Le Saviez-Vous ► 13 phrases et mots qui peuvent signaler une dépression


Lors d’une dépression, il y a des mots, des phrases qui peuvent donner des indices sur l’état psychologique d’une personne. Bien sûr, cela dépend du contexte et tout ce qui entoure le climat de cette personne. Ce n’est pas tout le monde qui est outillée pour aider une personne dépressive d’où l’importance de demander de l’aide

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13 phrases et mots qui peuvent signaler une dépression

La dépression peut amener à se concentrer sur soi.MANGOSTAR/SHUTTERSTOCK

Tina Donvito

Nous utilisons tous de temps à autre les expressions et les mots suivants. Si vous remarquez que vous commencez à les utiliser souvent ou qu’une personne de votre entourage le fait, vous souffrez peut-être de dépression. Il pourrait être temps de demander de l’aide.

«Moi», «moi-même» et «je»

La dépression peut amener à se concentrer sur soi. Les gens qui ont des symptômes dépressifs utilisent plus de pronoms à la première personne (more first-person pronouns): cela révèle une augmentation de l’attention sur soi, selon une étude publiée dans la revue Clinical Psychological Science qui a analysé des forums en ligne.

«Quand on souffre de dépression, on ressent les choses intensément. Les dépressifs parlent donc davantage à la première personne: ‘je’, ‘moi’, ‘moi-même’», explique la psychologue Deborah Serani, auteure d’un livre sur le sujet (Living with Depression). «Les enfants et les adultes déprimés ont tendance à être introspectifs, parce que la maladie s’empare à la fois de leur esprit et de leur corps, de sorte que la conscience de soi augmente chez eux. Mais au lieu d’être positive, cette conscience de soi est négative et corrosive».

«Toujours» et «jamais»

L’étude montre aussi que les gens qui ont des symptômes dépressifs ont tendance à parler de manière absolue. La dépression mène fréquemment à des distorsions des modèles de pensées (appelées distorsions cognitives) qui affectent le ressenti. Tout devient blanc ou noir, par exemple. Si un de vos amis répète des phrases comme «Ça arrive toujours» ou encore «Je ne serai jamais capable de faire ça», soyez attentif.

Nous utilisons tous ce genre de phrases de temps en temps. Mais les dépressifs les utilisent systématiquement.

«Les lobes frontaux du cerveau sont affectés par la dépression, ce qui entraîne des perturbations du jugement, du mode de pensée et du raisonnement: tout est noir ou blanc ou c’est tout ou rien, explique Deborah Serani. Une fois que les symptômes de la dépression diminuent et que la personne va mieux, elle démontre un éventail plus grand de solutions, un bon jugement et une pensée moins rigide.»

Le dégoût de soi et une image négative de soi sont fréquents dans la dépression.WAYHOME STUDIO/SHUTTERSTOCK

«Je devrais…»

Cette expression fait partie de l’arsenal de pensée qui consiste à voir tout en blanc ou noir chez les dépressifs quand ils réfléchissent à leur vie et à eux-mêmes.

«Le dégoût de soi et une image négative de soi sont fréquents dans la dépression, aussi ‘je devrais’ est un symptôme d’un mode de pensée étroit et rigide», explique Deborah Serani.

Les gens déprimés s’enlisent dans des pensées négatives et ont de la difficulté à penser de façon positive, selon une recherche publiée aux États-Unis par l’Association for Psychological Science. C’est un cercle vicieux: la pensée que vous «devriez» faire ou ressentir les choses différemment vous rend encore plus déprimé..

Mots qui expriment une émotion négative

Les personnes déprimées sont souvent incapables de nommer leur maladie par son nom. Dans une étude sur des adolescents, on montre qu’ils utilisent rarement le mot «déprimé» pour exprimer leurs sentiments, et se rabattent plutôt sur des mots d’émotion négative, comme se sentir «mal», «stressé» ou «fâché».

Ce peut être un signe de dépression, mais il ne faut pas sauter aux conclusions, car nous utilisons tous ces mots à l’occasion. Il faut donc reconnaître un schème de pensée, une tendance.

«J’entends de nombreux mots dans la bouche d’enfants et d’adultes déprimés, comme: mal, triste, impuissant, sans espoir, douloureux, perdu, inutile, vain, stupide, bloqué, sans amarres, à la dérive, souffrance, seul, peur, hésitant, fragile, désespoir, raconte Deborah Serani. Ces mots sont souvent utilisés par les patients pour se décrire et expliquer comment ils se sentent.»

«Je ne peux pas»

Cette expression est complexe, car souvent les personnes déprimées, au sens littéral, ne peuvent pas sortir du lit ni même s’habiller, et pire ne peuvent pas sortir de leur dépression. L’impossibilité d’accomplir les tâches quotidiennes est un des symptômes classiques de dépression, selon l’institut américain de Santé mentale (NIMH).

Ce «je ne peux pas» indique souvent une action qu’on ne peut pas faire, mais c’est aussi une utilisation négative du langage pour exprimer qu’on se sent déprimé.

Deborah Serani explique que les gens dépressifs diront: «je ne peux pas faire ça»,«je ne peux pas faire ces démarches»,«je ne peux pas faire mon travail»,«je ne peux pas sortir du lit»,«je ne peux pas faire avancer les choses». «La maladie de la dépression verrouille leurs possibilités.»

«C’est de ma faute»

La dépression apporte culpabilité et blâme de soi. Cela entre dans la tendance du tout ou rien chez les déprimés.

«La dépression crée des cycles de pensées négatives parce qu’elle affecte le fonctionnement du lobe frontal, qui est le siège du raisonnement et du jugement. C’est pourquoi beaucoup de déprimés se sentent coupables de ce qu’ils ressentent», dit Deborah Serani.

Dans une étude publiée dans les Archives of General Psychiatry, on a utilisé l’IRM pour montrer comment les sentiments de culpabilité chez les dépressifs se traduisent différemment dans le cerveau que chez les personnes qui ne sont pas déprimées. La culpabilité est dangereuse lorsque les personnes pensent «qu’elles sont un fardeau pour leur famille et leurs proches. Elles peuvent alors avoir des pensées suicidaires telles que: ‘Si je disparais, je ne serais plus un poids pour personne’. Il est vital de reconnaître un mode de pensée

Vous croyez que vous réagissez correctement, mais ce pourrait être le signe d’une dysthymie, c’est-à-dire une dépression chronique.HALFBOTTLE/SHUTTERSTOCK

«Je vais bien»

Vous croyez que vous réagissez correctement, mais ce pourrait être le signe d’une dysthymie, c’est-à-dire une dépression chronique qui vous permet néanmoins de fonctionner (high-functioning depression).

La recherche montre que, aux États-Unis, la stigmatisation (widespread stigma) de la maladie mentale empêche de nombreuses personnes de se faire soigner.

«La capacité de jugement étant altérée par la dépression, il devient difficile d’en parler ou de demander de l’aide, dit Deborah Serani. La maladie mentale stigmatise la personne atteinte, et son sentiment de honte l’empêche de parler de sa douleur. Elle fait comme si tout allait bien.»

D’autres personnes se sentent trop faibles ou trop vulnérables pour se faire aider.

«Je suis fatigué»

La dépression peut s’accompagner de symptômes émotifs et physiques.

Deborah Serani l’explique ainsi: «La fatigue et les douleurs sont reliées à l’inflammation qui accompagne la dépression et touche des connexions nerveuses et des substances neurochimiques.»

«Je me souviens que, lors de mon premier épisode dépressif grave à 19 ans, j’étais épuisée, raconte Deborah Serani. Ça me demandait tellement d’effort pour me retourner dans mon lit, sortir du lit, prendre une douche, manger et faire les petites choses quotidiennes.» La fatigue est physique et émotionnelle chez les déprimés. Ils diront: «mon état m’épuise tellement».

«Je veux être seule»

Les personnes déprimées peuvent s’isoler et leurs pensées négatives ont des répercussions sur leur cerveau.

«La neurobiologie de la dépression diminue beaucoup l’activité cérébrale, de sorte qu’une personne déprimée fuira les expériences stimulantes, préférant les pièces sombres, les lieux tranquilles et l’éloignement des autres, explique Deborah Serani. Or, il leur faut au contraire être en communication avec les autres, être dans la lumière au sens propre et figuré, et être stimulées par la présence des autres.»

Or les médias sociaux n’ont pas le même effet que les rencontres en personne: une forte utilisation des médias sociaux peut accompagner en fait la dépression chez les jeunes, selon une étude publiée dans Computers in Human Behavior.

L’isolation sociale ressentie par la personne qui souffre de dépression peut mener celle-ci à penser que les autres ne l’apprécient.WAYHOME STUDIO/SHUTTERSTOCK

«Tout le monde s’en fout»

Ce n’est pas seulement l’isolement qui est nocif, c’est aussi le sentiment de solitude, selon les études. L’isolation sociale ressentie par la personne déprimée peut mener celle-ci à penser que les autres ne l’apprécient pas et n’attachent pas d’importance à sa présence. Ceci renforce son sentiment d’inutilité et l’entraîne un peu plus profondément sur le chemin de la dépression.

Quand on se sent seul, on pense que personne n’est là pour vous aider.

«Le sentiment d’impuissance est un autre symptôme de la dépression, poursuit Deborah Serani. Les enfants et les adultes déprimés ont une vision en tunnel (étroite): ils n’arrivent pas à avoir d’espoir dans l’avenir. Encore une fois, leurs lobes frontaux affectés diminuent la résolution des problèmes et la pose d’un jugement raisonnable.

«Je n’en ai pas envie»

La perte d’intérêt dans les choses qui vous donnaient du plaisir est un autre aspect du repli sur soi. Les déprimés diront «ce n’est plus amusant», ou ils n’auront plus le goût de faire une activité qu’ils aimaient.

«Les aspects psycho-émotifs de la dépression diminuent les sensations de joie et de bonheur. Le refus de faire des choses et la perte d’intérêt dans des activités importantes sont des signes significatifs de dépression, commente Deborah Serani.La dépression est une maladie d’épuisement. Ses symptômes siphonnent tout ce qui est bon, bien, heureux et possible.»

Selon des recherches, cette sensation d’engourdissement est due au dysfonctionnement du «système de récompense» du cerveau, qui empêche la libération de substances chimiques de bien-être. C’est pourquoi il faut éviter de dire à une personne dépressive «ressaisis-toi». 

«À quoi ça sert?»

La dépression est implacable, elle accable la personne et peut lui donner envie d’abandonner. Cette maladie compte parmi les principaux facteurs de risque de suicide, selon les CDC. Deborah Serani conclut:

«Si vous pensez que vous ne pourrez aller mieux, que rien ne peut changer, vous voulez que ça arrête. Et vous envisagez la mort comme le moyen d’améliorer les choses.»

Les gens qui parlent de l’absurdité de la vie, qui «en ont assez», qui se sentent «pris», qui ne peuvent «continuer» ou qui sont obsédés par la mort ont peut-être des pensées suicidaires. Si une personne que vous aimez ou vous-même parlez de cette façon, appelez le Centre de prévention du suicide au 1-866-APPELLE, pour demander de l’aide

«Les individus déprimés qui se sont fait soigner et ont retrouvé une pleine santé ne peuvent croire qu’ils ont voulu un jour s’ôter la vie.»

Quand une personne dépressive se sent mieux, ça ne veut pas dire que cette personne va mieux.RANTA IMAGES/SHUTTERSTOCK

«Je me sens mieux»

C’est une des idées fausses les plus dangereuses sur la dépression. Ironiquement, lorsqu’une personne qui traverse une dépression a pris la décision de mettre fin à sa vie, elle affirme parfois aller mieux, être plus calme ou en paix.

«Les études nous ont appris que le “retour à la santé” d’une personne qui affirme se sentir mieux peut nous distraire de son suicide imminent», explique Deborah Serani.

Vous croyez que la personne que vous aimez va mieux? Ils vaudrait peut-être mieux de demander à un médecin d’évaluer son état.

«Toute personne déprimée doit être traitée par un professionnel de la santé qui évaluera chaque étape de sa guérison dans le contexte d’une trajectoire positive.»

https://www.selection.ca/

Arrêtons de stigmatiser les bébés qui pleurent (et leurs parents)


Que ce soit au Japon ou ailleurs, les pleurs de bébés sont souvent mal perçu par l’entourage surtout en public. Regards désapprobateurs, jugements et autres … Au Japon, le gouvernement veut rétablir le droit au bébé de pleurer, qui est leur seul mode de communication.
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Arrêtons de stigmatiser les bébés qui pleurent (et leurs parents)

Deux bébés en pleine compétition de pleurs à Tokyo  | Kazuhiro Nogi / AFP

Deux bébés en pleine compétition de pleurs à Tokyo | Kazuhiro Nogi / AFP

Repéré par Aurélie Rodrigues

Ils faut les laisser gazouiller et babiller en paix.

Repéré sur Quartz

Au Japon, les pleurs de bébé sont considérés comme un gage de bonne santé. Pourtant, ce pays fait partie des moins tolérants envers les gazouillis et autres babillages de nouveau-né. En cause: un taux de natalité en baisse continue depuis 37 ans. La population japonaise serait tout simplement moins habituée à la présence de bébés.

Un groupe de treize hommes politiques se sont ligués pour éliminer toute stigmatisation à l’égard des bébés qui pleurent. Ce 4 juin, ces élus ont publiquement annoncé leur soutien au projet «We Love Babies»qui fait campagne depuis 2016 pour permettre aux bébés de pleurer librement dans l’espace public. À l’aide de stickers portant la mention «Il n’y a pas de mal à pleurer» collés sur leurs vêtements, ils veulent faire changer les mentalités.

Quartz explique que cet engagement accompagne une nouvelle direction politique du Premier ministre Shinzo Abe où la famille retrouverait une place centrale dans la société japonaise.

Des bébés mal aimés

Cette intolérance envers les chérubins et leurs «areuh» peut aller très loin: des projets de construction de crèches ont été stoppés par des riverains qui craignaient une trop grande «pollution sonore» occasionnée par les plus petits. Plus alarmant encore: un homme de 43 ans a menacé un homme et sa fille de six ans avec une hachette. D’après la police, le quarantenaire ne supportait plus le «tapage» causé par la garderie voisinne et les enfants.

En octobre 2017, la compagnie aérienne All Nippon Airways, avait même mené une étude pour essayer de trouver une solution qui empêcherait les bébés de pleurer pendant le décollage et l’atterrissage. Toutefois, on vous rassure, comme le souligne Quartz, dans la plupart des cas les pleurs de bébés ne s’accompagnent que d’un simple regard désapprobateur.

Un bébé ne doit pas pleurer?

«La société japonaise a encore tendance à mettre mal à l’aise les parents de bébés qui pleurent», explique Eikei Suzuki, gouverneur de la préfecture de Mie.

Selon Quartz, il est courant pour les parents japonais d’éviter d’amener leurs enfants dans les espaces publics bondés par peur d’être réprimandés. Cette stigmatisation empêche même certaines femmes de prendre les transports en commun aux heures de pointe. Pire, un communiqué de All Nippon Airways conseille tout bonnement aux parents «d’éviter les voyages en avion» en raison du bruit que pourrait engendrer leurs progénitures.

Pourtant, ces pleurs sont un moyen de communication pour les bébés: ils peuvent signifier la faim, la douleur, l’ennui, la peur, l’inconfort. Au lieu de vouloir à tout prix les stopper, pourquoi ne pas essayer de les comprendre? L’université de Californie a d’ailleurs lancé une application mobile, ChatterBaby, pour traduire les pleurs des bébés.

http://www.slate.fr/

Le Saviez-Vous ► Don de sang : 35 ans plus tard, les répercussions d’un communiqué


Cela s’est passé au Canada quand le Sida est apparu dans le pays. Bien qu’on ne savait pas grand chose de cette maladie, la Croix-Rouge du Canada a stigmatisé la communauté haïtienne sans raison logique. Tout drogué, ceux atteint de VIH/Sida, les homosexuels ainsi que les Haïtiens ne devaient pas faire des dons de sang. C’est comme dire que les noirs sont porteurs de Sida. Vous imaginez la méfiance des personnes qui voulaient un logement ou n’importe quoi d’autres … ? Alors qu’il y a des maladies génétiques qui ont besoin de transfusion sanguine avec un même bagage génétiques causaient un réel problème dans les banques de sang. Aujourd’hui, encore … Cette stigmatisation a encore des effets négatifs parmi les plus vieux, les uns restant avec leurs préjugés, les autres avec une blessure profonde
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Don de sang : 35 ans plus tard, les répercussions d’un communiqué

 

Communiqué du 10 mars 1983 de la Croix-Rouge canadienne demandant à certaines personnes et communautés de ne pas donner leur sang.

Communiqué du 10 mars 1983 de la Croix-Rouge canadienne demandant à certaines personnes et communautés de ne pas donner leur sang. Photo : Courtoisie: Viviane Namasté

En 1983, la Croix-Rouge canadienne publie un communiqué déconseillant aux homosexuels, aux héroïnomanes et aux Haïtiens de donner leur sang. Trente-cinq ans plus tard, le souvenir de cette époque est toujours douloureux pour des Haïtiens vivant au Canada, l’impact s’est même fait sentir dans le programme du don du sang.

Un texte de Marie-Laure Josselin

Marlène Rateau ne peut oublier ce 10 mars 1983, lorsque les médias parlent de cette mystérieuse maladie pour évoquer le communiqué de la Croix-Rouge canadienne qui fait le lien entre le VIH/sida et la communauté haïtienne à laquelle Marlène appartient.

« De la colère, de la colère, raconte en grinçant les dents celle qui a été infirmière puis enseignante. Je me disais que ce n’est pas possible que je vive dans un pays de droits et que les droits soient bafoués par nul autre qu’un organisme international! »

Marlène Rateau, ancienne infirmière et enseignante

Marlène Rateau, ancienne infirmière et enseignante Photo : Radio-Canada/Marie-Laure Josselin

Le premier cas officiel du sida avait été signalé au Canada en 1982. Un an plus tard, 27 autres cas avaient été répertoriés.

Emboîtant le pas aux États-Unis, la Croix-Rouge canadienne cible alors trois communautés et leur demande de ne pas donner leur sang.

Pour la communauté noire, c’est le choc. Sur la place publique, la visibilité de leur couleur de peau les associait à la maladie.

La stigmatisation était grave aussi pour les autres, mais ils pouvaient se diluer dans la population. Mais nous? 1983, pour les Noirs, c’était : « Il a probablement le sida, je ne m’assoirai pas à côté de lui dans l’autobus, car je ne veux pas attraper ce mal. » C’était épouvantable!

Marlène Rateau

Même dans les hôpitaux, le personnel venait chercher les collègues d’origine haïtienne « pour leur dire : tu devrais t’occuper de ce patient, il a ta maladie. Ça arrivait », raconte Marlène Rateau.

« Plein de gens m’ont dit cela », confirme Viviane Namasté, titulaire de la Chaire de recherche sur le VIH/sida et la santé sexuelle à l’Université Concordia.

Depuis cinq ans, elle s’intéresse à ce sujet. Et elle aussi, elle a entendu plusieurs histoires, notamment celles de locataires potentiels qui demandaient au propriétaire de logement où il y avait eu des Haïtiens de le désinfecter au complet.

Les gens pensaient que le sida était comme une maladie contagieuse, facile à attraper. Et c’est la compréhension de la maladie à ce moment : comme un petit rhume que l’on peut attraper. Pour se protéger, la personne allait s’éloigner physiquement de la personne soupçonnée d’être infectée. Viviane Namasté, titulaire de la Chaire de recherche sur le VIH/Sida et la santé sexuelle à l’université Concordia

Pourtant, à l’époque, on ne sait quasiment rien sur le virus. La Croix-Rouge ne publie qu’en 1984 un dépliant où il est question de sida, mais il ne fait mention ni des signes ni des symptômes. Ce qui ne l’empêche pas de publier deux communiqués dans l’année 1983 demandant à certaines communautés d’éviter de donner leur sang, et ce, même si la communauté haïtienne l’alertait sur cette stigmatisation.

On ne ciblait pas des personnes pour leur comportement ou à cause d’une pratique, mais selon leur nationalité. Le communiqué a été reçu comme une insulte et une blessure qui a marqué les gens.

« Aujourd’hui encore, je ne leur pardonne pas », répète Marlène Rateau.

À l’époque, elle tentait d’organiser des collectes de sang afin de soulager les patients atteints d’anémie falciforme, une maladie du sang qui touche majoritairement la communauté noire.

Pour exprimer la douleur que représente l'anémie falciforme, une maladie du sang, on pourrait prendre l'exemple du piment. Ça brûle, pique, c'est chaud dans tout le corps car la douleur peut débuter à un doigt, un bras, une jambe.

Pour exprimer la douleur que représente l’anémie falciforme, une maladie du sang, on pourrait prendre l’exemple du piment. Ça brûle, pique, c’est chaud dans tout le corps car la douleur peut débuter à un doigt, un bras, une jambe. Photo : Radio-Canada/Marie-Laure Josselin

Selon l’association d’anémie falciforme du Québec, la maladie est plus répandue que toute autre maladie génétique. Une personne de race noire sur 10 en a le gène et un enfant sur 400 de la communauté à risque en est atteint. Les transfusions sanguines sont nécessaires pour soulager les patients, faute de remèdes.

On ne peut pas transfuser uniquement sur la base du groupe sanguin, il faut aller au-delà, sinon la personne peut faire des réactions. C’est plus facile de trouver du sang compatible chez les personnes qui partagent le même bagage génétique, d’où l’importance d’encourager les gens de la communauté noire à donner du sang, car c’est un vrai besoin. C’est crucial! Wilson Sanon, président de l’association d’anémie falciforme du Québec.

Fin des années 70, lors de ces collectes, Marlène Rateau avait déjà du mal à trouver beaucoup de donneurs, « et 1983 est arrivé et a tout bousillé ».

Un an plus tard, le Comité consultatif national sur le sida a aussi distribué 200 000 exemplaires d’un dépliant faisant encore une fois le lien entre le sida et les trois communautés.

On ne parlait pourtant pas dedans de port de préservatif et on pouvait y lire que si vous ne faisiez pas partie de ces groupes, vous ne courriez presque aucun risque de contracter le sida.

Les membres de la communauté haïtienne ont rué dans les brancards pour essayer de comprendre.

« Pourquoi, pourquoi alors qu’il y a encore tant de questionnements, cibler une communauté entière? »

« Les traces de cette blessure existent toujours, assure Viviane Namasté. Les gens m’ont dit qu’ils en avaient parlé à leurs enfants et leurs petits-enfants. C’est sûr qu’il y a eu un transfert générationnel de cette histoire. »

Marlène, comme d’autres, n’a pas encouragé ses enfants à donner leur sang. Le traumatisme est trop grand…

Peut-être, ose-t-elle avancer, que les jeunes peuvent passer par-dessus, mais « pas une vieille comme elle ». Sans ce communiqué, elle l’assure, elle aurait inculqué ce « geste de générosité » à sa famille.

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/

Les écoles invitées à ne pas crier aux poux


Étant donné que l’incubation des lentes de poux est de 7 à 12 jours et que les symptômes apparaissent beaucoup plus tard, il y a de fort risques que la contamination de poux à l’école où à la garderie. Quand on reçoit une lettre d’alerte aux poux, j’ai des souvenirs d’enfance, une famille dont un des membres que je me souviens encore de son nom était stigmatiser par les autres élèves, les enfants disait qu’il ne fallait pas toucher à ce gars, ni boire au même abreuvoir que lui au risque d’attraper des poux. Cela l’a suivi tout son primaire et je ne sais même pas s’il a vraiment été infesté de poux durant ses années. C’est vrai que c’est toute une histoire si un enfant à des poux, mais cela n’est pas une question d’hygiène, cela peut arriver à tous
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Les écoles invitées à ne pas crier aux poux

 

Le ministère de la Santé recommande de ne... (PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE)

Le ministère de la Santé recommande de ne pas avertir les parents que des poux ont été constatés en classe avant que l’infestation ne touche 10% du groupe.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

LOUISE LEDUC
La Presse

Si quelqu’un dans la classe ou dans le groupe de garderie de votre enfant a des poux, devriez-vous être mis au courant? Selon le ministère de la Santé, pas avant que l’infestation ne touche 10% du groupe.

En ce début d’année, une présentation faite à la Commission scolaire de Laval ces derniers jours a fait sourciller des membres du personnel.

Quand des poux sont constatés dans une classe, non, il ne faut pas d’emblée alerter tous les parents et, non, l’enfant ne doit pas être renvoyé à la maison pour qu’il y fasse un traitement.

Vérification faite, aussi bien à la Commission scolaire de Montréal qu’à la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (la Commission scolaire de Laval n’a pas rappelé La Presse), on s’en remet en cette rentrée aux lignes directrices pour le contrôle de la pédiculose du cuir chevelu édictées il y a quelques mois par le ministère de la Santé.

Le document gouvernemental ne pourrait pas faire un tour plus complet de la question. Plus de 80 pages bien comptées.

Selon le Ministère, sous la barre d’une réelle éclosion touchant 10% des enfants d’un groupe, les autres parents ne devraient pas être prévenus parce que l’envoi de lettres fait «monter considérablement le niveau d’anxiété et de stigmatisation» et «engendre des traitements prophylactiques inappropriés».

«Politiques sans lentes» à éviter

Les écoles doivent aussi s’abstenir de mettre en place des «politiques sans lentes» visant à exclure les enfants infestés d’un milieu jusqu’à ce que plus aucune lente ne soit trouvée sur leur cuir chevelu.

De telles politiques, est-il écrit, sont inefficaces et elles entraînent «la perte de plusieurs jours de classe pour les élèves, un isolement et une détresse sociale accrue», en plus de susciter «l’embarras, la honte et la stigmatisation ainsi qu’une diminution de l’estime de soi» chez les enfants.

«Par ailleurs, certains parents d’enfants qui avaient des lentes (fréquemment mortes) ont été accusés à tort de négligence et des enfants ont été victimes de ségrégation.»

Les autorités de santé publique font d’ailleurs remarquer que «la majorité des personnes infestées sont contagieuses plusieurs semaines avant que le diagnostic ne soit établi».

Il n’est donc pas indiqué de retirer une personne infestée jusqu’au début de son traitement.

Fait à noter, à divers endroits dans le document, on laisse la porte ouverte à des aménagements et on s’en remet au bon sens des responsables des écoles.

Ainsi, il pourrait y avoir retrait d’une personne infectée, «avec discernement et pendant une courte période», dans des situations particulières telles qu’une infestation massive (des centaines de poux et des lentes vivantes) et persistante.

«Des mesures individualisées permettant de traiter une telle infestation tout en respectant la dignité et les droits fondamentaux de la personne atteinte devraient être mises en place», est-il aussi écrit.

Parce que les poux, ça arrive même dans les meilleures familles!

***

LES POUX EN QUATRE QUESTIONS :

– Les personnes aux cheveux longs sont-elles plus vulnérables?

On dit souvent que les personnes aux cheveux longs de même que celles aux cheveux bruns ou roux ont «des têtes à poux». Sans exclure cette possibilité, le ministère de la Santé relève que «le risque associé à ces caractéristiques soulève encore la controverse». Cependant, «les personnes à peau noire par rapport aux personnes à peau blanche semblent moins touchées par les poux».

– À quel âge est-on le plus à risque ? 

Tous les groupes d’âge sont touchés, mais le groupe des 3 à 11 ans est celui pour lequel le risque est le plus élevé, «avec un pic autour de 8-9 ans».

– Quelle est la période d’incubation?

On estime que la période d’incubation est de 7 à 12 jours. L’ennui, c’est que «l’infestation est souvent asymptomatique» et que l’apparition des symptômes survient après plusieurs semaines. Les enfants sont contagieux «jusqu’à l’élimination des poux et des lentes viables».

– Faut-il vaporiser toute la maison avec un insecticide?

Surtout pas. «Cette mesure est inefficace» et «peut représenter un risque important pour la santé des personnes et des animaux exposés à un produit potentiellement toxique». Inutile aussi de laver la maison au grand complet, mais les peignes et brosses doivent être trempés dans de l’eau chaude à environ 65 °C (150 °F) ou dans un produit contre les poux (non dilué) de 5 à 10 minutes. Les chapeaux, les casquettes et les vêtements doivent être séchés à l’air chaud pendant 20 minutes, nettoyés à sec ou entreposés dans un sac de plastique fermé hermétiquement pendant 10 jours. Et évidemment, il faut aussi s’attaquer aux draps et aux taies d’oreiller.

http://www.lapresse.ca/

Ne plus rire des gros


Avez-vous déjà remarqué quand on veut faire une satire sur la paresse, l’inaction, le mangeur d’aliments gras, on met des personnes obèses en scène. Il y a beaucoup de préjugés face au surpoids. Cela devient de la discrimination, qui n’aide en rien ces personnes. Cette discrimination se poursuit même pour la recherche d’emploi, face au médecin, etc. Ce texte est long, mais cela vaut la peine de le lire jusqu’au bout, pour changer notre attitude face à l’obésité
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Ne plus rire des gros

 

Fainéants. Pas intelligents. Sans volonté. Laids. Les obèses... (photo masterfile)

Fainéants. Pas intelligents. Sans volonté. Laids. Les obèses sont victimes de préjugés qui leur font mal.

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MARIE ALLARD
La Presse

Fainéants. Pas intelligents. Sans volonté. Laids. Les obèses sont victimes de préjugés qui leur font mal. Cette grossophobie est l’une des dernières discriminations tolérées ouvertement. Quand cessera-t-on de confondre lutte contre l’obésité et lutte contre les obèses?

À bas la grossophobie

«Même si je m’injecte du gâteau, il faut quand même que tu me traites comme un humain», dit Gabrielle Lisa Collard.

La jeune femme, qui ne s’injecte évidemment pas de gâteau, n’en peut plus que les gros (un terme qu’elle utilise) soient jugés. Stigmatisés. Considérés comme des citoyens de seconde zone.

«Les gens pensent que les gros sont moins intelligents, sales, lents», regrette la vive Montréalaise, auteure du blogue taille plus Dix octobre.

À Paris, Daria Marx se décrit aussi comme «une femme grosse» et «une militante féministe et anti-grossophobie». Grosso quoi? «

La grossophobie regroupe l’ensemble des discriminations faites aux personnes grosses», explique-t-elle.

Étymologiquement, la grossophobie est la peur des gros. Et la crainte d’être contaminé par «l’épidémie d’obésité» dénoncée par l’Organisation mondiale de la santé.

«Dans les sociétés occidentales postindustrielles, il existe une vision hyper individualiste qui valorise l’idée qu’une personne peut être en plein contrôle de son existence», avance Audrey Rousseau, candidate au doctorat en sociologie à l’Université d’Ottawa.

Le gros, supposé sans volonté, est incompatible avec le culte de la performance. Donc, indésirable. On confond lutte contre l’obésité et lutte contre les obèses.

Hausse de la discrimination

En 1995-1996, 7 % des adultes américains rapportaient avoir été victimes de discrimination liée au poids. En 2004-2006, ce taux avait grimpé à 12 %, selon le Yale Rudd Center for Food Policy & Obesity.

La discrimination en raison du poids «a maintenant une prévalence semblable à la discrimination raciale aux États-Unis», d’après une étude parue en 2010 dans l’American Journal of Public Health.

«Aujourd’hui, plus personne ne pense à faire une blague sur la couleur de la peau, l’orientation sexuelle ou la religion, mais on continue à faire des blagues sur les gros et les grosses», constate Julie Noreau, une ex-obèse.

Elle-même a souvent entendu des gens imiter le «Bip! Bip! Bip!» d’un camion qui recule quand elle faisait un pas en arrière.

«Pourquoi c’est accepté?», demande-t-elle.

«Vu que c’est de « notre faute » si on est gros, c’est encore fair game dans l’esprit des gens, croit Gabrielle Lisa Collard. Le commun des mortels pense qu’un gros est forcément responsable de son poids. Soit de l’avoir pris, soit de ne pas être capable de le perdre. Ce n’est pas si simple que ça. Mais les gens ne le savent pas. Ils ne savent pas que les régimes ne fonctionnent pas. Des gros, comme des gens pas gros, pensent comme ça. Ils se sentent super coupables s’ils perdent du poids et le regagnent. Pourtant, ça arrive dans 95 % des cas.»

À force de régimes, le métabolisme s’ajuste à la baisse et brûle de moins en moins de calories. C’est un cercle vicieux, méconnu des gens qui ont toujours été minces.

«Les préjugés envers les personnes en surpoids sont tellement internalisés qu’on ne se rend parfois pas compte qu’on en a, observe Andrée-Ann Dufour Bouchard, chef de projet chez ÉquiLibre, un organisme qui vient en aide aux personnes préoccupées par leur poids. Ça touche tout le monde: les jeunes, les adultes, les professionnels de la santé, les obèses eux-mêmes. C’est omniprésent.»

Et ça s’apprend tôt. À 11 mois, les bébés préfèrent regarder des photos de gens obèses plutôt que de poids normal. Mais dès 2 ans et 8 mois, c’est le contraire, selon une étude parue dans le Journal of Experimental Child Psychology en 2016. C’est corrélé aux préjugés anti-gros des mères: plus elles en ont, plus les enfants détournent le regard des obèses.

Effets négatifs

Et si les commentaires désagréables et les regards désobligeants aidaient les gros à enfin maigrir?

«Au contraire, c’est bien documenté que la stigmatisation est associée à plein d’impacts négatifs sur la santé physique et mentale», dit Andrée-Ann Dufour Bouchard.

Dépression, honte, arrêt du sport, isolement, régimes draconiens et troubles du comportement alimentaire s’ensuivent.

«Si la stigmatisation poussait les gens à « se prendre en mains », il y aurait moins de personnes en surpoids, fait valoir la nutritionniste d’ÉquiLibre. Ça n’a pas fonctionné du tout.»

En effet: le taux d’obésité est passé de 14 % à 18,2 % chez les adultes entre 2003 et 2013-2014, selon l’Institut de la statistique du Québec.

La solution? Mieux informer et éduquer.

«Il faut aussi arrêter de penser qu’être gros et être en santé, c’est mutuellement exclusif, martèle Gabrielle Lisa Collard. Tu peux être les deux.»

 Elle-même dit bien manger et faire du sport régulièrement.

«Non, j’suis pas faible, écrit-elle sur son blogue. T’essaieras pour le fun de faire 30 minutes de vinyasa yoga par jour avec l’équivalent en poids de Vin Diesel accroché à ton cul.»

Même constat chez Julie Noreau, qui a perdu du poids mais ne correspond pas «aux standards habituels» de minceur.

«Est-ce que je m’entraîne? Est-ce que je mange bien? Est-ce que je fais attention à moi? Oui, dit-elle. C’est ça, être en forme. Être en forme, ce n’est pas un chiffre sur une balance.»

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Étymologiquement, la grossophobie est la peur des gros. Et la crainte d’être contaminé par «l’épidémie d’obésité» dénoncée par l’Organisation mondiale de la santé.

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Lourdes conséquences

La discrimination basée sur le poids touche plusieurs sphères de la vie des personnes obèses. Quelques exemples.

Travail

Les femmes obèses rapportent huit fois plus souvent que les femmes de poids normal avoir été discriminées à l’embauche en raison de leur apparence physique, selon le 9e Baromètre du Défenseur des droits de la France et de l’Organisation internationale du travail, paru en 2016. Les hommes obèses? Trois fois plus souvent. Même pour être bénévole, il faut combattre les préjugés. Julie Noreau, une enseignante, s’est fait demander son poids quand elle a voulu se joindre à un organisme qui aide les enfants.

«Les responsables m’ont dit qu’ils cherchaient des personnes qui avaient de bonnes habitudes de vie, se souvient-elle. Ça m’avait complètement démolie.»

Santé

Près de 70 % des femmes en surpoids ou obèses ont vécu de la stigmatisation de la part de médecins, selon une étude citée par le Rudd Center for Food Policy & Obesity de l’Université Yale.

«Tu consultes parce que tu as mal à une épaule et tu te fais dire de perdre 40 livres, illustre Gabrielle Lisa Collard. Le reste de tes problèmes de santé est complètement ignoré.»

Sur le blogue Dix octobre, une jeune femme ronde raconte avoir consulté à 12 ans pour des douleurs à la jambe gauche. Par deux fois, un médecin lui a dit de faire de l’exercice et de perdre du poids. Diagnostic final? Elle avait une tumeur cancéreuse. C’est vrai, l’obésité – surtout viscérale – augmente le risque de développer plusieurs problèmes de santé. Mais il ne faut pas occulter le reste. Ni pousser les obèses à fuir les médecins.

Chirurgie bariatrique

Un obèse qui consulte un médecin pour une bronchite ou une otite peut se faire conseiller une… intervention chirurgicale bariatrique pour maigrir.

«La pression est folle, dit Gabrielle Lisa Collard. Je me suis fait offrir une chirurgie bariatrique plein de fois, même si je n’ai pas de problèmes de santé ni de mobilité. J’ai l’impression que dans 50 ans, collectivement, on ne va pas être super fiers d’avoir coupé des morceaux d’estomac aux gens au lieu de les encourager à s’aimer assez pour aller faire une marche, manger une poire et être heureux. Réduire la surface d’une personne, ça ne traite pas l’intérieur.»

Image

«Les photos utilisées pour illustrer des statistiques sur l’obésité, c’est toujours quelqu’un assis sur un divan ou mangeant un gros hamburger», dénonce Andrée-Ann Dufour Bouchard, de l’organisme ÉquiLibre.

L’image donnée des personnes en surpoids est rarement positive.

«La représentation des gros, c’est quelqu’un qui passe à travers une chaise, qui fait des bruits de pets ou qui braille dans un gâteau, regrette Gabrielle Lisa Collard. Forcément, t’es gros, t’es sale et tu manges du poulet frit dans un seau.»

Fainéants. Pas intelligents. Sans volonté.... (Photo fournie par l’éditeur) - image 3.0

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Gabrielle n’est pas née grosse

Septembre 2016. Dans une auberge de jeunesse de Paris, Gabrielle Deydier dort nue, une serviette autour du ventre. À deux heures du matin, une Américaine tire le rideau de son lit-cabine et pointe son téléphone sur elle, lampe de poche allumée.

«Biggie sur YouTube! hurle-t-elle. Biggie, biggie, biggie

La direction de l’auberge a mis l’Américaine dehors et surclassé Gabrielle Deydier, qui pèse 150 kg, dans une chambre individuelle. L’anecdote, suintant la haine, est racontée dans l’introduction d’On ne naît pas grosse, le livre qu’elle fait paraître le 15 juin aux Éditions Goutte d’Or.

On ne naît pas femme, on le devient, selon la thèse de Simone de Beauvoir. Les inégalités entre les hommes et les femmes sont culturellement construites, pas naturelles. De même, les gros ne naissent pas inférieurs, écrit Gabrielle Deydier, qui s’est lancée dans une double investigation, à la fois sur le rapport de la société avec la femme grosse et sur l’origine de sa propre obésité. Une enquête fouillée et troublante.

Erreur médicale

À 17 ans, Gabrielle Deydier pesait 65 kg. Sa mère la jugeant grosse, elle s’est rendue chez un nutritionniste endocrinologue, qui lui a diagnostiqué une maladie des glandes surrénales. Il lui a prescrit des hormones, des médicaments, un régime hypocalorique, des coupe-faim et des boissons diurétiques. Des furoncles sont apparus sur son visage. Le régime strict l’a poussée à vider les placards la nuit. Peu après Noël, la jeune Française pesait 120 kg et s’isolait. Son poids avait doublé en moins d’un an.

Ce n’est qu’à presque 24 ans que Gabrielle Deydier apprendra qu’elle ne souffre pas d’une maladie des glandes surrénales, mais d’ovaires micropolykystiques. Il lui faudra attendre bien plus longtemps avant d’avouer qu’elle alterne des phases de jeûne prolongé avec de l’hyperphagie, alors qu’elle absorbe de grandes quantités de nourriture sans se faire vomir.

«À aucun moment, je ne veux qu’on croie que je glorifie l’obésité, dit Gabrielle Deydier, jointe par téléphone à Paris. Mais il faut accepter les gens.»

Ce n’est pas toujours le cas. Les jeunes obèses en Suède, au Royaume-Uni et aux États-Unis sont payés 18 % de moins que les personnes de poids normal, selon l’étude Fat Doesn’t Pay, citée par l’auteure.

«Plusieurs fois, en entretien d’embauche, on m’a dit que je ne correspondais pas à l’image de dynamisme de l’entreprise. Les gens n’ont pas de filtre quand ils s’adressent aux gros. Et comme les personnes grosses ne se plaignent pas…»

Femmes sous bistouri

Plutôt que de se plaindre, les obèses subissent des interventions chirurgicales bariatriques, sans suivi suffisant. Cela revient à coudre les lèvres d’une personne qui n’arrive pas à arrêter de fumer, selon Gabrielle Deydier.

«Sur 10 personnes qui se font opérer, 8 sont des femmes, observe-t-elle. Alors que la proportion d’hommes et de femmes chez les obèses est quasiment équivalente.»

L’obésité ne fait qu’amplifier «les complexes que ressentent, en fait, presque toutes les femmes», analyse l’auteure.

Elle souhaite qu’on éduque les gens.

 «Comme on fait des campagnes contre le racisme, il faut expliquer que ce n’est pas en s’en prenant au petit gros dans la classe, au travail ou dans le métro qu’on va régler quoi que ce soit», fait-elle valoir.

«L’obésité, c’est une maladie qui peut avoir des conséquences dramatiques, convient Gabrielle Deydier. Mais est-ce que lutter contre l’obésité, c’est lutter contre les obèses? Il se trouve que moi, ma maladie se voit. Est-ce une raison pour que je ne sois pas socialisée?»

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On ne naît pas grosse. Gabrielle Deydier. Éditions Goutte d’Or.

Les croyances erronées à propos de l’obésité font mal, en contribuant à la stigmatisation des personnes en surpoids.

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Cinq mythes à combattre

Les croyances erronées à propos de l’obésité font mal, en contribuant à la stigmatisation des personnes en surpoids. Voici cinq mythes déconstruits par Jean-Philippe Chaput, professeur-chercheur en pédiatrie à l’Université d’Ottawa et au Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario.

Manger trop et ne pas bouger assez, voilà les causes de l’obésité

«L’obésité est une problématique vraiment complexe», dit Jean-Philippe Chaput.

De nombreux autres facteurs peuvent expliquer l’excès de poids: le manque de sommeil, le stress, les perturbateurs endocriniens, les troubles alimentaires, les médicaments, etc.

«Au congrès du Réseau canadien en obésité, à Banff en avril, des gens obèses ont dit avoir vécu beaucoup de problèmes de santé mentale, d’abus et de discrimination», illustre le chercheur.

Dans ces circonstances, trop manger et être inactif peuvent être des symptômes d’autres maux, plutôt que des causes.

Les gros ne sont pas en santé, les minces le sont

«On met trop l’accent sur le poids, qui est un indicateur de la santé parmi d’autres, note M. Chaput. Bien manger, bien dormir, gérer notre stress, bouger, réduire le temps passé devant un écran, ne pas fumer : tout cela fait en sorte qu’on est en bonne santé, sans égard à notre poids.»

«On pense que tous les obèses sont malades, mais environ un tiers des gens obèses sont en bonne santé, affirme le chercheur. Et environ un tiers des gens minces sont en mauvaise santé et devraient changer leurs comportements. Comme on se base toujours sur l’indice de masse corporelle (IMC), on surtraite les gens obèses et on sous-traite des gens minces. Le meilleur poids, c’est celui qu’on a avec les meilleures habitudes de vie possible.»

Les obèses sont paresseux

«Il y a une épidémie d’inactivité physique au Canada, rappelle M. Chaput. Tout le monde ne bouge pas assez, autant les minces que les personnes en surplus de poids.»

À peine 10 % des jeunes Canadiens font une heure d’activité physique d’intensité moyenne à vigoureuse par jour, comme recommandé.

Seuls de 15 % à 20 % des adultes font les 30 minutes par jour d’activité d’intensité moyenne à vigoureuse suggérées.

«Il n’y a pas de grosses différences selon le poids corporel», souligne M. Chaput.

La santé de bien des Canadiens – pas seulement des obèses – est menacée par cette inactivité.

Les régimes fonctionnent

«À peu près 95 % des gens qui font une diète reprennent le poids perdu», affirme M. Chaput. Ceux qui réussissent à maintenir leur perte de poids pendant cinq ans «se pèsent tous les jours, bougent 90 minutes par jour et restreignent leur alimentation au maximum», décrit le chercheur.

Perdre du poids à long terme est difficile, parce que le métabolisme diminue après un régime. Au repos, le corps brûle moins de calories qu’avant. Quant aux cellules graisseuses, elles envoient plus de signaux de faim au cerveau.

«C’est pour ça qu’il n’y a présentement pas de bon traitement pour l’obésité, souligne M. Chaput. Même avec la chirurgie bariatrique, on voit des regains de poids. Le meilleur traitement, c’est la prévention.»

La perte de poids n’a pas d’effets indésirables

Une importante perte de poids peut causer une rémission du diabète, soulager les articulations, améliorer l’estime de soi, etc.

«Mais ça entraîne aussi des effets secondaires», indique M. Chaput.

L’appétit augmente, le métabolisme diminue et la tendance vers l’hypoglycémie s’accentue. Des taux plus élevés de polluants organiques persistants se retrouvent dans le sang.

«On voit aussi beaucoup de dépressions chez les gens qui ont eu des chirurgies bariatriques», ajoute le chercheur.

Maigrir n’est pas une solution magique.

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Choisir le nom d’une maladie, un véritable casse-tête


Je comprends les raisons de l’OMS pour donner des directives lors de nommer une nouvelle maladie. Cependant, les choix me semblent restreints comme un des scientifiques le souligne dans l’article. Il devrait avoir moyen de trouver un juste-milieu pour qu’il n’y ait pas de conséquences économiques et sociales
Nuage

 

Choisir le nom d’une maladie, un véritable casse-tête

 

La dénomination d’une maladie devra désormais être composée de termes génériques descriptifs, fondés sur les symptômes qu’elle entraîne et de termes descriptifs plus spécifiques lorsque l’on possède des informations solides sur les manifestations de la maladie. © THOMAS LOHNES / DDP / ddp images/AFP

La dénomination d’une maladie devra désormais être composée de termes génériques descriptifs, fondés sur les symptômes qu’elle entraîne et de termes descriptifs plus spécifiques lorsque l’on possède des informations solides sur les manifestations de la maladie. © THOMAS LOHNES / DDP / ddp images/AFP

Par Lise Loumé

Les chercheurs sont prévenus : l’Organisation mondiale de la santé leur demande de donner aux maladies des noms compréhensibles qui ne stigmatisent personne.

INATTENDU. Partiriez-vous en vacances près de la rivière Ebola (en Afrique centrale) ? Ou à Marburg, en Allemagne, un nom qui rappelle lui aussi celui d’un virus dangereux provoquant une fièvre hémorragique ? Probablement pas.

« Le nom de certaines maladies infectieuses a des conséquences défavorables inattendues en stigmatisant certaines communautés ou secteurs économiques », vient de déclarer le Dr Keiji Fukuda, sous-directeur général en charge de la sécurité sanitaire à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

C’est pourquoi l’OMS vient de publier un guide de bonnes pratiques pour dénommer les maladies infectieuses.

Scientifiques, autorités nationales et médias devront désormais s’en inspirer « afin d’éviter autant que possible les conséquences néfastes inutiles », précise l’Organisation.

Quand le nom d’une maladie fait chuter le prix de l’immobilier…

Lieux géographiques (syndrome respiratoire du Moyen-Orient, grippe espagnole, fièvre de la vallée du Rift, etc.), noms de personnes (maladie de Creutzfeldt-Jakob, maladie de Chagas…), espèces animales ou aliments (grippe porcine, grippe du poulet etc.), sont couramment utilisés par les chercheurs pour nommer la maladie qu’ils viennent de découvrir. Des termes qu’il vaut mieux bannir, selon l’OMS, de même que ceux qui renvoient à des aspects culturels ou désignant des populations, des secteurs d’activité ou des métiers (comme celui de légionnaire) et ceux susceptibles de susciter des peurs inutiles (exemples : inconnu, fatal, épidémique).

RECOMMANDATIONS. La dénomination d’une maladie devra désormais être composée de termes génériques descriptifs, fondés sur les symptômes qu’elle entraîne (par exemple : maladie respiratoire, syndrome neurologique, diarrhée aqueuse) et de termes descriptifs plus spécifiques lorsque l’on possède des informations solides sur les manifestations de la maladie, les personnes concernées, la gravité ou la saisonnalité (par exemple : maladie évolutive, juvénile, sévère, hivernale). Si l’agent pathogène qui cause la maladie est connu, mieux vaut qu’il fasse partie de la dénomination (par exemple : coronavirus, virus grippal, salmonelle).

Pourquoi de telles recommandations ? L’OMS évoque à cela deux raisons. D’abord, et comme évoqué plus haut, un nom de maladie peut porter confusion. La grippe dite porcine, par exemple, ne se transmet pas par la viande de porc, pourtant certains pays ont interdit les importations de cette viande après l’épidémie de 2009. Jusqu’à ce que la communauté internationale adopte la désignation de « grippe H1N1 ». L’autre problème avec ces appellations, c’est qu’elles peuvent nuire au tourisme (ou à l’économie de la région). En 2012, certains pays arabes étaient ainsi mécontents qu’une nouvelle maladie causée par un coronavirus ait été surnommé « syndrome respiratoire du Moyen-Orient ». Ce problème de stigmatisation de lieux n’est pas récent, puisque le virus du Sida avait été surnommé à ses débuts maladie des 4H (pour Haïtien, Homosexuel, Hémophile et Héroïnomane). Et des chercheurs en ont déjà fait les frais par le passé. Linfa Wang, qui avait baptisé il y a vingt ans le virus qu’il venait de découvrir Hendra, du nom d’une banlieue de Brisbane en Australie, reçoit encore des appels de colère de résidents qui se plaignent que cela a fait chuter les prix de l’immobilier, rapporte la revueScience.

Les scientifiques partagés sur cette décision

Les recommandations de l’OMS divisent les scientifiques. Certains sont vivement opposés, à l’image de Christina Drosten, virologiste à l’université de Bonn, en Allemagne.

« Selon ces nouvelles règles, la maladie de Marburg aurait dû s’appeler « fièvre hémorragique de filovirus 1 » et Ebola « fièvre hémorragique de filovirus 2 », juge le chercheur dans la revueScience.

D’autres scientifiques en revanche, soutiennent au moins quelques recommandations formulées par l’OMS.

« Attribuer une maladie à un lieu est trop limitatif. Par exemple, l’épidémie d’Ebola s’est propagée bien plus loin que la rivière qui porte ce nom, précise à Sciences et Avenir le Pr Alain Goudeau, spécialiste de bactériologie-virologie au CHRU de Tours.De plus, dans plusieurs cas, le nom d’un premier malade a servi à baptiser l’affection, une décision regrettable qui était prise sans le consentement du patient ou de sa famille. »

Comment le nom d’une maladie est-il choisi ?

« De manière générale, le processus est le suivant : le découvreur choisit le nom de la maladie lorsqu’il publie une étude scientifique sur le sujet. Au fur et à mesure des publications sur le sujet, ce nom s’impose. Il est ensuite adopté (ou changé) lors de grands rassemblements de chercheurs, comme des colloques internationaux. Plus la maladie fera l’objet d’études ou sera mentionnée par les médias, et plus ce processus sera accéléré », décrit à Sciences et Avenir le Pr Alain Goudeau.

Le nom définitif de toute nouvelle maladie humaine est attribué par la Classification internationale des maladies (CIM), un système géré par l’OMS. La CIM est notamment utilisée par les médecins, les chercheurs, les décideurs, les assureurs et les associations de patients à travers le monde pour classifier les maladies et les autres problèmes de santé et les consigner de manière standardisée dans les dossiers médicaux et les certificats de décès.

http://www.sciencesetavenir.fr/