Un logiciel dont ses sources proviennent de procès dont il n’y a pas eu d’erreur judiciaire. Ils ont enregistré tout ce que le corps fait lors d’un mensonge en plus des hésitations de la parole. Il reste encore d’autres options à ajouter. Peut-être que dans un avenir prochain, les criminels auront de plus en plus de difficultés à mentir pour essayer d’échapper à la justice
Nuage
Ce logiciel sait si vous mentez
Concours de faux procès de la Durham Nativity School au tribunal du comté en décembre 2015. Christine T. Nguyen/AP/SIPA
Par Arnaud Devillard
Des chercheurs américains ont mis au point un logiciel capable de savoir si quelqu’un ment, simplement en l’observant. Le programme s’est entraîné sur des vidéos de vrais procès.
DOUTE. Imaginons que vous soyez soumis à un interrogatoire. Vous ne vous en rendez peut-être pas compte, mais vous avez tendance à regarder votre interlocuteur droit dans les yeux. Vous agitez aussi les deux mains en même temps. Et vous hochez pas mal la tête. Sans parler des grimaces qui, de temps en temps, défigurent votre visage. Sachez-le, si avec tout cela, vous n’êtes pas coupable de quelque chose, vous serez au moins suspect. Et pas besoin d’un détecteur de mensonge à l’ancienne branché sur votre pouls : il a suffi d’une caméra et d’un logiciel pour faire naître le doute.
Elocution, gestuelle et mouvements faciaux sont analysés
Quatre chercheurs de l’université du Michigan, aux Etats-Unis, ont en effet mis au point un prototype censé permettre, à terme, de déterminer si quelqu’un ment ou dit la vérité, simplement en scrutant son élocution, sa gestuelle et ses mouvements faciaux. Le programme relève de la technique du machine learning, à savoir qu’il apprend en analysant un jeu de données et améliore son efficacité au fur et à mesure qu’il analyse de nouvelles données.
MAUVAIS MENTEURS. En l’occurrence, ce logiciel a été entraîné avec 120 vidéos d’authentiques procès filmés dont on connaît le verdict (et qui ne sont pas des erreurs judiciaires !) et pour lesquels on sait qui a menti et qui a dit la vérité au cours de l’audience. L’intérêt du procédé ? Eviter d’avoir à recréer en laboratoire une fausse situation de procès où un interlocuteur ferait semblant de mentir.
Les chercheurs estiment que dans ce type de contexte, les « menteurs » jouent trop mal le mensonge car il manque la motivation inhérente au procès : sauver sa peau !
Les vidéos utilisées montrent à la fois des suspects et des témoins et, dans la moitié des cas choisis, les personnes mentaient. Les chercheurs ont intégralement retranscrit les audiences, en y incluant les hésitations et les onomatopées (les « euh » et « bah »), afin de déterminer comment s’exprime un menteur, quels sont ses tics. Idem pour les gestuelles, réparties en neuf catégories de mouvements de tête, d’yeux, de bouche, de mains et de sourcils, chacune correspondant à un niveau de mensonge.
Ce sont tous ces paramètres qui ont été intégrés au logiciel. Il en ressort que fixer son interlocuteur est un signe de mensonge probable (70 % des menteurs le faisaient, contre 60 % de ceux qui disaient la vérité). Agiter les mains également (40 % contre 25 %), comme se tordre les traits du visage (30 % contre 10 %) (voir le détail des critères ici).
IMAGERIE THERMIQUE. Les premiers résultats sont prometteurs puisque l’équipe assure avoir obtenu des taux d’efficacité du dispositif de 75 %. La recherche n’est cependant pas terminée puisqu’elle devrait prochainement intégrer d’autres paramètres comme le rythme cardiaque ou celui de la respiration, des données là aussi captées à distance, par imagerie thermique.