Pourquoi des élections mi-mandat aux États-Unis, je ne comprends rien de rien, mais bon, on ne peut qu’être heureux pour les Américains que les démocrates puissent prendre le contrôle du Congrès Américain. Mais ce qui doit être plus énervant pour Donald Trump, c’est que parmi les députés élues, il y a deux musulmanes, deux femmes dont une en plus est une personne de couleur puisse entrer fièrement en politique au Congrès.
Nuage
Élections au Congrès américain: femme, réfugiée, voilée, musulmane et élue
Ilhan Omar juste après sa victoire dans le Minnesota, le 6 novembre 2018 | Tephen Maturen / Getty images North America / AFP
Aymann Ismail
Ilhan Omar a commencé son discours de victoire en disant «salam aleykoum.» Et c’est plus qu’un symbole.
Lorsqu’Ilhan Omar, nouvelle élue du Minnesota à la chambre des représentants, est montée sur scène ce mardi soir en tant qu’une des deux premières femmes musulmanes à accéder au Congrès américain –l’autre, Rashida Tlaib, est devenue représentante du Michigan– elle a commencé par lancer: «Salam aleykoum» [que la paix soit sur vous]. Puis: «Al hamdulilah» [loué soit Allah]. Je suis transporté de joie. Je ne m’attendais pas du tout à un discours de victoire comme ça. Dans un contexte récemment qualifié «d’élections les plus islamophobes de l’histoire», le simple fait d’entendre les salutations musulmanes de base sur une scène a un goût concret de réussite.
Dans son discours, la future députée Ilhan Omar –qui a écrasé son adversaire à plate couture lors de la course pour le siège de Keith Ellison, lui-même le premier homme musulman élu au Congrès américain– a décrit une Amérique que moi aussi, j’ai reconnue. Elle ne s’est pas retenue d’émettre des critiques.
Elle a dit que les immigrants qui venaient en Amérique en quête d’une vie meilleure «rencontrent trop souvent l’intolérance et la haine.» Les Amérindiens, a-t-elle souligné, «vivent dans des tentes comme des réfugiés sur leurs propres terres».
Le public l’a acclamée, ravi d’entendre, pour une fois, une politicienne évoquer des sujets essentiels sans se chercher d’excuses.
Elle s’est présentée, a-t-elle affirmé, parce qu’elle «ne pouvai[t] pas rester sur le banc de touche à regarder ces promesses ne pas être tenues».
De nombreuses personnes musulmanes, certaines pour la première fois, vont désormais avoir l’impression d’être vraiment représentées dans notre gouvernement.
Un rejet brutal de l’islamophobie
L’élue, visiblement émue, debout devant des militants exubérants lors d’un rassemblement à la simplicité charmante, a clairement marqué le coup.
«Je me tiens devant vous ce soir» a-t-elle déclaré, «en tant que votre députée élue au Congrès, toute une série de premières fois accolée à mon nom.» Tandis que ses yeux se mettaient à briller, elle a poursuivi: «La première femme de couleur à représenter notre État au Congrès. La première femme à porter un hijab. La première réfugiée à être élue au Congrès. Et une des premières musulmanes à être élues au Congrès.»
Ces réussites ne sont pas que symboliques. En tant que fils d’immigrants musulmans, cela fait des années qu’à chaque fois que je vote pour un candidat national, en réalité j’ai plutôt l’impression de m’exprimer contre celui ou celle qui à mon avis est le ou la plus susceptible d’attiser la haine contre les Américains comme moi. Dans Ilhan Omar, je vois une députée qui non seulement a la même vision du monde que moi, mais dont la seule présence va rappeler au Congrès que moi aussi, je suis américain, comme tous les autres citoyens musulmans de ce pays. La présence d’une réfugiée voilée va rendre d’autant plus difficile à ses collègues de céder à la tentation d’ignorer son vécu ou de prétendre que les gens comme elle n’existent pas.
Ilhan Omar et Rashida Tlaib, sa nouvelle collègue au Congrès, représentent les éléments qui ont le mieux réussi dans une nouvelle vague de candidatures musulmanes dont un nombre record a intégré des courses électorales pour combattre l’intolérance religieuse en voie de généralisation. Leur victoire est un rejet brutal de l’islamophobie qui domine notre politique depuis le début de ma vie adulte. Dans son discours, Ilhan Omar a dit:
«Mon grand-père m’a appris que lorsque l’on voyait une injustice, il fallait la combattre.»
Dans une telle élection, il n’y avait vraiment pas de moyen plus puissant de le faire qu’en commençant un discours de victoire par «salam aleykoum».