
Le village s’appelle Umoja (« unité » en langage local, le kiswahili) et existe depuis 1990 quand quinze femmes, dont l’actuelle chef du village, ont décidé d’avoir la paix après avoir été violées par des soldats britanniques et violemment répudiées par leurs maris.
Au fil du temps, ces femmes ont été rejointes par d’autres, qui ont voulu elles aussi y trouver refuge après avoir subi les viols, mutilations, violences, répudiations et mariages précoces qui sont fréquents dans leur communauté samburu.

Loin des lourdeurs du machisme
Umoja n’est pas un repaire d’amazones. Ses habitantes refusent la pratique de l’excision et les mariages précoces, mais pas les relations sexuelles, qu’elles vivent à l’extérieur du village.
Les femmes d’Umoja gagnent leur vie grâce à l’artisanat et au tourisme. Elles élèvent des chèvres, leurs enfants vont à l’école et leur économie va bien, une situation qui vexe bien des hommes de leur communauté.
Ces hommes n’aiment pas le village. Ils le trouvent contraire à la morale et aux traditions locales, des traditions qui leur donnent droit de vie et de mort sur leurs femmes. Comme ces hommes préfèrent voir leurs femmes mortes que ne pas les avoir, ils viennent jusqu’au village pour tenter de venger
Les attaques sont en fait si fréquentes qu’après l’assassinat de l’une des leurs, en 2005, les femmes du village ont recruté trois gardiens de nuit pour les aider à les refouler.
L’homme joue, la femme travaille
Dans la communauté samburu, c’est toujours la femme qui travaille trop, explique la bande-annonce d’un documentaire portant sur le village d’Umoja. Elle se réveille très tôt le matin, vers 3 h. Elle travaille toute la journée et se couche tard, vers 23 h. L’homme dort et se réveille quand il veut. Quand il se réveille, il demande le petit-déjeuner. Il sort et fait éventuellement sortir le bétail de l’enclos. Il va sous un arbre et dort. Les hommes ont un jeu auquel ils jouent parfois toute la journée. Ensuite ils dorment. De nouveau, ils viennent réclamer de la nourriture et mangent, mais ils veulent que vous leur apportiez la nourriture là où ils se trouvent. Le soir, ils rentrent à la maison quand ils voient le bétail revenir. Ils ne font rien d’autre.
C’est pas parce que c’est une tradition que c’est une bonne idée
Umoja est une exception au Kenya où les droits des femmes sont totalement bafoués, même si la loi y interdit les mutilations génitales depuis 2011.
Comme l’a déclaré Barack Obama en juillet dernier, en parlant des mariages forcés et des mutilations subies par les Kényanes :
« Ces traditions datent peut-être de plusieurs siècles, mais elles n’ont pas leur place au 21e siècle ».
Les enfants mâles sont admis à Umoja. Espérons que ces futurs hommes, élevés dans un environnement progressiste, égalitaire et mature, feront en sorte que disparaissent enfin ces traditions d’un autre âge. Sinon, il ne restera plus qu’à construire de plus en plus de villages comme Umoja.
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