Je n’arrive pas à croire que des gens sont si ignorant et vont être adepte à ce qu’on appelle la conspiration géographique. Est-ce une blague ? Qu’est-ce qui est pire, qu’on croit que la Terre est plate ou que l’Australie n’existe pas ?
Nuage
L’Australie n’existe pas (et autres conspirations géographiques faciles)
Ce qu’ils appellent des «kangourous» | Mark Ralston / AFP
Repéré sur The Guardian
Repéré par Léa Polverini
On nous ment.
Les kangourous? Avec leur poche ventrale, leur allure de vélociraptor mignon et leurs grandes oreilles? Qui a sérieusement pu croire à leur existence? Et que leur pays soit, comme de par hasard, le seul au monde où l’on puisse retrouver des «bilbys» (ou «rats à long nez»), des «wombats» («à nez poilu») et des «kookaburras» (à gros bec) qui se bidonnent comme des tordus tout à la fois? Vous plaisantez? Australie pays de légende: l’Australie, ça n’existe pas.
Une invention des Britanniques
La théorie a émergé, une fois n’est pas coutume, sur Reddit, début 2017. Depuis, elle fait des retours épisodiques sur la toile, mettant en scène des affrontements entre conspirationnistes farouches qui défendent l’idée que le pays des koalas (et, au passage, d’une bagatelle de 24,13 millions d’habitants) est en vérité une invention de l’Angleterre lui ayant permis de tuer des centaines de milliers de prisonniers plutôt que de les envoyer dans «un pays à l’autre bout du globe», et Australiens fâchés d’être mis en doute dans leur existence même.
Aussi exceptionnelle que puisse sembler l’Australie (on y trouve aussi des ornithorynques), elle n’est pourtant pas la seule victime d’élucubrations géographico-complotistes éructées à tour de bras par de fins limiers autoproclamés.
La Finlande par exemple, fut en son temps –2015, Reddit encore– un terreau fertile pour théories saugrenues. Ce pays entre la Suède et la Russie? Rien de plus qu’une fiction conçue pour couvrir une colonie de pêche japonaise permettant l’exportation de sushis vers le Japon via le transsibérien, ce dernier ayant été construit spécialement pour cette route du poisson (la ligne a été ouverte en 1916, soit un an avant l’indépendance de la supposée Finlande: coïncidence?), et les sushis étant déguisés en cargaisons de «produits Nokia» (la plus grosse compagnie finlandaise, dont le Japon est aussi le plus gros importateur: coïncidence?).
Et puis, après tout, «aucun pays réel ne pourrait accorder autant d’importance prioritaire à l’éducation, aux soins de santé, à l’égalité des sexes, au taux d’alphabétisation, à la stabilité nationale, et être le gouvernement le moins corrompu au monde, avec une liberté de la presse. C’est un concept conçu pour que les pays et les gens y aspirent».
De la blague locale au mème intergalactique
Même chanson pour le Molise, cette charmante région de l’Italie du sud, ou encore l’Acre, dans la région Nord du Brésil, dont les blagues des locaux ont peu à peu donné naissance aux rumeurs les plus inspirées.
Le comique de répétition ne vieillit pas, puisque, comme le rappelle le Guardian, déjà en 1993, des utilisateurs allemands d’Usenet, un réseau de forums, faisaient tourner un canular qui a gagné ses lettres de noblesse sous l’appellation du «complot de Bielefeld». La ville industrielle de Rhénanie-du-Nord-Westphalie était supposée être une pure construction concertée de la CIA, du Mossad et, éventuellement, d’extraterrestres dirigés par un certain Ashtar Sheran aux longs cheveux blonds. Censé tourner en dérision la théorie du complot, le hoax est devenu national voire international, et a tranquillement traversé les décennies, jusqu’à Angela Merkel qui y faisait encore un clin d’œil en 2012.
«La beauté des memes est qu’ils sont malléables et que chacun peut avoir sa propre interprétation des choses et s’impliquer dans la blague, racontait l’écrivaine Mollie Goodfellow au Guardian. Je pense que cela dit que nous aimons tous faire partie de la blague, surtout en ligne, où souvent peuvent se former différentes cliques et sous-groupes.»
À l’ère des fake news, il s’agit toutefois d’être rigoureux: quoi qu’en disent les mauvaises langues, la promenade du Corso qui mène chaque soir les Termolesi jusqu’au castello svevo di Termoli (l’un de ces monuments dudit Molise) suffirait à elle seule à prouver l’existence de l’Italie tout entière, quand une petite brise rafraîchit la côte aux dernières heures d’une fin de journée encore à demi ensoleillée.
Quant à l’Australie…