Héroïnes De Guerre


Novembre est le mois ou l’on se souvient de nos morts du moins en Occident, on souligne le départ de nos êtres chers et ceux qui ont combattus a la guerre et y sont mort .. mais les victimes de la guerres qui sont mutilés, violés, abandonnés, orphelins et en subissent encore des séquelles car eux vivent encore ne peut-on pas souligner leur courage d’affronté la vie ? Prendre conscience des malheurs que vivent ces gens dont les femmes qui ont encore moins de ressources parce qu’elles sont des femmes ne nous montre pas qu’a coté d’elles nos problèmes ne sont qu’illusoires .. ?
Nuage

Héroïnes De Guerre

Entrevue - Héroïnes De Guerre

«Ce matin, nous n’avions rien à manger, alors nous avons mangé de l’herbe», explique Mah Bibi, chef de famille à 10 ans. (Afghanistan)

© Photo courtoisie Nick Danziger

Isabelle Maher
Le Journal de Montréal

Parfois violées ou mutilées, elles perdent tout, mais continuent de nourrir et protéger leurs enfants. En temps de guerre, parmi les civils, les femmes sont les plus vulnérables. Leur histoire passionne le photographe Nick Danzigner, qui raconte en images, dans un livre coup-de-poing, le drame de celles à qui on n’accorde jamais la parole.

Les enjeux politiques des conflits, les chefs d’État et les soldats n’intéressent pas Nick Danziger. Ce qui fascine ce photographe aventurier, inspiré de son héros Tintin, c’est la vie quotidienne des gens ordinaires dans les zones de guerre. Dans son dernier ouvrage, Onze femmes face à la guerre, celui qui parcourt le monde depuis l’âge de 13 ans a braqué son objectif sur les femmes, ces véritables héroïnes de guerre, tranche-t-il.

Nous avons rencontré Nick Danziger lors de son passage à Montréal.

. Vous êtes retourné voir dix ans plus tard ce que sont devenues ces femmes que vous aviez photographiées. Sur la page couverture de votre livre, on voit cette fillette orpheline afghane qui s’occupait seule de ses deux jeunes frères. Où en est-elle maintenant ?

Elle s’appelait Mah Bibi et elle avait 10 ans. À son âge et chef de famille en Afghanistan, je doutais qu’elle survive. On me dit qu’elle est décédée, il y a cinq ans, peut être en accouchant. Mais je continue de la chercher. J’aime prendre des nouvelles de ces gens. Je travaille comme ça, depuis 1984. Le plus important est de leur donner la parole, créer des liens et de passer du temps avec eux.

. Vos images les plus choquantes sont celles d’une enfant de 13 ans à qui on a coupé les mains pour l’empêcher de voter au Sierra Leone. Qu’est-elle devenue ?

À 13 ans, elle ne savait même pas ce qu’était un président. Quand les rebelles sont venus lui couper les mains, elle les a suppliés de la tuer, ils ne l’ont pas écoutée. De la folie. Elle s’appelle Mariatu, et elle vit maintenant heureuse à Toronto. Elle me donne des nouvelles par Skype. Elle a une vie normale, elle cuisine, étudie et se maquille… sans ses mains.

. D’où est venue cette idée de vous intéresser aux femmes dans les pays en conflit ?

On voulait savoir de quoi les femmes avaient besoin en temps de guerre, c’était d’abord une commande du Comité international de la Croix-Rouge, en 2001, puis c’est devenu un livre.

. Et de quoi ont-elles besoin ?

Dans les conflits, 90 % des personnes affectées sont des civils, c’est eux qui m’intéressent, pas les combattants. Les femmes sont particulièrement vulnérables. Pour elles, la guerre ne finit jamais, elles ont des flashbacks, elles subissent des violences sexuelles ou ne peuvent faire leur deuil parce que les corps de leur mari ou de leurs enfants ne sont pas retrouvés. Celles qui sont violées sont stigmatisées et exclues de leur communauté et de leur famille. La société refuse de les voir comme des victimes.

. Il faut donc mieux protéger les femmes ?

Absolument. Elles ont besoin de protection dans les conflits, les lois qui les protègent ne sont pas respectées. On doit faire plus dans l’après-guerre pour les aider, souvent elles n’ont pas d’aide psychologique, ni même accès à leur maison parce que les titres sont au nom du mari. En Serbie, Olja est critiquée parce qu’elle veut refaire sa vie et ne s’habille pas en noir. Pourtant, elle souffre au quotidien.

. Vous dites que ce livre est un hommage aux femmes.

Oui, parce qu’elles ont une force inouïe. Ce sont elles, les vrais héros. Nous avons beaucoup à apprendre d’elles. Ces femmes sont beaucoup plus intéressantes pour moi que les hommes politiques.

. Que pensez-vous de la couverture des conflits internationaux par les grands médias d’information.

Ça me frustre. On affiche le nombre de morts et de blessés. Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Les gens sont devenus des experts, ils sont passifs, ils reçoivent tout et ils commentent. Mais si c’était votre mère, votre fille, votre soeur qui vivait en zone de guerre, diriez-vous la même chose ? Ces femmes n’ont pas eu le choix de se retrouver là. On ne leur demande jamais leur avis, aux femmes, et on ne les écoute pas. Pensez-vous qu’une seule femme en Afghanistan souhaite le retrait des soldats occidentaux pour revenir au régime taliban ? C’est leur garantie de sécurité pour l’avenir.

. Vous avez adopté trois enfants afghans, dans quel contexte ?

À 10 et 11 ans, mes filles ne savaient ni lire, ni écrire. Mon fils de 10 ans n’avait jamais vu une école de sa vie. J’ai demandé à tout le monde de les aider, personne ne voulait d’eux. Les adopter n’était pas un choix, je devais le faire même si j’étais père célibataire, j’aurais regretté de ne pas l’avoir fait.

. La plupart des gens ont l’impression d’être impuissants face aux conflits.

Là-bas avec très peu on peut faire énormément de choses. On est allé trop loin dans l’autre direction et personne ne fait plus rien.

. Laquelle de ces onze femmes vous a le plus marqué ?

Mariatu et Mah Bibi parce qu’elles étaient très jeunes. Je me demandais ce qu’elles allaient devenir. Mais il y a Amanda, Olja, Sarah, Dzida… Elles sont toutes mes héroïnes.


11 Femmes en zones de conflit

Kosovo

1999, année tragique pour la minorité serbe chassée par la majorité albanaise.

Sierre Leone

La guerre civile, entre 1991 et 2002, avait comme principal enjeu le contrôle des zones de diamants.

Bosnie-Herzégovine

1992, attaque de l’armée yougoslave contre la Bosnie qui vient de déclarer son indépendance. Parmi les nombreux massacres, celui de Srebrenica, en juillet 1995.

Colombie

Un conflit interne, depuis les années 1960, oppose les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et l’Armée de libération nationale (ELN).

Israël

Ce conflit débute, le 14 mai 1948, jour de la création de l’État d’Israël. Il oppose les Palestiniens et l’État d’Israël.

Afghanistan

Ce territoire marqué par les guerres, depuis plus de trois décennies, est occupé par les Occidentaux depuis les attentats de septembre 2001, pour lutter contre le terrorisme et le régime taliban.

Cisjordanie

Région du Proche-Orient qui constitue, depuis 1967, un enjeu du conflit israélo-palestinien.

Gaza

De nombreux Palestiniens ont trouvé refuge à Gaza, devenue la cible des attaques sanglantes, menées par les forces d’occupation israélienne, contre la population civile.


Onze femmes face à la guerre. Photos de Nick Danziger, textes Frédéric Joli. Publié aux Éditions du Passage

Nick Danziger a notamment collaboré avec Time, Newsweek, Vanity Fair, Paris Match, Le Monde et Le Figaro. En 2004, on lui décerne le World Press Award pour son reportage sur George Bush et Tony Blair lors du déclenchement du conflit en Irak, en avril 2003.

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