Malade d’être malade


Il existe beaucoup de maladie qui ont des symptômes similaires. Il y a des gens qui ont tellement peur d’être malade, qu’ils croient avoir des symptômes des pires maladies, même si après examen médical tout semble normal. Inventent-ils vraiment ou bien leur problème est réel ? C’est personnes ont vraiment besoin d’aide, car ils s’isolent souvent et leur vie est assez compliqué si en plus ils ont des phobies en rapport avec la santé
Heureusement, au pays, il existe des thérapies et des groupes d’entraide.
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Malade d’être malade

 

Jade Gauthier passe un nombre incalculable d'heures à... (PHOTO ANDRÉ PICHETTE, LA PRESSE)

Jade Gauthier passe un nombre incalculable d’heures à lire sur les maladies sur son téléphone.

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JANIE GOSSELIN

La Presse

La peur d’être malades les empêche de vivre. Au point, parfois, de leur donner envie de mourir. Si la crainte de la maladie est normale, et même saine, elle peut devenir un trouble mental envahissant. Témoignages sur des difficultés qui n’ont rien d’imaginaire.

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Danielle Moulin

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Radiographies, tests d’urine, prises de sang, tests de selles, gastroscopie: au fil des ans, Danielle Moulin a passé de nombreux examens médicaux. Résultat: rien d’anormal

«Je me disais: ils ont manqué un cours à l’université, ça ne se peut pas», dit la femme de 56 ans.

C’est que sa douleur au ventre était si vive qu’elle la «pliait en deux». Son coeur s’emballait. Même l’eau lui donnait l’impression de brûler son estomac. Elle était convaincue d’être gravement malade.

Son anxiété est devenue envahissante lorsqu’elle était dans la vingtaine.

En riant, la volubile retraitée s’identifie comme «all-dressed»: elle a souffert au cours de sa vie de troubles paniques, d’agoraphobie, d’hypocondrie, de claustrophobie… notamment.

Pendant longtemps, elle a évité les endroits où l’ambulance ne pourrait pas l’atteindre rapidement. L’autoroute Métropolitaine, les ascenseurs. Elle s’est confinée à un périmètre de Montréal bien défini, à proximité des hôpitaux.

L’hypocondrie

En 2013, avec la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, l’Association américaine de psychiatrie a revu sa façon d’évaluer différents troubles. La catégorie remaniée de «troubles à symptomatologie somatique ou apparentés» met l’accent sur les préoccupations ou comportements excessifs d’une personne face à la maladie. Le terme «hypocondrie», jugé péjoratif, a disparu. Le nombre de critères a été réduit.

Il est trop tôt pour savoir si ces changements ont entraîné une hausse du nombre de cas diagnostiqués, comme des critiques l’appréhendent.

On estimait à moins de 1% le nombre d’hypocondriaques, alors que la catégorie plus vaste de «trouble somatoforme» aurait touché environ 19 % des gens.

«Donc on peut penser que c’est probablement intermédiaire, autour de 7%», dit la Dre Judith Brouillette, psychiatre et chercheuse au département de psychosomatique de l’Institut de cardiologie de Montréal, soulignant l’absence d’études récentes.

Pression sur le système médical

La pression est tout de même importante sur le système médical. Une étude publiée en 2010 dans le General Hospital Psychiatry estimait que 40% des patients consultant un médecin pour des palpitations souffraient en fait d’un trouble anxio-dépressif. Les gens avec un trouble anxieux utilisent environ deux fois plus les soins de santé que les autres.

«Deux fois plus de visites, c’est plus de sous, plus d’investigations», note la Dre Brouillette.

Elle souligne qu’il est difficile pour un médecin de ne rien faire, même s’il «vaudrait mieux traiter de façon proportionnelle au risque, pour le bien-être du patient et du système».

C’est d’autant plus problématique lorsque les patients consultent différents médecins.

«L’hypocondrie est une maladie du doute : la personne a besoin de chercher une autre source pour se rassurer», dit Frédéric Langlois, directeur du département de psychologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), qui distingue ceux qu’on appelle encore couramment les hypocondriaques, qui sont persuadés d’être gravement malades, des autres ayant une crainte moins intense.

«C’est comme une drogue: la personne consulte et ça apporte une baisse de l’anxiété momentanément.»  Frédéric Langlois, directeur du département de psychologie à l’UQTR

Les médecins de famille et la psychothérapie sont la clé, selon lui. « Il faut que la personne ait un seul médecin et qu’il détermine à partir de quand c’est urgent, qu’il y ait une entente pour dire : « OK, on va attendre trois semaines et voir avant de passer à la prochaine étape. » »

Groupes de soutien

Il existe des organismes de soutien pour les gens anxieux, tous troubles confondus. C’est grâce à Phobies-Zéro, où elle a mis les pieds pour la première fois en 2002, en plus d’une démarche en psychothérapie et beaucoup de travail sur elle-même, que Danielle Moulin a pris du mieux.

Phobies-Zéro offre une ligne d’aide et des rencontres de groupe, où les proches sont bienvenus.

« Souvent, il y a de l’impuissance par rapport à la personne qui en souffre, les gens ont du mal à saisir le pourquoi », explique Debbie Lyons, coordonnatrice au développement à l’organisme.

Bruno Collard, directeur clinique de Revivre, précise que les services offerts par des organismes comme le sien – ateliers, ligne de soutien – ne « remplacent pas une aide médicale ou la psychothérapie ». Ils peuvent toutefois aider les gens à « se doter de stratégies ».

Danielle Moulin insiste : il y a «moyen de s’en sortir». «Je ne suis pas un trouble anxieux, je suis un être humain qui a des troubles anxieux», illustre-t-elle en agitant un éventail la proclamant fan no1 de Céline Dion.

Qu’elle est allée voir deux fois à Las Vegas, bien loin de son périmètre d’autrefois.

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Émélie Hébert Poulin

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Plutôt mourir que vomir

Émélie Hébert Poulin est sortie de chez elle trois fois entre novembre et fin mars. «C’est le temps de la gastro», explique-t-elle.

La femme de 31 ans a la phobie de vomir et de voir quelqu’un vomir.

Si cette peur est assez commune, l’émétophobie peut devenir aliénante.

La jeune entrepreneure a perdu des emplois en raison de son absentéisme. Elle retarde le projet d’avoir des enfants. Elle refuse de prendre des médicaments si les risques de vomir sont trop élevés. Elle craint d’avoir une maladie comme le cancer : faire de la chimiothérapie, avec ses effets secondaires, n’est pas envisageable.

Elle ressent ce malaise depuis l’enfance. Mais dans les dernières années, il est devenu de plus en plus envahissant.

Au plus fort de son trouble, en 2013-2014, elle estime avoir perdu environ 130 lb. La nourriture ne passait pas.

Elle a reçu un diagnostic d’anorexie. Même si elle n’était pas d’accord avec cette conclusion, elle a fini par accepter un traitement dans une clinique spécialisée en troubles alimentaires pour se remettre à manger.

Elle dit avoir «cogné à toutes les portes» pour trouver de l’aide. «Je me suis présentée énormément de fois à l’hôpital. Il y a des soirées où j’en visitais plusieurs, j’étais épuisée, confie-t-elle dans une entrevue par Skype – pour des raisons pratiques, même si elle admet que la rencontre en personne d’abord convenue aurait été anxiogène. J’étais très frustrée, je me disais : comment ça se fait qu’ils ne peuvent pas me prendre en charge ? Ils me disaient : ce n’est pas grave, vomir.»

Suicidaire, elle a déjà appelé le 9-1-1.

«J’étais sûre que j’allais vomir, je leur ai demandé d’envoyer quelqu’un, j’allais me tuer. Les ambulanciers et des policiers sont venus.» – Émélie Hébert Poulin

Le psychiatre absent, elle est rentrée chez elle. La nausée partie, la crise était passée. Mais sa voix reflète toujours colère et étonnement d’avoir été « laissée sans surveillance », malgré ses idées sombres.

Émélie Hébert Poulin a souvent eu l’impression d’être traitée différemment en raison de son historique médical.

«Quand tu as une maladie mentale et que tu te présentes aux urgences, tout est lié à ta maladie mentale…», déplore-t-elle.

 Ses pierres aux reins ont déjà été confondues avec un trouble panique, dit-elle.

Il est parfois difficile pour les médecins de départager les symptômes de santé mentale et de santé physique.

«C’est sûr qu’à un moment donné, ces gens [qui ont peur d’être malades] vont mourir», dit la psychiatre Judith Brouillette, pour expliquer que même les gens anxieux par rapport à la maladie peuvent avoir des maux causés par une réelle affection. Et l’inverse est aussi vrai.

Émélie Hébert Poulin offre maintenant, à travers le site internet de son entreprise Visages de la santé mentale (VDSM), témoignages et information pour aider d’autres personnes et combattre la stigmatisation. Le premier salon VDSM a eu lieu l’an dernier à Laval.

Grâce à une combinaison de médication, de psychothérapie à distance et de moyens alternatifs, elle apprend peu à peu à gérer ses troubles.

«L’anxiété, c’est beaucoup une job de reprogrammation du cerveau», dit-elle.

Avec l’hiver et les maux qui lui sont associés terminés, elle recommence à sortir.

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Jade Gauthier

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À un clic du diagnostic

Blogues et forums sur la santé, liste des symptômes à avoir à l’oeil, tests pour s’autodiagnostiquer des maux : le web regorge d’information sur les maladies. La tendance à se tourner vers l’internet au moindre bobo a même engendré un néologisme dans le langage populaire: cybercondrie.

Comme bien des jeunes de 18 ans, Jade Gauthier ne se départit jamais de son téléphone. Elle estime s’en servir la moitié du temps pour les réseaux sociaux. Et les 50% restants? Elle lit sur des maladies.

«Si j’ai mal à la tête, sur les tempes, je regarde sur l’internet, dit l’élève en arts et lettres. C’est peut-être un cancer. Je regarde les symptômes à longueur de journée.»

Assise dans un café, les jambes croisées, elle se tord les mains et sourit nerveusement.

«Ici, je regarde les gens et j’appréhende que quelqu’un fasse une crise cardiaque, confie-t-elle. Je n’ai pas juste peur de ce qui est contagieux, j’ai autant peur pour mon corps que pour les autres.»

Jade Gauthier a reçu un diagnostic de trouble de l’anxiété généralisée et de trouble d’adaptation en février dernier.

La préoccupation de la maladie est telle que la cégépienne évite certains lieux.

«Je ne vais pas dans les bars, les lieux publics. Je ne suis pas allée à mon après-bal, j’avais peur de voir des gens vomir.»– Jade Gauthier

Les transports collectifs sont aussi un cauchemar et elle se lave les mains fréquemment.

Une information toujours accessible

C’est  «impossible» pour la jeune femme de ne pas parcourir les listes de symptômes, maladies ou solutions préventives sur l’internet. Elle dit consulter plusieurs sites depuis sa 2eou 3e secondaire, «même quand ce n’est pas vraiment fiable, au cas où c’est vrai».

Autrefois, note le psychologue Frédéric Langlois, les gens souffrant d’hypocondrie ou de peur de la maladie cherchaient tout de même des réponses, dans les livres de médecine. Maintenant, l’information est beaucoup plus accessible, plus facilement.

«Internet, ça peut brouiller ces personnes, dit-il. Si l’hypocondriaque a peur du cancer et lit sur les effets négatifs, il va se mettre à avoir peur des traitements, ça va semer encore plus de doutes et compliquer les choses. »

Mais, selon lui, la présence de nombreux sites sur la santé ne peut pas pousser une personne vers un trouble mental sans prédispositions.

«Ça prend plusieurs ingrédients», note-t-il.

«L’internet peut être un catalyseur important de l’anxiété [en général], souligne Bruno Collard, de Revivre. Le fait d’être accroché aux réseaux sociaux, ça peut être plus anxiogène qu’apaisant. Pour certaines personnes, la solution est de diminuer ou couper la présence en ligne.»

http://www.lapresse.ca/

Dans le cerveau des personnes atteintes de troubles anxieux


Les personnes ayant des troubles anxieux et des troubles de l’humeur serait identifiable avec l’activité cérébrale. Grâce à ces recherches, il est possible de trouver de nouveaux traitements ou d’améliorer ceux qui sont déjà utilisés
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Dans le cerveau des personnes atteintes de troubles anxieux

 

Environ 3 millions de Canadiens (11,6 %) âgés de 18 ans et plus ont déclaré être atteints d’un trouble anxieux ou de l’humeur. Photo : iStock

Il existe une dérégulation du circuit neuronal de la peur chez les personnes atteintes de troubles anxieux, ont découvert des chercheurs québécois qui espèrent que cette nouvelle connaissance permettra de mieux cibler les traitements et peut-être d’en créer d’autres.

Un texte d’Alain Labelle

L’humain compose avec l’émotion de la peur de façon régulière, mais cette régularité devient problématique pour les personnes anxieuses.

Par exemple, si l’on se fait mordre par un chien, on peut développer une peur envers cet animal, ce qui fait référence à l’apprentissage de la peur conditionnée. Avec le temps, si on est exposé à différentes situations où il y a un chien et qu’il n’y a aucune conséquence négative, il est fort possible que notre cerveau forme un nouvel apprentissage de sécurité et que notre peur des chiens diminue, ce qui fait référence à l’extinction. Marie-France Marin, chercheuse

La science connaît le rôle de diverses régions cérébrales impliquées dans l’apprentissage de la peur et son extinction.

La chercheuse Marie-France Marin et ses collègues de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal ont voulu préciser ces connaissances et savoir si ces personnes possédaient des réseaux d’activations cérébrales précis et des caractéristiques psychophysiologiques différentes.

Pour y arriver, ils ont soumis des individus d’un groupe d’anxieux et d’un groupe contrôle à une situation engendrant un conditionnement de peur, suivie par une période d’extinction.

Les participants ont ainsi été exposés à un protocole de conditionnement de la peur et d’extinction au cours duquel des mesures psychophysiologiques et de neuro-imagerie ont été prises.

Le saviez-vous?

Environ 3 millions de Canadiens (11,6 %) âgés de 18 ans et plus ont déclaré être atteints d’un trouble anxieux ou de l’humeur en 2013.

Des différences claires

Les résultats de cette étude publiée dans le JAMA Psychiatry montrent que :

  • les circuits de peur sont dérégulés chez les personnes atteintes de troubles anxieux;
  • l’amygdale cérébrale joue un rôle important pour apprendre une association de peur, alors qu’une partie du cortex préfrontal (vmPFC) joue un rôle central dans l’apprentissage de l’extinction de la peur.

Dans ces travaux, une activation plus faible du cortex préfrontal (vmPFC) a été observée chez les participants atteints de troubles anxieux lors du rappel d’extinction de la peur. Cette hypoactivité est associée à la sévérité des symptômes d’anxiété que les individus rapportent ainsi qu’au nombre de troubles anxieux coexistant.

En outre, plus un individu est symptomatique, moins cette région sera active au moment de rappeler la mémoire de sécurité.

L’hypoactivation de cette même région avait d’ailleurs été bien documentée chez les individus ayant un trouble de stress post-traumatique. Marie-France Marin, chercheuse

« Il semble donc qu’il s’agisse là d’une signature qui s’applique à plusieurs psychopathologies qui sont caractérisées par des niveaux élevés de peur et une faible régulation émotionnelle », explique la chercheuse.

Il est donc établi que plus le trouble anxieux est sévère, soit par le nombre de diagnostics ou par la sévérité des symptômes que l’individu rapporte, moins le vmPFC est actif.

De plus, cette même région est connectée différemment au reste du circuit de la peur chez les individus atteints de troubles anxieux comparativement aux autres.

http://ici.radio-canada.ca

Phobies : quand la peur paralyse


Avoir peur, c’est normal, voir nécessaire pour notre survie, mais quand la peur devient phobie, cela peut devenir un vrai handicape
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Phobies : quand la peur paralyse

Shutterstock

Irrationnelles, envahissantes et souvent paralysantes, les phobies peuvent empoisonner la vie des gens aux prises avec une peur extrême, qu’on peut heureusement traiter.

Peur du noir, des hauteurs, des serpents, des foules, des grands espaces, de l’altitude, nous avons tous peur de certains dangers, qu’ils soient réels ou imaginaires. La peur en soi n’a rien d’anormal. Au contraire. Tel un système d’alarme, l’anxiété – qui est en fait l’anticipation d’un danger – est un système naturel d’autodéfense. C’est la peur qui nous empêche de frôler de trop près un précipice ou de toucher le feu. De fait, la peur est un réflexe inné qui prend racine dans nos origines préhistoriques.

L’animal qu’est l’humain a appris à craindre les serpents venimeux, les animaux sauvages, les prédateurs et tout ce qui menaçait sa vie ou sa sécurité. Aujourd’hui encore, les peurs liées à la sécurité physique sont les plus répandues et souvent les plus tenaces.

Cela dit, nous n’avons pas tous peur des mêmes choses. Outre notre mémoire ancestrale, notre tempérament, notre éducation et nos expériences conditionnent également nos peurs. Voilà pourquoi certains ont peur des chiens, des araignées ou de l’altitude, et d’autres, des ascenseurs ou des chats.

Peur ou phobie?

Si vous craignez d’aller chez le dentiste, êtes nerveuse et tendue une fois assise sur la chaise, mais que cela ne vous a ni empêché de dormir ni d’aller à votre rendez-vous, vous avez tout simplement peur. Mais si votre peur est une cause d’insomnie, de malaises et de pensées un peu obsédantes jusqu’au moment du rendez-vous, au cours duquel vous restez très anxieuse, on parle plutôt de phobie.

Dans ce scénario, la peur extrême provoque une véritable souffrance morale et parfois physique, car la phobie peut entraîner des symptômes physiques (tremblements, vertiges, nausées, maux de tête, insomnie, etc.) Et si votre peur est telle que vous évitez carrément d’aller chez le dentiste, même si vous en avez besoin, vous souffrez alors d’une phobie fonctionnelle. Les personnes aux prises avec ce type de phobie évitent systématiquement les situations, les objets et les endroits dont elles ont peur. Elles abandonnent des activités, renoncent à d’autres pour éviter d’éprouver cette peur paralysante. Hélas, éviter une situation ne fait qu’accroître l’intensité de la phobie. Un cercle vicieux qui peut nuire aux activités professionnelles, sociales ou familiales.

Un trouble anxieux

La phobie est une peur d’une très grande intensité et souvent irrationnelle. Mais la différence entre la peur et la phobie ne réside pas uniquement dans l’intensité. Les phobies sont classées parmi les troubles anxieux cliniquement répertoriés. L’anxiété est la peur qu’un mal survienne. Une réaction normale aux dangers. Le trouble anxieux, lui, dans la plupart des cas, est lié à un « dérèglement » de l’anxiété, de son intensité et de ses manifestations.

« Voilà pourquoi il est important de consulter un thérapeute spécialisé dans le traitement des troubles anxieux pour traiter des phobies spécifiques, soutient le Dr Camillo Zacchia, psychologue, conseiller principal au Bureau d’éducation en santé mentale de l’Institut Douglas et vice-président de Phobies-Zéro, un groupe d’entraide et de ressources pour les personnes aux prises avec des phobies.

Les phobies spécifiques

Lorsqu’on parle de phobies des chiens, des aiguilles, des serpents, des orages, etc., on parle de phobies spécifiques, et leur liste, publiée notamment sur le site de Phobies-Zéro, est fort longue. Les spécialistes les distinguent de l’agoraphobie avec ou sans trouble panique (plutôt liée à l’éloignement d’une personne ou d’un lieu sécurisant).

Les phobies spécifiques peuvent provenir de trois types de menaces, réelles ou imaginaires.

Les menaces physiques : peur d’étouffer, de souffrir, de développer une maladie comme un cancer, de mourir, etc.

Les menaces psychiques : peur de perdre la raison, le contrôle de ses réactions ou de ses actions, d’être enfermé dans un institut ou de commettre un acte irrémédiable.

Les menaces liées à l’image : peur d’être jugé, du ridicule, d’être rejeté, etc. La phobie sociale liée aux nouvelles rencontres, aux situations de groupes, en est un bon exemple.

Une phobie spécifique peut être liée à l’une ou l’autre de ces menaces. Par exemple, la phobie de l’avion peut provenir de la peur de s’écraser ou d’étouffer, voire de faire une crise incontrôlable ou encore d’être malade et ridicule devant les autres passagers.

Cinq types de phobies

Les experts de l’Hôpital Louis-H. Lafontaine classent les phobies spécifiques en 5 grandes catégories :

  • phobies liées à des animaux ou des insectes
  • phobies liées à l’environnement (orages, séismes, hauteurs, eau)
  • phobies liées au sang, aux injections ou aux accidents (procédures médicales en général)
  • phobies situationnelles (transports publics, tunnels, ponts, voyages aériens, ascenseurs, conduite automobile, endroits clos). Ce type de phobies spécifiques est souvent associé à l’agoraphobie.
  • phobies diverses : liées à d’autres catégories d’objets ou de situations.

Les phobies les plus fréquentes?

« Celles liées aux animaux, aux araignées, aux serpents, aux injections, au dentiste, aux prises de sang, aux orages, à l’avion, aux tunnels, au train, aux autres insectes et à l’altitude », répond le Dr Zacchia.

Répandues, les phobies?

« Oui, affirme le Dr Zacchia, mais il est difficile d’établir des statistiques précises. On estime qu’environ 10 % de la population souffre de troubles anxieux. Pour les phobies spécifiques, des études parlent plutôt de 25 à 50 % de la population. »

Pourquoi si peu de précisions?

 Parce que peu de gens souffrant de phobies consultent et que nombre d’entre elles ne nécessitent pas de traitement. Par exemple, si vous habitez au Québec, n’aimez pas les voyages d’aventure et ne travaillez pas dans un zoo, il y a fort à parier que votre phobie des serpents ne vous empêchera pas de fonctionner et ne vous conduira pas chez le psy.

Traiter ou ne pas traiter la phobie?

La phobie se développe souvent pendant l’enfance et l’adolescence. Elle disparaît parfois à l’âge adulte, mais en général, elle perdure.

« Des recherches scientifiques ont démontré que sans traitement approprié, à peine 20 % des cas de phobie chez l’adulte se résorbent », rapporte le site Internet de l’Hôpital Louis-H. Lafontaine.

Et pour les autres? Faut-il apprendre à composer avec cette peur envahissante ou bien vaut-il mieux consulter?

« Tout dépend de votre niveau de souffrance, répond le Dr Zacchia. Si vous devez régulièrement affronter votre phobie et éprouvez des symptômes pénibles chaque fois ou si elle vous empêche de fonctionner, nuit à votre épanouissement, à votre santé ou à votre vie de famille, cela vaut la peine de consulter. D’autant plus que les traitements fonctionnent bien dans la très grande majorité des cas. »

Les traitements les plus répandus et les plus efficaces pour les phobies spécifiques sont les thérapies cognitives/comportementales.

« Les techniques cognitives nous permettent de travailler sur le plan des croyances de la personne, de ses perceptions, etc. On complète avec l’approche comportementale, qui consiste en une désensibilisation graduelle. On peut commencer par regarder des images de l’objet, de la situation ou de l’animal, s’en approcher doucement et graduellement. En général, quelques séances suffisent. Dans certains cas, si la phobie est associée à d’autres problèmes ou très intense, il faut un peu plus de temps. »

Évidemment, certaines phobies sont plus compliquées à traiter en désensibilisation. C’est le cas notamment pour l’avion, étant donné le coût et l’accès plus limité. Il existe des programmes de désensibilisation, mais mieux vaut d’abord consulter un professionnel, qui vous référera, au besoin.

Phobies-Zéro : la force des groupes d’entraide

Après avoir souffert d’agoraphobie pendant 20 ans, Marie-Andrée Laplante a décidé de venir en aide à d’autres agoraphobes et personnes atteintes de phobies et de troubles anxieux. C’est ainsi qu’elle a fondé Phobies-Zéro, en 1991. Depuis 20 ans, 13 549 personnes se sont prévalues des services de cet organisme qui offre :

  • une ligne d’écoute (514 276-3105 ou 1 866 922-0002)
  • des groupes de soutien et d’entraide (grande région de Montréal et celle de Québec)
  • du parrainage et de l’information.

Efficace, l’aide des groupes de soutien?

« Oui. Pour certaines personnes, il est rassurant de savoir qu’elles ne sont pas seules à souffrir de phobies. L’information et le partage avec d’autres sont d’excellents outils qui peuvent s’ajouter au traitement. »

Pour en savoir plus
Phobies-Zéro
Article sur le site de l’Hôpital Louis-H. Lafontaine
Article du ministère de la Santé et des Services sociaux
Blogue du Dr Camillo Zacchia

http://fr.chatelaine.com/