Schizophrénie, dépression, bipolarité: des mots pas faciles à dire au travail


Si une personne sur deux aura au cours de sa vie, des problèmes de santé mentale, il n’est pas normal que ceux qui savent qu’ils ont une maladie chronique aient à cacher leur maladie pour se trouver un emploi.
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Schizophrénie, dépression, bipolarité: des mots pas faciles à dire au travail

 

«Déjà à ta propre femme, tu as tendance à ne pas lui dire, à cacher la prise de... (Photo Digital/Thinkstock)

Photo Digital/Thinkstock

Charlotte HILL
Agence France-Presse
PARIS

«Déjà à ta propre femme, tu as tendance à ne pas lui dire, à cacher la prise de médicaments. Alors, avec l’employeur…»,

Jean, 39 ans, bipolaire, résume la difficulté pour les personnes souffrant de troubles psychiques à trouver leur place au travail.

Selon une étude de l’OCDE, une personne sur deux souffrira de problèmes de santé mentale à un moment de sa vie.

Les troubles légers à modérés (dépression, anxiété…) sont très fréquents avec «à tout moment 15% de la population active concernée», tandis qu’environ 5% de la population souffre de troubles graves comme la schizophrénie ou la bipolarité (aussi appelé trouble maniaco-dépressif).

Les personnes les plus gravement atteintes ont six à sept fois plus de risque d’être au chômage que les autres.

La maladie s’associe de fait souvent à des trous dans le CV et parfois des traitements aux effets secondaires importants.

Mi-juin, environ 500 personnes défilaient à Paris dans le cadre de la première «Mad pride» pour le respect et la dignité de ces personnes.

Claude Deutsch, président du comité d’organisation et membre d’«Advocacy», association d’usagers des services de santé mentale, souligne auprès de l’AFP que le regard de la société est «essentiel».

«La prise de capacité est liée au regard qu’on porte sur vous (…) encore plus dans le monde du travail, qui est plus compétitif et sélectif», dit-il.

Le handicap psychique, bien que reconnu, reste «invisible», dit-il, citant le cas d’une amie «bardée de diplômes» qui, sollicitant les structures d’aides à l’emploi pour handicapés (Cap emploi), s’est vu répondre qu’«on ne pouvait pas s’occuper d’elle parce qu’elle avait trop d’habilité».

Sur les forums de discussion, comme Carenity (consacré aux maladies chroniques), certains bipolaires se demandent s’il faut en parler au travail.

«Je me suis mordue les doigts de l’avoir fait. J’ai été cataloguée  »dingue de service »», dit une internaute, résumant un sentiment partagé.

D’autres conseillent de prendre des congés pendant les crises, de multiplier les employeurs pour brouiller les pistes, ou de créer sa propre entreprise.

Jean (nom fictif) souligne qu’il y a «deux circuits»: s’identifier comme handicapé ou se cacher, estimant que «les gens ont plutôt tendance» à choisir la seconde solution, quitte à «faire leur coming-out» plus tard.

Après un bac scientifique à 17 ans, il a fait des études de biologie, puis réussi le concours d’infirmier. Mais, depuis, malgré des «petits boulots» (vendeur, vendanges), il n’a jamais vraiment eu d’emploi.

«La situation de l’emploi n’est pas bonne. Celle des travailleurs handicapés l’est encore moins», dit-il à l’AFP, rappelant que de «toutes façons, le plus important, c’est de se soigner».

Peur des employeurs

M. Deutsch souligne aussi que le travail peut «ne pas être l’objectif principal» des malades, parce qu’«aller bien, avoir une vie dans la cité, c’est déjà pas mal».

De fait, si l’entreprise peut aider, elle peut aussi déclencher la maladie.

Paul Cossé, président de l’association «Schizo? Oui! Faire face à la schizophrénie» est le père de deux schizophrènes: un homme de 46 ans et une fille de 39 ans.

Son fils a travaillé six mois à mi-temps chez EDF, où M. Cossé était médecin du travail, mais, dit-il, «ils ne l’ont pas gardé, ils ont eu peur» alors qu’«on me disait qu’il travaillait très bien».

«Il y a des schizophrènes qui travaillent, mais pas beaucoup, parce qu’ils s’arrêtent longtemps, ils ont des traitements, et la plupart n’ont pas fait d’études», dit-il.

Matthieu de Vilmorin, 54 ans, qui souffre de bouffées délirantes estime avoir eu «beaucoup de chance». Il a eu une vie professionnelle riche (chauffeur, coursier, libraire, formateur…) et écrit un livre («Fous et folles»).

«Je sais que j’ai une faiblesse. Mais j’ai fait de cette faiblesse une richesse», dit-il à l’AFP.

Pour M. Cossé, «beaucoup de malades pourraient travailler et le vrai problème, c’est l’insertion», car «très  peu de choses sont faites», comme des aménagements d’horaire.

Ce qui bloque?

«La peur des employeurs, de ne pas pouvoir licencier, d’avoir les syndicats sur le dos».

«De toute façon, dans tous les milieux du travail, il y a des handicapés psychiatriques, on en embauche obligatoirement, puisqu’il est impossible» de les diagnostiquer d’emblée, rappelle-t-il.

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Déficience intellectuelle: relever le défi de l’intégration


Je trouve vraiment bien ce genre d’initiative que des déficients intellectuels puissent se retrouver sur le marché du travail dans des domaines qu’ils se sentent bien et qu’ils puissent s’épanouir devant cette autonomie
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Déficience intellectuelle: relever le défi de l’intégration

 

Marie-Ève Lachance dit avoir toujours eu des relations... (PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE)

Marie-Ève Lachance dit avoir toujours eu des relations cordiales avec ses collègues.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

NATHALIE CÔTÉ

COLLABORATION SPÉCIALE

La Presse

Décrocher un boulot représente un défi pour les personnes ayant une déficience intellectuelle. Elles se heurtent à leurs propres limites, mais aussi à de nombreux préjugés. À l’occasion de la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, La Presse a rencontré une jeune employée bien intégrée dans son milieu de travail.

Depuis quatre ans, Marie-Ève Lachance met la main à la pâte dans la cuisine de Juliette et Chocolat. Pour la femme de 30 ans, ce boulot représente un passeport pour l’autonomie. C’est aussi une grande source de fierté. Lamia Hamici, sa gérante, lui a créé un poste sur mesure pour l’inclure dans l’équipe malgré sa déficience intellectuelle légère. Elle ne l’a jamais regretté.

«Le Centre action main-d’oeuvre m’avait parlé des possibilités de travail là-bas, raconte Mme Lachance. J’ai envoyé mon curriculum vitae sans mentionner ma déficience. Trois mois plus tard, j’ai passé une entrevue.»

Puis elle a décroché un emploi! Sa patronne s’attendait à recevoir des candidatures de personnes ayant une déficience intellectuelle. Elle était déjà en lien avec l’organisme.

«Nous sommes très ouverts d’esprit, note Mme Hamici. Dès que quelqu’un est motivé et disponible, nous sommes prêts à lui donner sa chance.»

Actuellement, une dizaine de travailleurs sont intégrés dans les différents établissements de l’entreprise.

Les avantages pour l’employeur

Marie-Ève Lachance prépare la pâte à crêpes et différents aliments pour la confection des repas. Cette tâche routinière lui plaît. Malgré ses quatre années d’expérience, elle est moins productive que ses collègues.

«C’est mon défi, confie-t-elle. Dès le début, je me suis donné des objectifs. J’étais vraiment motivée, je voulais réussir.»

Pour combler le manque à gagner, son employeur reçoit une subvention.

«C’est une mesure d’accommodement, explique Amélie Clément, coordonnatrice des services déficience intellectuelle et autisme chez Action main-d’oeuvre. Nous évaluons la performance de la personne en milieu de travail. Ensuite, nous établissons pour un taux représentatif de sa productivité.» Au fur et à mesure que l’employé s’améliore, la subvention diminue.

Le principal avantage pour les entreprises est la fidélité de ces employés différents. Ils affectionnent souvent les tâches simples et routinières, des postes ayant un fort taux de roulement. Plusieurs travaillent dans la restauration et l’entretien ménager. D’autres décrochent des postes de journaliers ou de commis de plancher dans les grands magasins.

«Elles sont réellement contentes de faire ce type de travail alors elles sont assidues et responsables», note Amélie Clément.

D’autres formes d’intégration

Cependant, certaines personnes préfèrent travailler dans des entreprises adaptées.

«Leurs collègues ont alors les mêmes préoccupations qu’elles», souligne Susie Navert, conseillère à la promotion et à la défense des droits à l’Institut québécois de la déficience intellectuelle et à l’Association du Québec pour l’intégration sociale.

D’autres participent à des stages non rémunérés.

«Pour quelques mois, ça peut être très bien, croit Susie Navert. Mais lorsqu’un stagiaire place les aliments sur les tablettes du supermarché depuis 5, 10 ou 15 ans, on a de la misère avec ça. Nous sommes à la recherche de solutions.»

Mais c’est complexe. Certaines personnes et leur famille sont parfois réticentes à abandonner ce modèle. Elles ont peur que les exigences de l’employeur augmentent trop si elles deviennent salariées. Elles craignent également de perdre le filet de sécurité que constitue l’aide sociale.

Marie-Ève Lachance comprend ces appréhensions, elle les a ressenties aussi. Mais aujourd’hui, elle semble prête à surmonter tous les obstacles dans sa quête d’autonomie. Actuellement, elle participe à différentes campagnes de financement pour construire des logements destinés aux personnes ayant une déficience intellectuelle. Elle espère quitter le nid familial pour y emménager d’ici la fin de l’année!

LA DÉFICIENCE INTELLECTUELLE AU QUÉBEC

> 66 000 Québécois avaient une déficience intellectuelle ou un trouble envahissant du développement en 2010-2011

> 37 % avaient une déficience légère

> 31 % avaient une déficience modérée

> 32 % avaient une déficience grave

Source : Institut de la statistique du Québec

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De plus en plus de baby-boomers à la rue


Les baby-boomers ont eu une belle époque a l’emploi avec ou sans diplôme. Mais les temps ont changé, les emplois sont de plus en plus incertains et ceux qui affichent 50 ans est plus ont plus de chance à se retrouver dans la rue
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De plus en plus de baby-boomers à la rue

 

L'étude qualitative réalisée par l'organisme PAS de la... (Photo: André Pichette, La Presse)

L’étude qualitative réalisée par l’organisme PAS de la rue à Montréal montre notamment du doigt le creux financier entre le moment de la perte d’emploi et l’âge d’admissibilité à la pension de vieillesse, à 65 ans (ou 67 avec la réforme du gouvernement Harper).

PHOTO: ANDRÉ PICHETTE, LA PRESSE

GABRIELLE DUCHAINE
La Presse

Inquiétude dans le milieu de l’itinérance: de plus en plus de personnes âgées se retrouvent à la rue parce qu’elles sont souvent seules ou ostracisées et que leur âge leur ferme pratiquement toutes les portes du marché du travail, révèle une étude obtenue par La Presse, qui sera publiée aujourd’hui.

«On remarque une surpopulation des personnes âgées dans la rue par rapport au reste de la société, explique Jean Gagné, de la TÉLUQ, expert des questions d’itinérance. Beaucoup arrivent dans la rue après l’âge de 50 ans parce qu’ils ont perdu leur logement ou leur travail, ou parce qu’ils ont des problèmes cognitifs, de démence ou d’alcoolisme. Ils n’ont pas été itinérants toute leur vie.»

L’étude qualitative réalisée par l’organisme PAS de la rue à Montréal, qui accueille des sans-abri et des gens très pauvres de plus de 55 ans, montre aussi du doigt le creux financier entre le moment de la perte d’emploi et l’âge d’admissibilité à la pension de vieillesse, à 65 ans (ou 67 avec la réforme du gouvernement Harper).

 «Déqualifiés du milieu de travail, sans économies ou sans assurances et seuls, les revenus d’aide sociale représentent pour les 55-64 ans la source de revenu ultime», lit-on dans le document. Ce n’est pas suffisant.

Selon la professeure Lucie Gélineau, experte des questions de pauvreté, une personne seule a besoin de 13 000$ par année pour vivre décemment. La somme moyenne reçue de l’aide sociale est d’environ 700$ par mois. Certains reçoivent aussi peu que 400$.

Une augmentation marquée

Des chiffres tirés d’une autre étude, menée actuellement sur le même enjeu par le chercheur Jean Gagné, révèlent que 38% des baby-boomers atteignent aujourd’hui la retraite dans un état de grande précarité, contre 10% en 2001-2002. Au PAS de la rue, la clientèle a bondi de 51% en deux ans. Plus de la moitié des gens qui fréquentent l’organisme ont de 55 à 65 ans.

Ces gens, surtout des hommes, choisissent parfois consciemment de passer la nuit dans les refuges, où ils ont accès à de la nourriture, des vêtements et des toilettes, selon l’étude. D’autres n’ont d’autre choix que de faire la tournée des soupes populaires.

Plus fragiles

«Comme ils sont plus fragiles et qu’ils ne sont pas des habitués de ce milieu, ils sont victimes d’abus dans les refuges. Ils sont plus faciles à victimiser, parce qu’ils ne connaissent pas la rue», explique Jean Gagné.

Si le phénomène est difficile à chiffrer, il s’aggrave, observent plusieurs intervenants du milieu, qui tiendront un point de presse ce matin pour lancer un appel à l’aide.

«La situation est inquiétante, et des changements politiques, sociaux et structurels devront se faire pour prévenir cette situation», martèle Sébastien Payeur, directeur de PAS de la rue.

Comme pistes de solution, l’étude de son organisme propose notamment d’assurer un meilleur revenu aux gens âgés, d’améliorer leurs conditions de travail et leur sécurité d’emploi, de favoriser l’accès au logement social pour les personnes de 55 ans sans problèmes lourds, mais présentant de très faibles revenus, et de mettre sur pied une ressource pivot destinée à ce groupe d’âge afin de les aider à s’en sortir.

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