Quand les ordures des uns font les repas des autres


Un endroit où il y a beaucoup de gaspillage alimentaire, c’est bien dans les restaurants. Ce chef cuisinier et restaurateur agit de façon très responsable d’offrir au plus démunis des repas gratuits avec une alimentation équilibrée et qui a semble-t-il à meilleur goût que les soupes populaires.
Nuage

 

Quand les ordures des uns font les repas des autres

 

Le chef Jagger Gordon attire les passants devant son stand de nourriture, près du centre-ville de Toronto.

Le chef Jagger Gordon attire les passants devant son stand de nourriture, près du centre-ville de Toronto.   Photo : Christian Noël

Un restaurateur torontois lutte contre le gaspillage alimentaire, un repas gratuit à la fois. Le chef Jagger Gordon récupère des aliments destinés aux poubelles par les grandes chaînes et prépare des repas gratuits pour les plus démunis.

Un texte de Christian Noël

« Avez-vous faim? Venez, venez, c’est gratuit! » Le chef Jagger Gordon attire les passants devant son stand de nourriture, près du centre-ville de Toronto. Stephany Grieve s’arrête pour commander un sandwich au salami.

Je n’ai plus d’argent jusqu’à la fin du mois. Mais ici, je peux manger gratuitement. Stephany Grieve

« C’est délicieux dit-elle, c’est mon troisième sandwich cette semaine. »

C’est meilleur que les autres soupes populaires qui offrent aussi de la nourriture gratuitement parce que c’est frais et fait juste pour moi, dit-elle.

Les ordures des uns…

Le restaurant Soup Bar du chef Gordon n’est pas encore officiellement ouvert, mais déjà, des dizaines de personnes viennent s’approvisionner à son comptoir de rue. Gratuitement.

Stephany Grieve profite d'un repas gratuit au Soup Bar pour l'aider à joindre les deux bouts.

Stephany Grieve profite d’un repas gratuit au Soup Bar pour l’aider à joindre les deux bouts.   Photo : Radio-Canada

Ses clients (ils les appellent ses « invités ») viennent de toutes les couches de la société. Des assistés sociaux, des étudiants, des femmes monoparentales, des personnes âgées, des travailleurs qui peinent à joindre les deux bouts.

Au menu, des sandwichs, et bientôt, de la soupe. Tous les repas sont préparés avec des ingrédients « recyclés ».

Le pain, la viande, le fromage à la crème, tous les ingrédients utilisés sont passés à deux doigts de se retrouver aux poubelles. Chef Jagger Gordon

Il convoite les fruits et légumes meurtris ou imparfaits et des produits qui approchent de leur date de péremption. Le chef conserve les morceaux de choix afin de préparer des repas nutritifs et équilibrés.

Dans sa sélection d’ingrédients cette journée-là : du capicollo mal tranché, d’une épaisseur inégale; des sachets de biscuits mal emballés; et du fromage à la crème végétalien qui n’expire que dans 10 jours.

Le chef Jagger Gordon

Le chef Jagger Gordon   Photo : Radio-Canada

« Les grandes chaînes se débarrassent de ce type d’aliments, afin de libérer l’espace sur les tablettes ou dans leurs entrepôts pour des produits plus frais. Je les achète à bas prix, parfois 10 fois moins cher. »

Il recueille ainsi de 100 à 200 kilogrammes de nourriture par jour, « assez pour nourrir une centaine de familles ».

Donner au suivant

Le modèle d’affaires survit grâce au système de paiement que le chef Gordon a mis en place.

« C’est une approche communautaire », explique-t-il.

Le client qui a les moyens de payer donne un montant d’argent de son choix. Pour chaque tranche de 2,50 $, il reçoit un jeton, qu’il glisse ensuite dans un bocal sur le comptoir.

Les clients du Soup Bar peuvent laisser un montant d'argent de leur choix ou acheter leur repas à l'aide d'un jeton payé par quelqu'un d'autre.

Les clients du Soup Bar peuvent laisser un montant d’argent de leur choix ou acheter leur repas à l’aide d’un jeton payé par quelqu’un d’autre.  Photo : Christian Noël

Si le prochain client n’a pas d’argent, il peut payer son repas à l’aide d’un de ces jetons. C’est une façon de donner au suivant. Chef Jagger Gordon

C’est une initiative « merveilleuse » aux yeux de Jennifer Hind, une étudiante de niveau collégial.

« Nous avons tellement de gens à Toronto qui se nourrissent mal ou pas du tout, faute d’argent. C’est une véritable crise. » L’initiative du chef Gordon, selon elle, redonne une certaine dignité aux gens affamés.

Et en plus, la nourriture est excellente, ajoute Jennifer. « La viande est fraîche, le pain goûte comme tout droit sorti de la boulangerie. On ne peut pas demander mieux. »

Des milliards de dollars de gaspillage

Pendant que le chef Gordon sert ses « invités », un camion d’une grande boulangerie industrielle de l’Ontario (qui préfère rester anonyme) s’arrête pour effectuer une livraison. Près d’une centaine de petits pains, de baguettes et de focaccias se retrouvent sur la table du restaurant.

Tout ce pain allait se retrouver aux ordures d’ici la fin de la journée Chauffeur de la boulangerie

Photo : Christian Noel

« Nous offrons du pain frais du jour aux restaurants et aux hôtels de Toronto poursuit le chauffeur. À la fin de la journée, il faut se débarrasser des restants pour préparer la commande du lendemain. »

Du gaspillage de nourriture qui atteint une ampleur sans précédent au Canada, selon une étude de VCM International, une firme de consultants dans le domaine de la restauration.

En 2010, 27 milliards de dollars de nourriture se sont retrouvés aux dépotoirs. En 2014, c’était 31 milliards de dollars. Dans les restaurants, les épiceries, les hôtels, mais surtout, à la maison.

Le Canada, selon le chef Gordon, devrait s’inspirer de la France, qui a adopté une loi l’an dernier afin de réduire le gaspillage alimentaire, dans les secteurs de la restauration et du commerce de détail.

Je lance un défi au premier ministre Trudeau de s’attaquer au gaspillage alimentaire. Chef Jagger Gordon

« Un projet comme le mien offre une solution symbolique », concède le chef Jagger.

Mais il espère sensibiliser les Canadiens à faire leur part, afin d’éliminer le gaspillage tout en nourrissant les plus démunis.

http://ici.radio-canada.ca/

L’histoire banale de trois chaudrons


Est-ce que la politesse se perd ? Je pense que non, mais quand même, le savoir vivre, la politesse peut être souvent oubliée. Ce petit exemple en est un parmi tant d’autres.
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L’histoire banale de trois chaudrons

 

Par Andrée-Anne Guénette

Je me considère choyée par la vie. Mes enfants mangent à leur faim et dorment dans un lit propre dans une maison convenablement chauffée l’hiver.

Ainsi, quand j’ai des items dont je n’ai plus besoin, je choisis normalement de les donner au suivant plutôt que de les vendre. Je considère que c’est le juste retour du balancier. Il y a une expression que je cite souvent (et je viens d’apprendre que c’est un passage biblique!) qui dit: On demandera beaucoup à qui l’on a beaucoup donné. On m’a beaucoup donné, alors normal que j’aide mon prochain si j’en suis capable.

Mais vous dire combien ça peut être souffrant de donner! Ça m’est arrivé pas plus tard qu’hier. Au bout de 16 ans de bons et loyaux services, mes chaudrons ne suffisaient plus à la tâche. Mais ils sont encore en état de travailler longtemps, alors je voulais qu’ils puissent continuer leur vie utile ailleurs.

Je poste sur un site populaire, avec photo, description, et tout. Et rapidement, je commence à recevoir des messages. J’en ai reçu une bonne trentaine en 36 heures.

Je ne sais pas si c’est juste moi, mais me semble que si quelqu’un t’offre quelque chose de gratuit, en l’occurrence trois chaudrons qui coûteraient assez cher au neuf, tu fais preuve d’un minimum de savoir-vivre dans ton message. Les « mots magiques » qu’on enseigne à nos enfants: s’il-te-plaît, merci, c’est pas bien compliqué, non?

Voici quelques réponses reçues:

« adresse svp »

« je passe à 17hrs »

« moi stp. ton numéro c quoi »

« Je peux passer demain quel heure »

« interet »

Et mon préféré, ce message, reçu environ 12 heures après son premier signe d’intérêt:

« Merde moi je t envoi courriel tu m répond pas.    Merci pareille au revoir « 

Calmez-vous, madame.

J’en ai reçu des bien corrects, des gentils même avec gratitude bien indiquée. Parmi ceux-là, j’ai choisi une heureuse élue. En principe, on se donne rendez-vous, tu passes chercher, tu dis merci, tout le monde est content (sauf la dernière madame qui, elle, est vraiment en ta…) et alléluia.

Mais souvent, c’est juste le début d’une longue valse du Ok, vous pouvez passer aujourd’hui? Non, pas aujourd’hui, je travaille jusqu’en soirée. Ah, désolée, je n’ai pas eu le message/j’ai eu un contre-temps/mon char partait plus/je pars de Joliette alors c’est compliqué. Je peux/mon frère peut/mes parents peuvent passer demain… et qui ne se présentent jamais.

Sérieux, le moindre que tu puisses faire quand quelqu’un te donne quelque chose de bon coeur, c’est de se présenter au rendez-vous. Sourire. Et dire merci.

C’est tout et c’est déjà beaucoup.

p.s. mes chaudrons ont trouvé une nouvelle maison où j’espère qu’ils seront encore longtemps utiles.

http://www.coupdepouce.com/