Prosélytisme dans les hôpitaux et les CHSLD: «Il faut que ça cesse»


Il est normal que des personnes puissent être présentes chez des patients qui demandent une assistance religieuse. Cependant, les abus sont inacceptables. Il est important que des règles soient clairement établies dans ce domaine, malheureusement, il y aura toujours des excès de zèle de certains illuminés qui visent les personnes les plus vulnérables. Imaginez parler de démon à des patients en psychiatrie, ou de guérison miraculeuse à une personne souffrant de maladie difficile ou incurable. Cela peut créer des conséquences aux soins.
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Prosélytisme dans les hôpitaux et les CHSLD: «Il faut que ça cesse»

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

La ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais

Le gouvernement Legault dénonce des dérives « inacceptables » dans le système de santé lorsque des patients vulnérables vivent des « abus spirituels » et sont livrés à des individus qui leur parlent du démon et de supposées guérisons miraculeuses.

HUGO PILON-LAROSE
LA PRESSE

MATHIEU PERREAULT
LA PRESSE

La ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais, en avait le souffle coupé.

« Il faut que ça cesse », a-t-elle tonné, ce week-end, à la lecture d’une enquête de La Presse sur des individus aux « théologies toxiques » qui infiltrent le réseau public de la santé. Elle a immédiatement saisi le sous-ministre à la santé de l’enjeu.

Une majorité « de personnes hébergées en CHSLD sont atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de troubles cognitifs majeurs. On ne va pas commencer à supporter des dérives religieuses de cette nature. Ça n’a pas de sens », a affirmé Mme Blais hier.

La ministre de la Santé et des Services sociaux, Danielle McCann, a pour sa part exprimé son « extrême » préoccupation.

« Les personnes hospitalisées et les personnes vivant en CHSLD ont droit à un environnement serein, paisible et exempt de toute dérive religieuse. Les situations rapportées dans l’article sont inacceptables. » Danielle McCann, ministre de la Santé et des Services sociaux

La Presse a révélé samedi que l’Association des intervenants et intervenantes en soins spirituels du Québec (AIISSQ) talonne le gouvernement du Québec pour qu’il révise les exigences requises pour faire de l’intervention spirituelle auprès des patients du réseau public de la santé.

« Des groupes fondamentalistes aux théologies toxiques » s’infiltrent et commettent des abus spirituels, dénonce un courriel de l’AIISSQ envoyé le 8 août au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

Dans son reportage, La Presse a révélé qu’une « prophétesse » avait notamment distribué sa carte dans une aile de soins psychiatriques ou que des religieux payés par l’État avaient promis à des patients que Dieu guérirait leur cancer.

Les intervenants en soins spirituels, qu’ils soient laïques ou religieux, sont payés de 24 $ à 40 $ de l’heure par le ministère de la Santé.

Des dommages « désastreux »

Sur son compte Twitter, la Fédération des médecins spécialistes (FMSQ) a déclaré ce week-end qu’« il est inacceptable que des patients soient exposés à du harcèlement religieux ou spirituel dans les corridors d’hôpitaux ou de CHSLD et que pire, du personnel y prenne part ».

Le psychiatre Yves Quenneville, spécialiste des soins palliatifs, a pour sa part écrit sur Twitter qu’« en 30 ans de pratique de soins palliatifs, il a fallu en débusquer, démasquer et expulser… leur infiltration est insidieuse. Les dommages désastreux ».

Yves Casgrain, ancien directeur de la recherche d’Info-Secte, a confié que « malgré [sa] longue expertise dans ce domaine, [il est] toujours aussi bouleversé par ces histoires potentiellement dommageables pour les victimes ».

Un hémato-oncologue du CHU de Québec, Maxime Chénard-Poirier, a pour sa part indiqué que « trop souvent, clientèle vulnérable égale opportunité pour personne mal intentionnée. On doit être plus vigilant ».

La ministre de la Santé, Danielle McCann, a précisé ce week-end qu’« en mars dernier, le CHU de Québec a reçu, par l’entremise du Centre Spiritualitésanté, le mandat de coordination de la révision des orientations ministérielles pour l’organisation des services d’animation spirituelle pour l’ensemble des établissements du réseau au Québec ».

« Nous nous assurerons de mettre en place des mesures pour protéger les usagers et nous assurer qu’ils soient traités dans le plus grand respect », a-t-elle promis.

https://www.lapresse.ca/

Le Saviez-Vous ► 8 choses que vous ne savez (peut-être) pas sur les sorcières


Il y  a eu des hommes et surtout des femmes qui ont été accusés de sorcellerie et condamné à mort grâce aux aveux sous la torture ou une soi-disant preuve d’une marque du démon qui pouvait être un bouton, un abcès, une tache de vin … Aujourd’hui, sorcière est rentré dans une mode de certaines féministes pour dénoncer des injustices.
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8 choses que vous ne savez (peut-être) pas sur les sorcières

 

Supplice de Anneken Hendriks, brûlée à Amsterdam en 1571 (Cl Roger-Viollet/CC)

On a voulu vous parler de ces femmes et de ces hommes qui ont été persécutés.

 

Par Emilie Brouze, Alice Marunani et Renée Greusard

1 On disait qu’elles embrassaient le cul du diable

Que reprochait-on aux prétendues sorcières ?

« Beaucoup de choses », répond Michel Porret, professeur d’histoire à l’université de Genève et auteur de « l’Ombre du diable » (éd. Georg, 2010). L’argument du sabbatest abondamment cité. Un argument théorique, car « jamais les femmes n’ont été arrêtées en flagrant délit. »

Maxime Gelly – Perbellini, historien spécialiste de la représentation des sorcières au Moyen Age, détaille : « Il y a cette idée que des hommes et des femmes se réunissent la nuit sous l’ordre du diable et du démon afin de l’adorer et de commettre des crimes abominables. On dit qu’elles concoctent des recettes ignobles à base de graisse d’enfants, de cadavres ou qu’elles embrassaient le diable sur son derrière. »

Satan serait adoré dans ces assemblées nocturnes : le sabbat est l’église du mal, l’école de la débauche. La sorcière s’y rendrait de nuit, par voie aérienne, chevauchant parfois un balai, un animal noir voire le diable.

Lors des procès, on impute aux « sorcières » tous les malheurs biologiques : empoisonnements, stérilité, bétail tué, etc.

2 Des mecs aussi ont été accusés

« La sorcellerie n’était pas spécifique au sexe mais elle était liée au sexe », écrit Alison Rowlands, spécialiste de la chasse aux sorcières – qui culminera entre 1560-1570 et 1620-1630.

Durant la première période de cette chasse, à partir de 1420, les sorcières étaient surtout… des sorciers, explique Maxime Gelly – Perbellini.

 « Les procès étaient peu nombreux et touchaient tous les milieux. »

La bascule du genre se fait en 1550. Là, le nombre de procès augmente significativement, les accusations de sorcellerie se démocratisent et surtout, se féminisent.

 L’accusation devient une arme sexiste contre les femmes qui « remettaient en cause la vision patriarcale de la femme idéale », écrit Alison Rowlands.

« Avec un taux plausible de 48% des condamnations à mort sur 110.000 procès recensés en Europe (hors lynchages), les juges laïques font exécuter environ 60.000 à 70.000 sorcières et sorciers – 7 à 8 femmes sur 10 condamnés (Levack, 2001) « , lit-on dans « Présumées coupables » (éd. Iconoclaste, 2017).

Maxime Gelly – Perbellini ajoute :

« La question de la sorcière embrasse celle des stéréotypes que l’on véhicule sur les femmes et plus globalement sur les personnes à la marge. Ces stéréotypes peuvent se rapprocher de ce qu’on dit sur les juifs ou les errants, par exemple. »

3 C’était vraiment hardcore

Contrairement à un voleur ou à un assassin, la sorcière n’a pas d’autre issue que la mort. La plupart des femmes accusées avouent sous la torture.

« Les procès de sorcellerie suivent la procédure inquisitoire validée par le quatrième concile du Latran (1215), qui abolit aussi l’ordalie : écriture, instruction secrète, recherche médico-légale de la marque satanique, torture pour l’aveu, exécution publique », lit-on dans « Présumées coupables ».

La seule preuve qu’on essaie de trouver dans les procès en sorcellerie est la griffe de Satan. Une marque invisible, dont on dit qu’elle a fait mourir l’endroit où la sorcière a été marquée.

« La marque a la particularité de ne pas être naturelle », explique Michel Porret.

On lit ainsi dans les interrogatoires la référence au sperme glacé de Satan, preuve de non-naturalité.

Une fois que le juge est convaincu de la culpabilité de la sorcière, celle-ci est dénudée et « rasée de tout poil ». Le corps de l’accusée subit ensuite une inspection avec une aiguille chirurgicale, à la recherche du point d’insensibilité. Très souvent on la trouve sous la forme d’un abcès, pustule, tache de vin, tumeur ou verrue.

Une fois les sorcières condamnées, la plupart sont brûlées, comme une neutralisation symbolique.

« Brûlée vive ou étranglée au préalable », précise Michel Porret.

4 Mais parfois, ça ne se finit pas si mal

De temps en temps, les femmes accusées de sorcellerie obtiennent une lettre de rémission. Maxime Gelly – Perbellini évoque, par exemple, le cas de l’empoisonneuse de La Rochelle en 1382.

Jehanne Gaigne, âgée de 18 ans, est l’épouse de Guillaume Cusse, charpentier et bourgeois de La Rochelle.

« Sous l’influence d’une autre femme réputée sorcière, appelée Arzene, elle aurait utilisé des envoûtements, des philtres et enfin du poison, du sulfure d’arsenic mêlé de verre pillé, sur son époux, sans pour autant réussir à le faire mourir.

Elle est accusée par le prévôt de La Rochelle pour sorcellerie et est condamnée à la prison, elle demande elle-même sa rémission au roi de France. »

Et l’historien de commenter :

« Derrière les images cocasses, cette lettre doit nous rappeler que le regard de l’historien ne doit pas s’arrêter à une vision stéréotypée d’un phénomène. Toutes les ‘sorcières’ ne sont pas menées au bucher et que, plus que d’autres, cette accusation est au cœur de discours politiques, juridiques, idéologiques en constante tension. Le prévôt condamne pour affirmer sa justice ; la condamnée tente de minimiser sa responsabilité en se faisant elle-même victime du diable ; le roi, engagé à la fin du Moyen Age dans la structuration de l’ordre judiciaire, se montre timide à confirmer une condamnation qui ne repose sur aucun fondement criminel (pas de meurtre, pas de sang versé) et préfère laver Jehanne de ses accusations. »

5 Des figures féministes

« Après l’émergence des sciences humaines, post-soixante huitarde, on assiste à toute une reconstruction de la figure de la sorcière. On en fait une femme révoltée », confirme Michel Porret.

La figure autrefois maudite et crainte devient un symbole d’un rapport de domination et le symbole subversif de la révolte féminine.

En Italie, des féministes scandent :

« Tremblez, tremblez, les sorcières sont de retour » [‘Tremate, tremate, le streghe son tornate’]. »

La revue littéraire « Sorcières », fondée par Xavière Gauthier et à laquelle contribua Marguerite Duras ou Nancy Huston, est l’emblème de cette reconstruction.

La revue féministe, publiée de 1975 à 1981, est née dans le but de donner la parole aux femmes pour qu’elles puissent exprimer leur créativité et ainsi accompagner voire susciter l’émergence d’un mouvement de femmes créatrices. Une femme juchée sur un balai orne la couverture du premier numéro.

Pourquoi « sorcières » ? Dans un éditorial, Xavière Gauthier écrit :

« Parce qu’elles dansent. Elles dansent à la pleine lune. Femmes lunaires, lunatiques, atteintes – disent-ils – de folie périodique. Gonflées de révolte fulgurante, de colère bouillonnante, gonflées de désir, elles dansent sur la lande sauvage des danses sauvages.
Sauvages, comme l’homme blanc le dit des autres ethnies ; sauvages comme l’Etat et le syndicat le disent de certaines grèves, de certaines crèches. Elles dansent, sauvages et irrécupérables, comme le désir. »

6 La dernière sorcière d’Europe

Elle s’appelait Anna Göldi, elle était suisse et fut, en Europe, la dernière femme à être condamnée à mort pour sorcellerie. C’était en 1782. On lui a coupé la tête et puis on a enfoui son corps au pied de l’échafaud. 

Servante dans la famille d’un médecin, Anna a été accusée d’avoir empoisonné la fille de son patron à l’aide d’aiguilles magiques. Un article du « Monde » consacré à Anna Göldi raconte :

« Selon le récit fait plus tard au procès, des aiguilles sont à plusieurs reprises trouvées dans le bol de lait d’Annemiggeli, la seconde fille de la famille, âgée de 8 ans. Anna Göldi, qui fait office de gouvernante, est soupçonnée, puis finalement renvoyée. »

« Quelque temps après, la fillette tombe gravement malade, prise de violentes convulsions, d’une fièvre inexpliquée, d’accès de délire et de toux. La jeune Annemiggeli se met à vomir, presque chaque jour, des aiguilles dans des glaires mêlées de sang. Une centaine en tout. Certaines crises la laissent sourde et muette. »

Sous la torture, la servante finit par avouer ce crime. Pourquoi a-t-elle été accusée ? L’article du « Monde » dit, et cette résonance à l’actualité est troublante :

« Walter Hauser [un journaliste qui a enquêté sur l’affaire, NDLR] a retrouvé la trace – mais non le contenu – d’une plainte pour harcèlement sexuel déposée en décembre 1781 par Anna Göldi contre son employeur. Voilà qui aurait pu ruiner la réputation du bon docteur Tschudi qui, vraisemblablement, s’empressa d’allumer un contre-feu. »

7 La démonologie fut une science à la mode

La démonologie est l’étude des démons et des mauvais esprits. Il en existe dans toutes les religions, notamment dans la religion chrétienne. Le premier traité de démonologie imprimé est daté de la fin du XVe.

 « Il va devenir un best-seller », raconte Michel Porret. « La matrice de toute une série d’autres traités de démonologie. »

Les démonologues sont un peu les théoriciens de la chasse aux sorcières.

8 Les sorcières sont de retour (pour combattre l’ordre établi)

La sorcellerie revient en force dans les milieux féministes et queer, comme le racontent Vice et Cheek Magazine. Quel meilleur symbole de liberté et de danger pour l’ordre établi ? La publication en 2012 du livre d’Anna Colin « Sorcières : pourchassées, assumées, puissantes, queer », signe l’arrivée de cette mode américaine en France.

Un cortège de « sorcières », des féministes anarchistes de l’université Paris-VII s’est ainsi formé dans la manifestation contre la réforme du travail le 12 septembre dernier sous le nom de Witch Bloc, avec des slogans comme « Macron au chaudron ».

Des soirées queer et sorcellerie se lancent de partout, comme les événements Bitchcraft. La dernière Queerweek, grand événement queer parisien, proposait un atelier de confection de sortilèges.

Le mouvement est aussi porté par la mode du développement personnel et des thérapies alternatives. Jack Parker par exemple, blogueuse féministe, a lancé sa newsletter Witch, please ! où elle explique comment pratiquer la sorcellerie au quotidien (par exemple, en accrochant une branche d’eucalyptus dans sa douche ou en tirant le tarot). 

 

Emilie Brouze, Alice Marunani et Renée Greusard

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Le Saviez-Vous ► Pourquoi déteste-t-on les roux?*


Je ne déteste pas les roux, d’autant plus que j’ai une bru rousse avec qui je m’entends bien. Je suis contre toute discrimination envers la couleur de peau, son origine, les croyances (en autant qu’elles soient pacifiques) la langue, envers des handicapés et bien entendu envers la couleur des cheveux. À vrai dire, je ne comprends pas que des stéréotypes puisse encore exister envers les roux, que des mouvements anti-roux soient actifs. Il faut vraiment être ignorant et stupide de détester une personne pour sa couleur de cheveux.
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Pourquoi déteste-t-on les roux?*

 

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Illustration Laurence Bentz pour Slate

Christophe-Cécil Garnier

Non, Slate ne déteste pas les roux. Notre nouvelle série «Pourquoi déteste-t-on les…?» recense les préjugés courants pour mieux les démonter.

Je n’ai pas vu beaucoup de roux durant ma jeunesse, mais il y a au moins un moment gravé dans mon esprit. Je devais avoir quinze ou seize ans et j’allais à un festival vendéen appelé La Septième Vague, qui se déroule dans la charmante et bucolique commune de Brétignolles-Sur-Mer.

Mon père m’emmenait en voiture avec une amie. En arrivant dans la ville, nous fûmes pris dans un petit embouteillage –ce qui, il faut le dire, constitue un événement en Vendée. Alors qu’on attendait patiemment, un groupe de jeunes nous a dépassés. Deux garçons, puis deux filles et en bout de groupe, un autre garçon, roux, qui transportait un pack de bières.

«- Oh, c’est pas très cool, nous sommes-nous vaguement insurgés mon amie et moi.

– Ça va, répliqua mon père. Dans l’Égypte Antique, ils l’auraient tué à la naissance. Donc il n’a pas à se plaindre.»

La remarque nous interpella, avant de nous faire éclater de rire. Cette amie, qui a rencontré mon père cette seule et unique fois, m’en reparle encore.

Défiance depuis l’Antiquité

Il faut dire qu’il est assez aisé de se moquer des roux, même si personne ne connaît vraiment l’origine des clichés à leur propos.

«On a des preuves de défiance à l’égard des roux et des rousses depuis qu’il y existe des traces écrites, explique Valérie André, auteure de Réflexions sur la question rousseet de La rousseur infamante. Depuis l’apparition de l’écriture, en fait. On a l’habitude de citer la phrase de l’Esprit des Lois de Montesquieu:

“On peut juger de la couleur de la peau par celle des cheveux, qui, chez les Égyptiens, les meilleurs philosophes du monde, étaient d’une si grande conséquence, qu’ils faisaient mourir tous les hommes roux qui leur tombaient entre les mains.”

En réalité, les égyptologues ont montré que c’était faux: les Égyptiens ne faisaient pas de sacrifices humains. Mais cela révèle une croyance très ancienne selon laquelle les roux sont maltraités».

Voilà, désolé Papa, la blague tombe à l’eau. Et il est inutile de blâmer Montesquieu pour cette fake news du XVIIIe siècle, l’ensemble du texte est une succession d’ironie pour dénoncer l’esclavage.

Une personne sans ascendant roux a 3% de chance de l’être, selon Valérie André, «quelle que soit l’ethnie» –et c’est important, nous y reviendrons.

La rousseur est due à la mélanine, les pigments responsables de la couleur de nos cheveux, de nos yeux ou de notre peau. Durant la gestation, deux types de mélanine sont synthétisés: la phéomélanine et l’eumélanine.

«Chez les roux, la synthèse reste bloquée aux phéomélanines. Celles-ci sont incapables de synthétiser des ultraviolets, ce qui explique que les roux sont plus sensibles aux coups de soleil, aux brûlures…», explique Valérie André, également chercheuse au FNRS, le CNRS belge.

Le phénomène est responsable de cette carnation«particulière des cheveux et des yeux, que l’espèce ressent très rapidement comme une sorte de dégradation, puisqu’il y a une rareté physiologique, continue la chercheuse.

On peut imaginer que dans les sociétés antiques, où l’on ne possèdait pas ces explications, il était totalement impensable d’avoir un enfant de cette teinte-là, dans un milieu où aucun ancêtre n’avait cette typologie».

Judas, le feu et la prostitution

Associez à cela une succession d’éléments qui, d’un point de vue extérieur et contemporain, frôlent l’acharnement du destin. Dans l’iconographie chrétienne, et principalement sur les vitraux, Judas est présenté comme roux –et sa traîtrise avec, alors qu’il n’existe aucune mention de sa couleur de cheveux dans les Évangiles.

Trahison de Judas recevant les trente deniers, maîtresse-vitre de l’église Saint-Ouen aux Iffs (Ille-et-Vilaine) | Via Wikimedia Commons

Dans la société occidentale, la rousseur devient rapidement associée au feu, «un élément dont on sait l’ambivalence qui l’entoure: il est capable d’une destruction complète, mais est aussi vital», note Valérie André.

 Sauf que dans l’imaginaire médiéval, le feu vient avec les démons; les personnes rousses se retrouvent ainsi associées au mal satanique.

En 1254, Saint Louis (Louis IX) publie même un édit stipulant que les prostituées doivent se teindre en roux, «couleur des feux de l’enfer et de la luxure», pour se distinguer des honnêtes femmes.

La construction de stéréotypes autour de la rousseur a été constante au fil de l’histoire, mais ils diffèrent en fonction du genre. Si certains, comme le fait de sentir «mauvais», s’appliquent aux deux, (avec parfois des explications vraiment capilotractées, comme ci-dessous), les rousses et les roux ne sont pas logés à la même enseigne –ou plutôt au même cliché.

Les femmes rousses sont présentées comme des femmes fatales, dangereuses et nymphomanes quand les hommes roux sont eux censés être laids, avec un sale caractère, hypocrites et «enclin aux crimes de sang», selon Valérie André.

«À ces croyances et bobards, on va vouloir donner un fond de rationalité et une assise très crédible aux préjugés. Au XIXesiècle, certains médecins italiens n’hésitent pas à écrire que les femmes rousses portent en elles le syndrôme de la prostitution.»

Une idée qui se retrouve chez les auteurs naturalistes, qui souhaitaient s’appuyer sur les sciences humaines et sociales dans leurs ouvrages. Chez Émile Zola, Nana, qui représente la prostitution dans les Rougon-Macquart, est rousse. Dans la nouvelle éponyme de Maupassant, Yvetteest destinée à devenir courtisane à cause de sa chevelure.

Des préjugés persistants

«Nous sommes dans un discours qui s’entretient de manière souvent fort inconsciente. Les gens véhiculent le préjugé, détaille Valérie André. On ne s’est pas beaucoup interrogé sur les origines de la question et on se retrouve avec un héritage ancestral, qui a eu tendance à muter. S’il y a une altération du préjugé, on se rend compte qu’il n’a pas disparu. Celui sur la sexualité des femmes rousses est utilisé dans la publicité pour les montrer séduisantes. Si c’est moins difficile à vivre aujourd’hui car la société est plus libérée, on n’en sort pas pour autant».

Une étude réalisée dans les années 1980 est détaillée dans l’ouvrage Le langage du corps et la communication corporelle de Marc-Alain Descamps. Si elle n’est conduite qu’auprès de quarante personnes, à qui l’on a demandé de juger une femme brune, une rousse et une blonde, les résultats collent parfaitement aux stéréotypes.

La rousse est considérée comme «traître à 95% et langoureuse à 92%».

Elle est également considérée comme la plus infidèle et la plus méchante. Dans une étude identique portant sur des modèles masculins, le roux est considéré comme le plus fidèle, «parce qu’il n’a pas beaucoup de choix».

Bien que ces clichés soient éculés, ils ont la vie dure. Pascal Sacleux a décidé de se lancer dans un travail photographique sur les roux en 2016. Ce photographe a commencé à y réfléchir après une chronique en 2014 de Fabienne Sintes, qui officiait alors sur France Info.

«J’adorais ses chroniques le matin. Elle parlait de la mort deMickey Rooney, un acteur des années 1950. Elle commence à dire: “Petit, rondouillard, rouquin, et pourtant, il aura connu huit mariages et non des moindres”. Je me suis dit: “C’est du délire, pas elle, pas ça!”. On peut piocher dans l’inconscient collectif sur les roux et dire que “c’est notoire”, mais pas une journaliste. C’est sa responsabilité de véhiculer ou non ce genre d’idioties. Ça m’a blessé, vraiment. J’étais en colère».

Exemples de photos prises par Pascal Sacleux

Une «roussitude» à assumer

Le photographe, qui a longtemps suivi «les cultures noires, africaines, afro-américaines ou caribéennes», se dit alors qu’il va effectuer un «travail sur mes semblables, ma propre minorité». C’est en avril 2016 qu’il se rend compte qu’il tient quelque chose, alors qu’il prend en photo un enfant roux d’une famille d’amis:

«On parlait du fait d’être roux, de “roussitude”. Je n’aime pas trop les mots inventés comme “roucisme”, parfois utilisé pour parler de “racisme anti-roux”, mais celui-là me convient bien. Ça fait un parallèle avec la négritude [un courant littéraire et politique théorisé notamment par Sédar Senghor, ndlr]. Après l’avoir photographié, sa mère m’a dit que ce que je lui avais raconté allait l’aider dans son identité. Et là, j’ai eu un flash».

Le projet de Pascal Sacleux est bien accueilli; il photographie 128 personnes en un an, «en quadrillant le secteur Vitré – Saint-Malo – Nantes» –il vit en Bretagne. Très vite, on lui raconte «des histoires effrayantes» de harcèlement.

Lui n’a jamais eu de problème:

«J’ai toujours été plutôt bien dans ma peau, à part vers 17 ans, une période où l’on est vulnérable. Mais on ne m’a jamais harcelé. Je savais qu’être roux était un petit peu différent, mais je ne savais pas à quel point ça pouvait être un calvaire».

Pascal Sacleux a recueilli bon nombre de témoigagnes. Avant notre appel, il avait photographié sa 700epersonne. Après son exposition «Bretagne: Ornements de rousseur» à l’aéroport de Rennes, il photographie de plus en plus de monde, lors de week-ends: 70 personnes à Carhaix, 124 à Quimper et 159 à Saint-Brieuc. Un tel engouement l’a surpris:

«Je me suis dit qu’il y avait vraiment un truc. Les gens sortent de leur tanière pour venir se faire photographier, alors qu’on ne les entend pas, qu’on ne les connaît pas. Ils trouvent le courage de venir et de se poser devant un photographe inconnu parce qu’ils sont roux et veulent se montrer. Derrière, il y a une attente. On sent qu’ils ont pris cher dans l’enfance et leur jeunesse», détaille-t-il, le ton enjoué.

«Les roux comme les autres ont les cheveux qui changent. Certains n’osent pas m’approcher parce qu’ils ont les cheveux blancs.» | Pascal Sacleux

Ce travail a débouché sur un autre projet: la publication à venir d’un livre, en collaboration avec Élodie, blogueuse du site La Vie en rousse, et la documentariste Marie-Savine Colin.

L’ouvrage sera «un état des lieux de la condition des roux aujourd’hui en France. Des gens dont on se fout éperdument et dont on n’entend jamais parler».

Ou quand on en entend parler, c’est souvent pour perpétuer des clichés. En 2017, l’émission «Sept à Huit» accueillait le chanteur britannique Ed Sheeran. Remarque du journaliste Thierry Demai­zière:

«Vous êtes né roux, bègue, avec un problème de tympans et un problème de vision».

Une culture commune exclusivement visuelle

L’avènement des réseaux sociaux a eu un effet non négligeable sur les stéréotypes, selon Valérie André:

«Cela a permis de libérer une parole qui s’est sentie totalement à l’abri du politiquement correct. Si vous notez tous les préjugés qui touchent les roux et les remplacez par “noirs” ou “juifs”, vous vous retrouverez au tribunal pour incitation à la haine raciale. Avec les roux, on se l’autorise.»

La chercheuse note également une déferlante de groupes anti-roux sur Facebook, qui ont conduit à des débordements. L’un deux avait mis en place une «journée nationale des coups de pieds aux roux». Selon son créateur, l’évènement était censé être une blague s’inspirant d’un épisode de South Park –qui traitait pourtant, comme à son habitude, le sujet de façon juste et satirique; 5.000 membres ont adhérés et le «gag» a engendré des agressions.

«Ce qui est intéressant, pointe Valérie André, c’est que la rousseur n’est pas réservée à une partie de l’humanité. Elle peut se retrouver partout: chez les Africains, les Asiatiques, les Européens. Cela empêche au fond qu’il y ait une stigmatisation par ethnie, même si les comportements anti-roux appartiennent selon moi au racisme ordinaire».

Exemples de photos prises par Pascal Sacleux

«Je n’aime pas parler de racisme anti-roux, surenchérit Pascal Sacleux. Je préfère le terme de “discriminations”. On ne forme pas une communauté; c’est ça qui peut faire la différence. Les Afro-Américains aux États-Unis ont la même histoire, via l’esclavage. Nous, on n’a pas de héros roux; on ne peut pas tous se ranger derrière Ed Sheeran. Je suis admiratif des cultures afro-américaines: elles ont eu la démarche de se sortir des clichés, des stéréotypes et des discriminations. Les communautés noires ont des cultures communes, des langues, des histoires. Les roux pas du tout. Notre culture n’est que visuelle, c’est la seule chose qui nous rallie.»

En parlant de ralliement, Pascal Sacleux va organiser en 2018, près de Rennes, un festival pour les roux et rousses, «mais ouvert à tous», précise-t-il.

«Le maire prévoit 500 personnes, je lui ai dit que ça allait plutôt être 5.000!»

Tout en sachant que cela relève «de l’ordre du fantasme», le photographe aimerait qu’il soit «aussi politiquement incorrect de se moquer d’un roux que d’un noir, d’un Asiatique ou d’un handicapé».

Pour atteindre ce but, il n’y a pas trente-six solutions. Valérie André l’illustre avec une dernière anecdote, personnelle cette fois:

«Quand je suis passée une fois à la télé, une maquilleuse italienne m’a dit que sa sœur avait eu un enfant roux, et que leurs parents ne voulaient pas le voir. Ils auraient préféré un trisomique». Elle marque une pause. «Le roux ne se sent pas roux en tant que roux, mais dans le regard de l’autre. C’est ce regard qu’il faut changer.»

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Le Saviez-Vous ► 8 choses que vous ne savez (peut-être) pas sur les sorcières


Il aurait eu 110.000 sorciers, sorcières (surtout des femmes) qui ont été exécutés juste en Europe. On accusait de sorcellerie d’après des stéréotype, de vengeance, et autres. Au fil du temps, les femmes étaient considérées comme des sorcières celles qui contestaient le système patriarcal. Aujourd’hui, être une sorcière est une mode qui n’about pas au bûcher ou à la torture comme au Moyen-Âge
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8 choses que vous ne savez (peut-être) pas sur les sorcières

Supplice de Anneken Hendriks, brûlée à Amsterdam en 1571 (Cl Roger-Viollet/CC)

On a voulu vous parler de ces femmes et de ces hommes qui ont été persécutés.

Par Emilie Brouze, Alice Marunani et Renée Greusard

 Il y en aurait eu 110.000 en Europe (voir plus bas) et ils furent persécutés. On avait envie de vous parler d’eux et plutôt d’elles, car c’est surtout une histoire de femmes et de la haine qu’elles ont inspirée.

1 On disait qu’elles embrassaient le cul du diable

Que reprochait-on aux prétendues sorcières ?

« Beaucoup de choses », répond Michel Porret, professeur d’histoire à l’université de Genève et auteur de « l’Ombre du diable » (éd. Georg, 2010).

L’argument du sabbat est abondamment cité. Un argument théorique, car « jamais les femmes n’ont été arrêtées en flagrant délit. »

Maxime Gelly – Perbellini, historien spécialiste de la représentation des sorcières au Moyen Age, détaille :

« Il y a cette idée que des hommes et des femmes se réunissent la nuit sous l’ordre du diable et du démon afin de l’adorer et de commettre des crimes abominables. On dit qu’elles concoctent des recettes ignobles à base de graisse d’enfants, de cadavres ou qu’elles embrassaient le diable sur son derrière. »

Satan serait adoré dans ces assemblées nocturnes : le sabbat est l’église du mal, l’école de la débauche. La sorcière s’y rendrait de nuit, par voie aérienne, chevauchant parfois un balai, un animal noir voire le diable.

Lors des procès, on impute aux « sorcières » tous les malheurs biologiques : empoisonnements, stérilité, bétail tué, etc.

2 Des mecs aussi ont été accusés

« La sorcellerie n’était pas spécifique au sexe mais elle était liée au sexe », écrit Alison Rowlands, spécialiste de la chasse aux sorcières – qui culminera entre 1560-1570 et 1620-1630.

Durant la première période de cette chasse, à partir de 1420, les sorcières étaient surtout… des sorciers, explique Maxime Gelly – Perbellini.

« Les procès étaient peu nombreux et touchaient tous les milieux. »

La bascule du genre se fait en 1550. Là, le nombre de procès augmente significativement, les accusations de sorcellerie se démocratisent et surtout, se féminisent.

L’accusation devient une arme sexiste contre les femmes qui « remettaient en cause la vision patriarcale de la femme idéale », écrit Alison Rowlands.

« Avec un taux plausible de 48% des condamnations à mort sur 110.000 procès recensés en Europe (hors lynchages), les juges laïques font exécuter environ 60.000 à 70.000 sorcières et sorciers – 7 à 8 femmes sur 10 condamnés (Levack, 2001) », lit-on dans « Présumées coupables » (éd. Iconoclaste, 2017).

Maxime Gelly – Perbellini ajoute :

« La question de la sorcière embrasse celle des stéréotypes que l’on véhicule sur les femmes et plus globalement sur les personnes à la marge. Ces stéréotypes peuvent se rapprocher de ce qu’on dit sur les juifs ou les errants, par exemple. »

3 C’était vraiment hardcore

Contrairement à un voleur ou à un assassin, la sorcière n’a pas d’autre issue que la mort. La plupart des femmes accusées avouent sous la torture.

« Les procès de sorcellerie suivent la procédure inquisitoire validée par le quatrième concile du Latran (1215), qui abolit aussi l’ordalie : écriture, instruction secrète, recherche médico-légale de la marque satanique, torture pour l’aveu, exécution publique », lit-on dans « Présumées coupables ».

La seule preuve qu’on essaie de trouver dans les procès en sorcellerie est la griffe de Satan. Une marque invisible, dont on dit qu’elle a fait mourir l’endroit où la sorcière a été marquée.

« La marque a la particularité de ne pas être naturelle », explique Michel Porret.

On lit ainsi dans les interrogatoires la référence au sperme glacé de Satan, preuve de non-naturalité.

Une fois que le juge est convaincu de la culpabilité de la sorcière, celle-ci est dénudée et « rasée de tout poil ». Le corps de l’accusée subit ensuite une inspection avec une aiguille chirurgicale, à la recherche du point d’insensibilité. Très souvent on la trouve sous la forme d’un abcès, pustule, tache de vin, tumeur ou verrue.

Une fois les sorcières condamnées, la plupart sont brûlées, comme une neutralisation symbolique.

« Brûlée vive ou étranglée au préalable », précise Michel Porret.

4 Mais parfois, ça ne se finit pas si mal

De temps en temps, les femmes accusées de sorcellerie obtiennent une lettre de rémission. Maxime Gelly – Perbellini évoque, par exemple, le cas de l’empoisonneuse de La Rochelle en 1382.

Jehanne Gaigne, âgée de 18 ans, est l’épouse de Guillaume Cusse, charpentier et bourgeois de La Rochelle.

« Sous l’influence d’une autre femme réputée sorcière, appelée Arzene, elle aurait utilisé des envoûtements, des philtres et enfin du poison, du sulfure d’arsenic mêlé de verre pillé, sur son époux, sans pour autant réussir à le faire mourir.

Elle est accusée par le prévôt de La Rochelle pour sorcellerie et est condamnée à la prison, elle demande elle-même sa rémission au roi de France. »

Et l’historien de commenter :

« Derrière les images cocasses, cette lettre doit nous rappeler que le regard de l’historien ne doit pas s’arrêter à une vision stéréotypée d’un phénomène. Toutes les ‘sorcières’ ne sont pas menées au bûcher et que, plus que d’autres, cette accusation est au cœur de discours politiques, juridiques, idéologiques en constante tension. Le prévôt condamne pour affirmer sa justice ; la condamnée tente de minimiser sa responsabilité en se faisant elle-même victime du diable ; le roi, engagé à la fin du Moyen Age dans la structuration de l’ordre judiciaire, se montre timide à confirmer une condamnation qui ne repose sur aucun fondement criminel (pas de meurtre, pas de sang versé) et préfère laver Jehanne de ses accusations. »

5 Des figures féministes

« Après l’émergence des sciences humaines, post-soixante huitarde, on assiste à toute une reconstruction de la figure de la sorcière. On en fait une femme révoltée », confirme Michel Porret.

La figure autrefois maudite et crainte devient un symbole d’un rapport de domination et le symbole subversif de la révolte féminine.

En Italie, des féministes scandent :

« Tremblez, tremblez, les sorcières sont de retour » [‘Tremate, tremate, le streghe son tornate’]. »

La revue littéraire « Sorcières », fondée par Xavière Gauthier et à laquelle contribua Marguerite Duras ou Nancy Huston, est l’emblème de cette reconstruction.

La revue féministe, publiée de 1975 à 1981, est née dans le but de donner la parole aux femmes pour qu’elles puissent exprimer leur créativité et ainsi accompagner voire susciter l’émergence d’un mouvement de femmes créatrices. Une femme juchée sur un balai orne la couverture du premier numéro.

Pourquoi « sorcières » ? Dans un éditorial, Xavière Gauthier écrit :

« Parce qu’elles dansent. Elles dansent à la pleine lune. Femmes lunaires, lunatiques, atteintes – disent-ils – de folie périodique. Gonflées de révolte fulgurante, de colère bouillonnante, gonflées de désir, elles dansent sur la lande sauvage des danses sauvages.

Sauvages, comme l’homme blanc le dit des autres ethnies ; sauvages comme l’Etat et le syndicat le disent de certaines grèves, de certaines crèches. Elles dansent, sauvages et irrécupérables, comme le désir. »

6 La dernière sorcière d’Europe

Elle s’appelait Anna Göldi, elle était suisse et fut, en Europe, la dernière femme à être condamnée à mort pour sorcellerie. C’était en 1782. On lui a coupé la tête et puis on a enfoui son corps au pied de l’échafaud. 

Servante dans la famille d’un médecin, Anna a été accusée d’avoir empoisonné la fille de son patron à l’aide d’aiguilles magiques. Un article du « Monde » consacré à Anna Göldi raconte :

« Selon le récit fait plus tard au procès, des aiguilles sont à plusieurs reprises trouvées dans le bol de lait d’Annemiggeli, la seconde fille de la famille, âgée de 8 ans. Anna Göldi, qui fait office de gouvernante, est soupçonnée, puis finalement renvoyée. »

« Quelque temps après, la fillette tombe gravement malade, prise de violentes convulsions, d’une fièvre inexpliquée, d’accès de délire et de toux. La jeune Annemiggeli se met à vomir, presque chaque jour, des aiguilles dans des glaires mêlées de sang. Une centaine en tout. Certaines crises la laissent sourde et muette. »

Sous la torture, la servante finit par avouer ce crime. Pourquoi a-t-elle été accusée ? L’article du « Monde » dit, et cette résonance à l’actualité est troublante :

« Walter Hauser [un journaliste qui a enquêté sur l’affaire, NDLR] a retrouvé la trace – mais non le contenu – d’une plainte pour harcèlement sexuel déposée en décembre 1781 par Anna Göldi contre son employeur. Voilà qui aurait pu ruiner la réputation du bon docteur Tschudi qui, vraisemblablement, s’empressa d’allumer un contre-feu. »

7 La démonologie fut une science à la mode

La démonologie est l’étude des démons et des mauvais esprits. Il en existe dans toutes les religions, notamment dans la religion chrétienne. Le premier traité de démonologie imprimé est daté de la fin du XVe.

« Il va devenir un best-seller », raconte Michel Porret. « La matrice de toute une série d’autres traités de démonologie. »

Les démonologues sont un peu les théoriciens de la chasse aux sorcières.

8 Les sorcières sont de retour (pour combattre l’ordre établi)

La sorcellerie revient en force dans les milieux féministes et queer, comme le racontent Vice et Cheek Magazine. Quel meilleur symbole de liberté et de danger pour l’ordre établi ? La publication en 2012 du livre d’Anna Colin « Sorcières : pourchassées, assumées, puissantes, queer », signe l’arrivée de cette mode américaine en France.

Un cortège de « sorcières », des féministes anarchistes de l’université Paris-VII s’est ainsi formé dans la manifestation contre la réforme du travail le 12 septembre dernier sous le nom de Witch Bloc, avec des slogans comme « Macron au chaudron ».

Des soirées queer et sorcellerie se lancent de partout, comme les événements Bitchcraft. La dernière Queerweek, grand événement queer parisien, proposait un atelier de confection de sortilèges.

Le mouvement est aussi porté par la mode du développement personnel et des thérapies alternatives. Jack Parker par exemple, blogueuse féministe, a lancé sa newsletter Witch, please ! où elle explique comment pratiquer la sorcellerie au quotidien (par exemple, en accrochant une branche d’eucalyptus dans sa douche ou en tirant le tarot). 

https://tempsreel.nouvelobs.com

Une lettre "écrite par Satan" au 17ème siècle vient d’être décodée


En 1676 une soeur a écrit inconsciemment semble t’il une lettre avec un mélange de latin, grec ancien et arabe. Elle croyait être possédée du démon. Cela a pris plusieurs siècles avant d’être décrypté avec un logiciel qui laisse plané que la religieuse avait probablement un trouble mental
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Une lettre « écrite par Satan » au 17ème siècle vient d’être décodée

 

© thinkstock.

Un sombre matin de 1676, Soeur Maria s’est réveillée le visage couvert d’encre avec une mystérieuse lettre dans la main.

Née Isabella Tomasi en 1645, elle est devenue Soeur Maria Crocifissa della Concezione lorsqu’elle est entrée dans les ordres au Couvent des Bénédictines situé dans la commune de Palma di Montechiaro en Sicile. Selon la légende, le 11 août 1676, Soeur Maria s’est réveillée en découvrant une lettre qu’elle ne se souvenait pas d’avoir écrite. Sur le papier se trouvait un code étrange et indéchiffrable, ce qui l’a poussée à croire qu’elle avait été possédée par un démon.

Depuis plus de 300 ans, des scientifiques, des universitaires et des spécialistes des sciences occultes ont tenté de percer le mystère de cet alphabet inconnu, en vain. Mais il y a quelques jours, une équipe d’informaticiens italiens du Ludum Science Center a annoncé au monde entier son interprétation de la « lettre du diable ». C’est grâce à un logiciel du dark web qu’ils ont pu enfin traduire une quinzaine de lignes.

« On peut trouver de tout sur le dark web, de la drogue, de la prostitution, de la pédophilie, et aussi des programmes utilisés par les services de renseignement pour déchiffrer les messages secrets, comme celui que nous avons utilisé », a expliqué Daniele Abate, le directeur du centre, sur les ondes de la radio italienne 105.

La lettre écrite par Soeur Maria contenait des traces de latin, de grec ancien, d’arabe et d’alphabet runique.

« Dieu pense qu’il peut libérer les mortels. Le système ne marche pour personne. Peut-être que maintenant, le Styx est certain », aurait donc voulu nous dire Belzébuth.

Le texte décrit aussi Dieu, Jésus et le Saint-Esprit comme des « poids morts » et encourage donc la nonne à abandonner la religion selon le site du Times.

Pour Daniele Abate, cette traduction démontre surtout que Soeur Maria était une linguiste plutôt douée et peut-être légèrement schizophrène. Il poursuit:

« Ma théorie est qu’il s’agit d’un alphabet précis, inventé par la nonne avec beaucoup de soin, en mélangeant des symboles qu’elle connaissait. Chaque symbole est bien pensé et structuré, il y a des signes qui se répètent, et cela montre une initiative soit intentionnelle, soit inconsciente. La vie dans le monastère était sans doute très stressante. »

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Le Saviez-Vous ► Chaupadi, quand les menstruations effraient le Népal


L’ignorance est source trop souvent de discrimination. Et les femmes sont des cibles depuis des siècles de discrimination de tout genre. Ici, c’est une tradition du Népal basée sur une légende que la femme a subit une malédiction par ses menstruations, et doit être exclue certains jours dans des abris infectes loin de tous, ainsi que la femme qui vient d’accoucher n’ayant l’hygiène et une alimentation adéquate, et est mise en danger en plus par le froid, la faim, et même par des prédateurs sexuels. Le pire, c’est que c’est encore le cas en 2017. Une loi interdit cette exclusion et sera mise en pratique en 2018 et comme on sait les traditions sont longues à changer, ce sont les femmes qui continue cette pratique sans contrainte
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Chaupadi, quand les menstruations effraient le Népal

 


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PAR MARINE GASC

Aujourd’hui je vous parle de chaupadi, cette tradition népalaise qui consiste à exclure les femmes de leur foyer lorsqu’elles ont leurs règles. Soit environ quatre jours par mois. Où vont-elles ? Que font-elles ? Pourquoi et depuis quand les Népalaises doivent fuir leur maison pour la simple et naturelle raison qu’elles perdent du sang menstruel ?

A l’origine de chaupadi, un dieu maudit

Dans la mythologie hindoue, Indra, le dieu des cieux, a une vie un peu compliquée, que la religion qualifie d’héroïque, et pourtant… D’abord, il a tué Vritra, un démon. Mais ensuite, sous les conseils avisés d’un autre dieu, il tue un brahmane (il s’agit d’un mec d’une caste importante dans l’hindouisme) mais les sanctions ne se font pas attendre. Il est maudit. Pour se racheter, Indra se cache dans une fleur pendant une année pour marquer sa pénitence auprès du dieu Vishnu. Ce dernier, sensible à la volonté du dieu Indra lui conseille alors de partager sa malédiction au sein de la création divine, les victimes furent les arbres, l’eau, la terre et les femmes (comme par hasard).

« Bien qu’Indra ait été si puissant qu’il puisse neutraliser les réactions pécheuses pour avoir tué un brāhmaṇa, il accepte le fardeau de ces réactions avec les mains jointes. Il a souffert pendant un an, puis s’est purifié, il a distribué les réactions pour ce meurtre pécheur parmi la terre, l’eau, les arbres et les femmes. »

En distribuant sa malédiction aux femmes, Indra a créé les menstruations. Et comme si perdre du sang n’était pas une sanction suffisante, il a décidé que les femmes seraient impures à ce moment-là et que quiconque les approcherait serait à son tour victime d’une malédiction plus ou moins horrible. Alors, depuis ce jour, dans le Nord et l’Ouest du Népal, les femmes ont été exclues de leurs foyers. Il s’agit d’une légende, évidemment, pour autant, en 2017 et après des siècles de pratique, le chaupadi existe toujours.

Les menstruations, de la malédiction à l’exclusion

Dhuna Devi Saud prepares to sleep inside the ?Chaupadi? shed in the hills of Legudsen Village at Achham District

Pour les filles, l’exclusion commence dès leurs premières règles et pas de la plus douce des manières. Lors du premier cycle menstruel, les plus jeunes sont bannies de la maisonpendant treize jours. La fois d’après pendant sept jours, puis au moins quatre jours chaque mois suivant et ce jusqu’à la ménopause. Une femme est alors obligée de vivre pendant plus de 1700 jours dans sa vie dans une petite cabane en terre ou un abri à bétail pour ne pas déclencher la colère des dieux.

Selon les régions du Népal, les règles du chaupadi se sont assouplies et les femmes peuvent rester dans le foyer mais seulement dans une pièce, appelée baitkak, qui leur est réservée.

Le chaupadi n’est pas qu’un exil géographique, il est aussi social et alimentaire. Les femmes n’ont pas le droit d’approcher les enfants, les hommes, le bétail, les arbres fruitiers ou encore les livres. Elles ne peuvent pas participer à des cérémonies religieuses ou de quelconques fêtes. De plus, elles doivent s’en tenir à un régime alimentaire strict : pas de lait, pas de viande, ni de fruits ou légumes verts. En fait, elles peuvent consommer des aliments secs, des céréales et du riz, qu’elles n’ont pas le droit de cuisiner pour elles-mêmes.

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L’abri plus ou moins rudimentaire qui accueille la femme pendant le chaupadi s’appelle le goth. Il doit se situer à une distance minimale de 20 mètres du foyer le plus proche, ce qui entraîne une marche forcée de plusieurs centaines de mètres pour certaines femmes. Évidement, il n’y a aucun confort et encore moins de garde-manger dans le goth qui peut être une cabane en boue, un simple abri construit en bouses de vaches ou au mieux une petite étable avec un toit et une porte. Pendant l’exil, les femmes doivent lutter contre différentes menaces : le froid, le chaud, la faim, la soif, les animaux sauvages et les hommes. Lorsqu’il fait très froid, les femmes ont le droit d’allumer un feu dans leur abri, mais cela peut s’avérer dangereux, les risques de brûlure et d’asphyxie sont réels et les décès sont nombreux. Pour les prédateurs sexuels, le chaupadi est une aubaine, les femmes sont seules, sans aucune défense, dans des endroits reculés.

Question hygiène, les puits et points d’eau classique sont à bannir pour les femmes en période de menstruation, elles doivent rejoindre des puits qui leurs sont réservés, on les appelle les chaupadi dhara. En général très éloignés, les femmes ne les utilisent que le dernier jour des règles afin de laver leurs vêtements tachés et de prendre un bain avant de rejoindre le foyer. Sans bain « purificateur », il leur est interdit de rentrer chez elles.

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Selon les croyances, si les femmes ne respectent pas le chaupadi, les dieux peuvent se mettre en colère et sanctionner la famille entière en éliminant les troupeaux, les cultures, en asséchant les puits ou encore en ôtant la vie des proches. Si par accident, une femme qui a ses règles touche une personne, alors la victime doit se purifier avec de l’urine de vache.

La tradition s’applique aussi pour les femmes qui viennent d’accoucher, en effet, elles doivent s’isoler pendant onze jours avec leur nourrisson dès l’accouchement terminé. Les conséquences sont terribles pour ces femmes qui ne disposent d’aucun soin médical et d’aucune hygiène…

 Les conséquences du chaupadi au Népal

Si pendant leurs règles, les femmes doivent lutter contre le froid, le chaud, les animaux et les criminels, les femmes les plus vulnérables, comme celles venant d’accoucher, sont souvent victimes de leurs croyances et décèdent au sein même du goth. Par exemple, juste après l’accouchement, le corps d’une femme a besoin de plus ou moins de repos et parfois de soins particuliers. Elles n’ont rien pour éviter la fièvre puerpérale, rien non plus contre les hémorragies ou les prolapsus utérins qui sont des conséquences directes de l’accouchement. Il en est de même pour les nourrissons qui n’ont aucun autre soin que ceux que leurs mères leur prodiguent avec ce qu’elles ont à disposition : du lait maternel, quelques plantes, de l’eau lorsqu’elles ont la force d’aller en chercher.

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Depuis le 09 août 2017, une loi vient renforcer une décision de la Cour suprême du Népal de 2005 qui rend illicite la pratique de chaupadi. En effet, les personnes reconnues coupables d’exclure les femmes du foyer en période menstruelle peuvent encourir une peine de trois mois de prison et une amende de 3000 roupies. Cette loi devrait être applicable dès le mois d’août 2018, mais dès aujourd’hui on peut se rendre compte de la difficulté de son application, du fait de l’idée bien ancrée que les menstruations représentent une souillure, les femmes pratiquent d’elles-mêmes le chaupadi sans autre pression que celle de la tradition. Il ne reste alors qu’une solution, la communication et la sensibilisation…

Photographies de Poulomi Basu

Poulomi Basu est née à Calcutta, en Inde, si le chaupadi n’est pas pratiquée en Inde, pendant les menstruations, les femmes connaissent de nombreux interdits. Poulomi Basu n’a notamment pas pu se rendre au mariage de son frère car elle avait ses règles. L’artiste, journaliste et photographe a décidé de faire un reportage photo au Népal « a ritual of exile » pour montrer la discrimination dont les femmes sont victimes encore au XXIe siècle.

http://www.racontemoilhistoire.com

Le Saviez-Vous ► Aux origines mythologiques des éclipses de Soleil


L’être humain a toujours essayer de trouver des explications aux phénomènes qu’il ne connait pas. Auparavant, les éclipse solaire, dépendant des cultures, étaient considérés comme de mauvais présages, le démon, de mauvais génie, voir même des dragons ou des chiens qui avalaient le soleil. Aujourd’hui, les scientifiques ont pu prédire à la seconde près l’apparition de ce phénomène céleste naturel. Il demeure quand même des croyances qui persiste encore aujourd’hui
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Aux origines mythologiques des éclipses de Soleil

 

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Une éclipse solaire partielle aux États-Unis en 1994.

SUPERSTOCK/SUPERSTOCK/SIPA

L’origine des éclipses totales de Soleil est longtemps demeurée mystérieuse avant que la Lune ne soit identifiée comme la seule coupable. Elles appartenaient au répertoire de la mythologie… puis les sciences ont pris progressivement le relais.

ECLIPSE. Le 21 août 2017, les Américains vont vivre une éclipse totale de Soleil. Le phénomène est aujourd’hui bien connu grâce au travail des astrophysiciens au cours des siècles derniers, mais il n’en a pas toujours été de même au cours de l’histoire de l’humanité. Confrontées à la disparition inattendue du Soleil en plein jour, les différentes cultures passées ont cherché à donner un sens à ce phénomène, y voyant l’intervention d’une divinité, d’un démon ou parfois même d’un génie malin. Il a fallu du temps avant que le véritable coupable, c’est à dire la Lune, ne soit identifié. Rétrospective.

« De mauvais présages »

Pendant longtemps, les éclipses ont été « perçues comme des mauvais présages », explique Robert Massey, de la Royal Astronomical Society britannique. 

En Chine, on considérait que le fautif était un dragon céleste qui dévorait le Soleil. On essayait ainsi de faire lâcher prise à l’assaillant mythologique en faisant du bruit, notamment en frappant sur des tambours ou divers objets. Du côté de la Corée ou des Vikings, on croyait encore que c’étaient des chiens qui tentaient de voler l’astre solaire.

LUNE.

« Il a fallu les observations des astronomes et l’étude du mouvement du Soleil et de celui de son satellite naturel, pour comprendre que c’est la Lune qui à chaque éclipse s’interpose devant le Soleil », souligne Pascal Descamps, astronome à l’Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides (IMCCE) à Paris.

Des observations millénaires

Les éclipses font l’objet d’observations depuis des millénaires. A partir de 700 avant Jésus-Christ et jusqu’à 50 av. J.-C., les Babyloniens les ont méthodiquement consignées sur des tablettes. Les Chinois aussi surveillaient attentivement ce phénomène, jugé très important pour l’Empereur. Et gare à ceux qui échouaient dans leurs prédictions ! En 2137 avant notre ère, deux astronomes de cour, les frères Hi et Ho, auraient eu la tête tranchée pour avoir échoué à prédire l’éclipse. Des anecdotes comparables parsèment notre culture héllénique : l’historien grec Hérodote raconte que Thalès de Milet aurait été capable de prédire une éclipse en 585 av. J.-C. L’éclipse se serait produite lors d’une bataille entre les Lydiens et les Mèdes, suite à quoi les belligérants auraient alors déposé les armes, y voyant une injonction des dieux à cesser le combat. Une thèse contestée par les astronomes contemporains, mais qui a marqué l’Histoire.

PRÉDICTION. C’est au IIè siècle de notre ère, avec le grec Ptolémée et son grand traité d’astronomie, que la connaissance précise des différents paramètres nécessaires pour prédire correctement une éclipse a été acquise, souligne Pascal Descamps.

« À la Renaissance, et très certainement grâce à l’invention du télescope (vers 1600) et aux travaux de Copernic, ies éclipses totales de Soleil n’étaient plus considérées comme un événement particulièrement effrayant », considère Robert Massey.

Le moine polonais Copernic (1473-1543) a en effet théorisé le fait que c’est la Terre qui tourne autour du Soleil, et non l’inverse comme le pensait Aristote. Et il y a quelque 300 ans, le Britannique Edmond Halley a réalisé une carte décrivant de façon presque exacte la trajectoire de l’ombre induite par l’éclipse de Soleil totale sur l’Angleterre en mai 1715.

« Le triomphe du rationalisme »

De nos jours, les scientifiques savent prédire les éclipses avec une extrême précision (moins d’une seconde).

« De ce fait, les éclipses peuvent être perçues comme une célébration du rationalisme », relève l’Agence spatiale européenne (ESA) sur son site.

Toutefois certaines croyances ont la vie dure et résistent aux explications scientifiques, pointe pour sa part l’agence spatiale américaine (Nasa) sur son site. La Nasa dresse ainsi une liste des « idées fausses » autour des éclipses. Parmi elles, le fait que les femmes enceintes ne doivent pas regarder le spectacle parce que cela peut faire du mal au bébé ou bien que la nourriture préparée pendant une éclipse peut être empoisonnée par les radiations qui s’échappent de la couronne solaire. Autant d’affirmations sans fondement scientifique.

https://www.sciencesetavenir.fr/

Le Saviez-Vous ► Il était une fois la maladie: la schizophrénie


Être schizophrène n’a pas toujours été reconnu dans l’histoire de l’homme. Le pire moment pour être un schizophrène n’était pas dans l’Antiquité, mais plutôt au Moyen-Âge ! Juste à penser à la chasse aux sorcières, ces personnes étaient plus souvent qu’autrement accusé de faire un pacte avec le démon. Heureusement, au fil des siècles, cette maladie mentale est mieux comprise et des traitements ont été conçus pour aider ces personnes à mener une vie « normale »
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Il était une fois la maladie: la schizophrénie

 

Jacques Beaulieu

Chroniqueur et communicateur scientifique

La schizophrénie à travers les âges

Dans un premier temps, effectuons ce survol rapide de la perception de la maladie mentale dans la médecine occidentale :

L’Antiquité

Vème siècle av. J.-C.

Pythagore : Il est le premier à affirmer que le cerveau est le siège de l’intelligence et des maladies mentales.

Platon : Il enseigne que le principe vital est l’âme. Il illustre le conflit existant entre la raison, l’ordonné, le rationnel, et les appétits inférieurs désordonnés.

IVème siècle av. J.-C.

Aristote : Il décrit la notion de conscience qui est composée selon lui de trois piliers : sensation, conation (effort qui permet la naissance de la volonté) et l’affectivité.

Ier siècle av. J.-C.

Cicéron : Selon lui, l’homme est le seul responsable de son comportement, qu’il soit normal ou non.

1er siècle

Soranus : Il affirme pouvoir guérir les malades mentaux en parlant avec eux de sujets qui les intéressent ou dont ils ont peur.

Le Moyen Âge

IVème siècle

Saint-Augustin : Il est le premier à parler du pouvoir de l’introspection. Il écrit que l’homme doit se livrer à un examen rigoureux de lui-même, mais aussi bénéficier de l’aide spirituelle de Dieu.

XIIIème siècle

Saint Thomas d’Aquin : Comme Aristote, il croit que le cerveau est le siège des maladies mentales mais croit que le diable peut arrêter complètement la raison en troublant l’imagination et l’appétit sensible, comme cela se voit chez les possédés.

XIIIème siècle

La chasse aux sorcières. Transes, expériences oniriques, hallucinations, hystéries et psychoses délirantes sont le lot de ces «êtres faibles», fort probablement plus des malades mentaux que des possédés du démon. Mais comme il était admis que seul Dieu ou le diable avaient la possibilité de connaître l’avenir, gare à ces «sorcières et sorciers» qui se permettaient de prédire l’avenir. Le leur s’arrêtait souvent bien brusquement sur le bûcher.

La Renaissance

XVème siècle

L’expérience humaine redevient à la mode. L’étude des classiques, bannie au Moyen Âge, permet de commencer à dissocier maladie mentale et démons.

XVème siècle

Paracelse : Cet illustre alchimiste et penseur prend position contre les chasseurs et les brûleurs de sorcières.

L’ère moderne

XVIème siècle

Félix Platter : Ce médecin débute une classification des maladies mentales. Selon ce docteur, la plupart de celles-ci sont dues à des lésions du cerveau, sauf les fantasmes sexuels, qui seraient dus à l’œuvre de Satan. On ne peut pas se libérer de tous les démons si rapidement…

Jean Weir : À l’exemple de Paracelse, il condamne les bûchers et les chasseurs de sorcières. Il y consacre un livre, De praestigiis daemonarium (De l’imposture du démon) qui lui vaudra le sobriquet de «weirus heraticus». Dans son livre, il affirme que les sorcières devraient être soignées par des médecins plutôt que brûlées par des ecclésiastiques.

XVIIème siècle

Le roi Louis XIV : Il ouvre l’Hôpital général de Paris en 1656. Y sont amenés tous les pauvres de Paris (environ 5 000 personnes, les autres 35 000 ayant fui hors des murs pour ne pas y être conduits) et les malades mentaux dans le but de les éduquer et les remettre au travail. L’hôpital devenait un outil du roi pour contrôler les mendiants, les malades mentaux et les handicapés.

XIXème siècle

Philippe Pinel : Ce psychiatre définit la maladie mentale comme une atteinte physiologique provoquée par des émotions. Il décide de l’abolition de l’usage des chaînes pour retenir les malades mentaux et exige des traitements plus humains envers ces malades. Il publie en 1801 le Traité médico-philosophique sur l’aliénation mentale, dans lequel il classe toutes les maladies mentales en quatre genres : la mélancolie, la manie, la démence et l’idiotisme.

Bénédict Augustin Morel : Il a été l’un des premiers psychiatres à parler de démence précoce et à établir un classement des maladies mentales basé sur les causes et non sur les symptômes. Il publie un premier traité en 1852 : Traité des maladies mentales en deux volumes.

Emil Kraepelin : Il est considéré comme l’un des pères de la psychiatrie. Il publie en 1883 le Compendium der Psychiatrie et effectue une classification originale des troubles psychiatriques selon deux types qu’il nomme la maniaco-dépression et la démence précoce (dichotomie de Kraepelin).

XXème siècle

Sigmund Freud : La folie est un comportement dicté par les forces refoulées de l’inconscient, selon Freud. C’est la naissance de la psychanalyse.

Eugen Bleuler : Il conteste le terme «démence précoce» de Kraepelin, et lui préfère un nouveau mot : schizophrénie, qui illustre mieux cette scission ou fragmentation de l’esprit. Il attribue la schizophrénie à une défaillance des mécanismes associatifs du cerveau. Carl Jung a fait partie de ses assistants et il eut l’occasion de souvent rencontrer Sigmund Freud et d’avoir de nombreux échanges avec celui-ci.

Schizophrénie : le cerveau, cet inconnu

Le terme schizophrénie n’est apparu dans la littérature médicale qu’au début du vingtième siècle. Mais la maladie est probablement aussi vieille que toutes les autres maladies mentales. Un survol rapide des grandes dates dans l’évolution de la connaissance sur les troubles mentaux nous révèle trois grandes étapes : l’hypothèse physiologique, l’hypothèse religieuse, et le retour à la conception physiologique. Nous en avons illustré précédemment les principaux jalons ainsi que les tenants des diverses théories. Le lecteur comprendra qu’il ne s’agit ici que d’un survol rapide, presqu’un clin d’œil, sur l’histoire de la maladie mentale.

Les médecins, penseurs et philosophes de l’Antiquité, tant grecque que romaine, semblaient reconnaître l’origine physiologique de la maladie mentale. En effet, tant Pythagore que Socrate, Platon et Cicéron, reconnaissent le cerveau comme étant le siège de l’intelligence humaine. Cicéron ajoutera même qu’il est inutile de blâmer les dieux pour les problèmes de santé mentale des humains :

«L’homme est le seul responsable de son comportement, qu’il soit normal ou morbide», écrivit-il.

Le Moyen Âge allait marquer une nouvelle ère. Aux questions soulevées par les guerres, les grandes épidémies, la pauvreté et toutes les misères qui pouvaient se présenter, une nouvelle réponse s’était imposée : la religion. Seule compte la foi. C’est ainsi que le psaume 53 reprend du gallon. «Le fou est celui qui dit en son cœur que Dieu n’existe pas». Les maladies mentales sont considérées surtout comme une punition faisant suite à un ou à des péchés graves ou à des désordres moraux commis par le patient même, un membre de sa proche famille, ou ses ancêtres. Et pour les traitements, l’exorciste est bien plus souvent appelé que le médecin…

Soulignons l’œuvre de saint Thomas d’Aquin, qui prône que la plus grande des sciences est la théologie, à laquelle toutes les autres sont subordonnées, y compris la médecine. L’apogée de cette époque se terminera par une gigantesque chasse aux sorcières.

L’arrivée de la Renaissance et des intellectuels qui lisent les textes antiques accorde de plus en plus de crédit aux théories promouvant l’origine physiologique, et non plus démoniaque, des troubles mentaux.

Du XVIème au XIXème, la maladie mentale fut de mieux en mieux comprise, mais les traitements demeuraient fort limités.

Le vingtième siècle

Bien sûr, l’arrivée des médicaments de première, de deuxième et de troisième génération ont pu améliorer grandement la vie des personnes souffrant de schizophrénie. Des recherches sont aussi fort prometteuses.

Ainsi, le docteur Alexander Niculescu et son équipe de l’Indiana University School of Medicine viennent de publier dans un article de la revue Molecular Psychiatry une cartographie génétique de la schizophrénie. Il s’agit peut-être ici d’un premier pas vers des médicaments plus performants et des thérapies mieux individualisées et fort prometteuses. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2011, vingt-quatre millions de personnes dans le monde seraient atteintes de cette maladie.

http://quebec.huffingtonpost.ca/

Nos démons intérieurs


Nos démons intérieurs sont nos pires ennemis, que ce soit un défaut, une mauvaise habitude, une addiction, se rattacher trop au passé, des secrets trop lourds à porter, et encore beaucoup d’autres. Nous avons le choix de les nourrir ou de travailler à les éliminer un à un
Nuage

 

Nos démons intérieurs

 

On peut vaincre des milliers d’obstacles et d’adversaires, mais celui qui vainc ses démons intérieurs détient la victoire la plus noble.

Shakyamuni

Le saviez-vous ► Un grain de sel et son histoire


Le sel, aujourd’hui on en retrouve partout, voir même trop, tellement que des mises en gardes contre les abus du sel. Pourtant, il fut une époque ou le sel était aussi cher que des épices, la salière tenait une place de choix sur les tables pour les pauvres et les riches … Le sel pouvait conjurer le mauvais sort ou être un présage de mauvais augure
Nuage

 

Un grain de sel et son histoire

 

Le sel est un aliment indispensable à l’homme.

Dès la plus haute antiquité, il a été tenu en haute estime ; il était employé dans les sacrifices et les offrandes aux dieux ; il était le symbole de la purification. Chez les Hébreux comme chez les Arabes, le sel était aussi l’emblème de l’amitié et deux personnes qui en avaient mangé ensemble étaient unies par le plus sacré des liens.

Chez les Grecs et les Romains, le sel était l’habituel condiment ; il devait toujours être tenu dans un grand état de propreté ainsi que la salière.

 

Renverser cette dernière était considéré comme un mauvais présage. Cette superstition s’est perpétuée jusqu’à nous.

Les nouveau-nés avaient à leur naissance le corps frotté de sel.

Le mot salaire aurait pour origine la distribution de sel, faite régulièrement aux troupes romaines.

 

Quand une ville était détruite et rasée, on semait du sel sur son emplacement parce qu’on croyait qu’il rendait le sol stérile.

Les Romains connaissaient le sel gemme, mais ils avaient établi aussi des salines en quelques points du littoral de l’Italie et de l’Afrique.

Au moyen-âge, en Europe, on appréciait aussi le rôle du sel. Le commerce du condiment qui avait été libre jusqu’au XIVe siècle, devint à partir de cette époque l’objet d’impôts accrus successivement ; la perception de ces impôts causa plus d’une fois des désordres graves parmi le peuple. A certaines époques le prix du sel devint si exagéré que les riches seuls pouvaient se permettre d’en assaisonner leur pain.

A la fin du règne de François 1er, il coûtait aussi cher que les épices de l’Inde. Aujourd’hui encore, bien qu’à bas prix, il est frappé d’un impôt énorme qui représente plusieurs fois sa valeur.

Après ces quelques lignes indispensables consacrées au sel, nous nous occuperons du récipient qui sert à le contenir et des variations qu’il a subies à travers les siècles.

 

Salière créée pour François Ier par Benvenuto Cellini

A Rome, la salière était, en même temps qu’une pièce importante du service de la table, un ustensile du culte familial.

Toute famille, même de fortune très modeste, tenait à honneur de posséder une salière d’argent qu’on se transmettait de père en fils. Le milieu de la table lui était réservé d’ordinaire ; quand on voulait faire honneur à un convive on le plaçait devant lui.

La salière était posée sur un plat d’argent. Ceux qui étaient trop pauvres pour se procurer ce récipient, mettaient le sel dans une coquille.

Oublier de servir la salière ou négliger de l’enlever était un signe de mauvais augure.

Au moyen âge, les gens du peuple utilisaient, comme salière, un creux fait dans la mie d’une tranche de pain, et cet usage persista jusqu’au milieu du XVIe siècle.

Au contraire, sur la table des rois et des grands, la salière était une pièce d’orfèvrerie de grande valeur et de formes compliquées. Parfois ses dimensions étaient énormes, avec un saleron en matière dure, agate ou cristal de roche, supporté par un personnage ou un animal en métal ciselé.

Dans l’inventaire de Charles V, datant de 1380, cité par M. Delaborde, on remarque

« une salière d’or en manière de nef, garnie de pierreries, et aux aux deux bouts il y a deux dauphins et dedans deux singes qui tiennent deux avirons, et autour de la salière il y a 8 rubis, 8 saphirs et 28 perles, et au long du mat de la nef, qui est d’or, il y a 4 cordes de menues perles et il y a 2 rubis et 2 saphirs percés et une grosse perle à moulinet, pendant à une chaîne d’or au col d’un singe qui est sur le mat. Au pied de la dite salière, il y a 6 rubis et 6 saphirs et 24 perles, pesant 8 marcs, 3 onces. »

Salière (Paris, ca. 1527-1528)

Au début du XVIe siècle, même complication, puisque l’inventaire de Charles-Quint (1536) mentionne une salière d’or « ayant par dedans une horloge ». Beuvenuto Cellini a exécuté pour François Ier plusieurs salières, dont une célèbre conservée actuellement au musée de Vienne.

Les salières de la fin de ce même siècle sont beaucoup plus simples, elles sont à un seul saleron hémisphérique creusé au sommet d’un prisme rectangulaire ou hexagonal ayant de 5 à 10 centimètres de hauteur. Pierre Reymond de Limoges a exécuté des salières remarquables d’émaillerie peinte dont quelques-unes sont au Louvre.

 

Salière (Angleterre, vers 1720).

Notre grand musée possède aussi des salières de Bernard Palissy, d’autres en faïence d’Oiron d’une valeur considérable.

 Au XVIIe siècle, la salière se simplifie.

Le plus souvent en métal, elle ressemble à une bobine portée sur trois pieds en boules, et porte un seul saleron toujours pratiqué à son sommet. A la fin du même siècle, elle s’élargit par la base de manière à se renverser moins facilement.

La forme actuelle n’apparaît guère que sous Louis XV. Nous reproduisons deux beaux modèles de salières dus à Pierre Germain, le célèbre orfèvre. L’une est à deux salerons ; la seconde n’en possède qu’un seul.

http://www.gloubik.info

Renverser une salière : Le sel était bénéfique (il conservait les aliments) et faisait l’objet d’un impôt (la gabelle), donc en gaspiller porte malheur.

Ayant des vertus bienfaitrices, répandre du sel dans les coins d’une maison ou en jeter par dessus son épaule éloigne évidement les démons. 

 

La Gabelle
    

http://eliedumas.typepad.com