Il fut un temps que les jouets pour enfants étaient vraiment étranges du moins pour notre époque. Est-ce que ces jouets qui contenant de l’uranium, radium en petite quantité étaient dangereux pour leur santé ? Il parait que non, mais bon.
Nuage
Du Radium en cadeau pour les enfants scientifiques
L’A.C. Gilbert Company, fondée en 1909 par un prestidigitateur professionnel, a obtenu un succès phénoménal avec les Erector Set (1911) — l’équivalent américain du Meccano britannique — mais aussi avec des coffrets de magie ou d’expérimentations scientifiques. LaPorter Chemical Company a inventé le concept de chimie amusante pour enfants avec ses coffrets commercialisés dès 1914.
Ces deux sociétés ont diffusé des millions de boites d’expérimentations scientifiques jusqu’aux années 1960, qui les ont vu être tout d’abord rachetés par d’autres fabricants de jouets puis disparaître, marquant la fin d’un âge d’or du jouet scientifique. L’un et l’autre éditeur affichaient comme ambition de préparer les enfants à devenir les savants du futur, ce qu’ils exprimaient dans des termes patriotiques :
« Porter Science prepares young america for world leadership » (Porter) —
« Today’s adventures in science will create tomorrow’s America » (Gilbert).
Parmi leurs nombreux coffrets, on remarque des jeux éducatifs dédiés à l’étude de l’énergie atomique :
le laboratoire d’énergie atomique Gilbert U-238 , jouet pour enfants produit entre 1950 et 1951. Parmi les objets fournis dans la boite, on trouve un compteur Geiger-Müller, un spinthariscope, un électroscope, une chambre à brouillard et quatre sources de radioactivité. La boite valait 50 dollars, ce qui constituait une grosse somme pour un jouet puisque cela correspond à environ 450 dollars actuels. Il s’est vendu peu de boites et le jeu est donc extrêmement rare à présent.
Les utilisations possibles du laboratoire Gilbert : mesurer la radioactivité avec l’electroscope, regarder la désintégration des matériaux radioactifs avec le spinthariscope et chercher de l’uranium à l’aide du compteur Geiger-Müller. Un manuel gouvernemental inclus dispensait des conseils aux jeunes prospecteurs d’uranium et promettait une prime de 10.000 dollars à ceux qui parviendraient à trouver un filon du précieux minerai, dont les États-Unis ont peu de gisements (le grand pays producteur est le canada) mais dont les besoins étaient très importants au début des années 1950.
Le compteur Geiger-Müller de marque Gilbert, que l’on pouvait acheter seul, produit aux alentours de 1950-1955
Porter Atomic Energy Lab (~ 1950). Le coffret contenait un spinthariscope, deux flacons contenants de l’uranium sous forme de minerai et sous forme « chimique » ainsi qu’un « radio-active screen », en fait un écran sur lequel a été déposé du radium.
Porter Chemistry and Atomic Energy Lab (~ 1950)
Les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki datent du mois d’août 1945. Les essais — très médiatisés — réalisés sur l’atoll de Bikini datent de l’année suivante. La première centrale énergétique nucléaire américaine date de 1951.
Ces jouets s’inscrivaient dans l’actualité directe de la recherche fondamentale dont le public découvrait la toute-puissance avec effroi et fascination. C’est un peu comme si l’on fournissait aux enfants de 2010 des jouets pédagogiques consacrés à la manipulation du génome ou aux nanotechnologies !
Les photographies proviennent du site de la Health Physics Historical Instrumentation Museum Collection et du compte FlickR de la Chemical Heritage Foundation. Voir aussi cet article.