Un manifeste inspiré par l’Europe pour le statut des animaux ainsi donc le droit. Pour le moment au Québec, un animal est considéré comme un meuble, alors qu’en réalité, il ressent des émotions, et a des besoins pour vivre. Changer la loi envers les animaux pourraient, espérons-le, mieux les protéger et punir plus sévèrement ceux qui l’ont fait du tort
Nuage
Manifeste pour le droit des animaux

Ce manifeste a également été rédigé à partir de considérations en sciences et en éthique animale basées sur la déclaration de Cambridge sur la conscience du 7 juillet 2012, qui soutient qu’un grand nombre d’animaux peuvent ressentir des émotions, du plaisir et de la douleur.
PHOTO BARBARA LAPOINTE
STÉPHANIE VALLET
La Presse
Un manifeste revendiquant l’évolution du statut juridique des animaux dans le Code civil du Québec a été publié aujourd’hui sur le site lesanimauxnesontpasdeschoses.ca.
Le document appuyé par la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA) de Montréal a été signé par 57 personnalités des médias, des arts, des sciences et de la culture, dont Julie Snyder, Anne-France Goldwater, Jacques Languirand, Gilles Proulx, Laure Waridel et Michel Seymour.
Intitulé Les animaux ne sont pas des choses, le manifeste a été rédigé par Me Sophie Gaillard, avocate à la SPCA de Montréal, et Martin Gibert, chercheur en philosophie morale à l’Université McGill, avec la collaboration de la blogueuse et auteure en éthique alimentaire Élise Desaulniers. Ce document s’inspire notamment d’une initiative française similaire menée en octobre 2013 et dans le cadre de laquelle plusieurs intellectuels ont réclamé une évolution du statut juridique des animaux.
Une question d’éthique
«À l’heure actuelle, le Code civil du Québec considère les animaux comme des biens meubles, au même titre qu’une chaise ou un grille-pain, et notre droit assimile donc le fait de blesser ou de maltraiter un animal à la détérioration d’un bien, souligne Me Sophie Gaillard. Non seulement cette conception de l’animal est-elle moralement douteuse, mais nous croyons qu’elle ne correspond pas à ce que pense la majorité des Québécois.»
Ce manifeste a également été rédigé à partir de considérations en sciences et en éthique animale basées sur la déclaration de Cambridge sur la conscience du 7 juillet 2012, qui soutient qu’un grand nombre d’animaux peuvent ressentir des émotions, du plaisir et de la douleur. Les humains ne sont donc pas seuls à posséder les substrats neurologiques de la conscience.
«Maintenant qu’on sait ça, quel est le devoir moral de l’humain devant ça?», demande Martin Gibert, chercheur en philosophie morale à l’Université McGill et coauteur du manifeste. «Je crois beaucoup en l’idée d’un progrès moral de l’humanité. On a pénalisé l’esclavage, reconnu l’égalité homme-femme et les droits des minorités sexuelles. Je crois que la prochaine étape est de reconnaître les droits des animaux», affirme-t-il.
Si le manifeste revendique une réévaluation du statut juridique de l’animal, il ne suggère pas pour autant quelle forme ce nouveau statut devrait prendre. L’objectif des signataires est avant tout de souligner la nécessité d’un débat public en la matière.
Des modèles à suivre
«En Autriche, en Allemagne et en Suisse, les animaux sont considérés comme des êtres sensibles, à part entière, mais à des fins d’application de la loi, ils sont assujettis au régime de la propriété. Ainsi, en cas de divorce, la décision est prise par le juge en tenant compte des intérêts de l’animal», explique Me Sophie Gaillard, avocate à la SPCA.
À Ottawa en 2003, le projet de loi C-10B définissait l’animal comme «toute entité autre qu’un être humain capable de ressentir la douleur». La loi n’a cependant pas été adoptée au Sénat avant le déclenchement des élections.
Manifeste pour une évolution du statut juridique des animaux dans le Code civil du Québec
Comme la plupart des gens, nous pensons que les animaux ne sont pas des grille-pains. Pourtant, ce n’est pas l’avis de notre Code civil. En effet, du point de vue légal, un chien ou une vache ne diffère pas d’un grille-pain ou d’une chaise : ce sont des biens meubles. Le droit québécois assimile donc le fait de blesser ou de maltraiter un animal à la détérioration d’un bien. Force est de constater que cette conception est moralement douteuse et qu’elle ne correspond pas à ce que pense la majorité des Québécois.
Assimiler les animaux à des choses, c’est aussi ignorer l’état actuel des connaissances scientifiques. La capacité animale à ressentir la douleur fait aujourd’hui l’objet d’un large consensus, du moins en ce qui concerne les vertébrés. De façon générale, plus la recherche progresse, plus nous découvrons que les animaux ont des capacités cognitives et émotionnelles bien plus complexes que nous ne le pensions — et ceci vaut autant pour les singes, les dauphins ou les chiens que pour les vaches, les rats ou les pigeons.
Si les animaux ne sont pas des choses, c’est parce qu’ils ne sont pas des machines, mais des êtres sensibles dotés d’une vie qui leur importe. Il est donc légitime de tenir compte de leurs intérêts et de leur valeur morale lorsque nous prenons des décisions qui les concernent.
Nous sommes conscients que notre appel se heurte à certaines traditions, à la force de l’habitude et à l’idée que les animaux n’existeraient que pour servir nos intérêts. Mais nous croyons aussi que les mentalités ont évolué et qu’il serait temps d’entreprendre la réforme à la fois juste et légitime qui s’impose.
Notre province fait d’ailleurs particulièrement piètre figure en ce qui concerne la protection légale des animaux. Le Québec se classe en effet au dernier rang des provinces canadiennes en termes de législation relative au bien-être animal.
En 2014, il est devenu urgent de s’affranchir des catégories du Code civil et d’accorder aux animaux un statut distinct de celui des biens meubles, un statut qui prenne acte de leur capacité à ressentir du plaisir et de la douleur, bref, un statut d’être sensible.
Nicolas Basque, musicien (Plants and Animals)
Josée Blanchette, journaliste
Léa Clermont-Dion, journaliste et réalisatrice
Martine Delvaux, auteure et professeure de littérature (UQAM)
Élise Desaulniers, auteure
Alanna Devine, directrice, défense des animaux, SPCA de Montréal
Anne Dorval, comédienne
Jacques Godin, comédien
Me Anne-France Goldwater, avocate (Glodwater, Dubé)
Stevan Harnad, chaire de recherche du Canada en sciences cognitives (UQAM)
Jean-Thomas Jobin, humoriste
Georges Laraque, ex joueur de hockey et activiste
Claudia Larochelle, animatrice et auteure
Jacques Languirand, animateur, dramaturge et comédien
Nat Lauzon, animatrice radio
Franco Lepore, chaire de recherche du Canada en neurosciences cognitives (Université de Montréal)
Pascale Lévesque, journaliste
Marie Soleil Michon, animatrice
Joëlle Morin, comédienne
Christian Nadeau, professeur de philosophie (Université de Montréal)
Annie-Soleil Proteau, animatrice
Gilles Proulx, journaliste et animateur
Benoît Roberge, animateur et auteur
Michel Seymour, professeur de philosophie (Université de Montréal)
Julie Snyder, animatrice et productrice
Élise Turcotte, auteure
Patricia Tuslane, comédienne
Simon Tremblay Pepin, doctorant en science politique (Université York)
Julien Villeneuve, Anarchopanda
Daniel Weinstock, directeur du McGill Institute for Health and Social Policy
Laure Waridel, co-fondatrice d’Équiterre
Matthew Woodley, musicien (Plants and Animals)
Marc Zaffran/Martin Winckler, médecin et auteur
Et plusieurs autres signataires…
http://lesanimauxnesontpasdeschoses.ca./
http://www.lapresse.ca/