Démence fronto-temporale: un mal rare et brutal


Ça prend une mort souvent tragique d’une personne connu pour qu’on s’intéresse a certaines maladies, Nous avons appris avec étonnement la mort de l’humoriste Serge Grenier, je crois que beaucoup ont pensé au suicide, mais la réalité est tout autre … Personne ne sait ce qu’il a vue, entendu dans sa tête mais cela nous apprend le nom d’une maladie qui tout comme l’Alzheimer n’est pas facile a voir ceux qu’on aime en souffrir
Nuage

 

Démence fronto-temporale: un mal rare et brutal

 

ILLUSTRATION LA PRESSE

Sophie Allard
La Presse

L’humoriste Serge Grenier est mort au début du mois après une chute de plusieurs étages. Il tentait de s’enfuir de la résidence où il venait d’être admis. L’ancien Cyniques souffrait d’une démence fronto-temporale. Cette maladie rare et méconnue frappe de façon aussi brusque que sévère. Et bouleverse le quotidien des malades et de leurs proches.

Depuis un an, Michel Thibault, 67 ans, est obsédé par la poutine. Il en mange tous les jours. Il en commande même en cachette.

«Je dois m’obstiner pour qu’il avale les plats que je lui prépare. Devant sa poutine, le monde pourrait s’écrouler qu’il ne s’en rendrait pas compte. Il mange sans s’arrêter», raconte sa femme Claudette Marchand.

Son mari souffre d’une démence fronto-temporale. Il a plusieurs obsessions, dont le yogourt et la cigarette. Au coucher, Claudette doit le border, placer et replacer ses couvertures. Jusqu’à 10 fois de suite. Il fugue et souffre d’hallucinations constantes.

«Il croit voir des gens dans la maison. Il les prend par le cou, ouvre la porte et les jette dehors. Il peut répéter ce manège plusieurs fois.»

Un soir, il a cru voir des lutins. Il a pris un couteau dans la cuisine et l’a déposé sur sa table de chevet.

«S’ils reviennent, je serai prêt», a-t-il dit.

Inquiète, Claudette Marchand a réalisé que la situation ne pouvait plus durer. Ses filles l’ont fortement incitée à faire admettre Michel en centre d’hébergement.

«J’en suis rendue là, je suis exaspérée. Je pourrai mieux l’aider quand j’arriverai à dormir la nuit.»

Anciennement appelée maladie de Pick, la démence fronto-temporale touche environ 6000 personnes au Québec, soit 5% de tous les cas de démences. En comparaison, 85 000 Québécois souffrent de la maladie d’Alzheimer dite classique. On a longtemps confondu les deux maladies, même si les symptômes sont différents.

 «Chez les personnes atteintes de démence fronto-temporale, le premier symptôme n’est pas un trouble de la mémoire, mais plutôt une atteinte comportementale. Ils deviennent apathiques, perdent toute émotivité. Chez les hommes, il n’est pas rare de voir des attitudes agressives, complètement asociales», explique Judes Poirier, professeur de médecine et de psychiatrie à l’Université McGill. Il est coauteur du livre La maladie d’Alzheimer – Le guide.

On note souvent une perte d’inhibition, des comportements répétitifs et une rigidité dans les habitudes. La maladie frappe plus jeune que la maladie d’Alzheimer classique, entre 40 et 70 ans. Parfois même dans la vingtaine. Dans la majorité des cas, la maladie est sporadique. Les lobes frontaux et temporaux s’atrophient sans cause connue.

Il n’existe aucun traitement curatif. Et les médicaments utilisés pour ralentir la progression de la maladie d’Alzheimer sont inefficaces.

«On privilégie les médicaments contenant avec des neuroleptiques pour les protéger d’eux-mêmes et protéger leurs proches. C’est ce qu’on appelle gentiment la contention chimique. Les enfermer n’est pas la solution, ils deviennent encore plus agressifs. Mais les garder à la maison devient extrêmement difficile», explique Judes Poirier. On leur donne aussi des antidépresseurs. «Ces gens se voient perdre la tête. Ils ont souvent une bonne dose de réalisme et montrent des signes de dépression.»

Peine d’amour et espoir

Jean Gaudreault, 58 ans, vit en centre d’hébergement pour personnes âgées depuis janvier. Sa conjointe Brunette Jacques n’arrive toujours pas à s’y faire.

«Je vis une grosse peine d’amour. J’essaie de faire le deuil de l’homme que j’ai aimé», confie-t-elle, en pleurant.

Elle n’était pas prête à s’en séparer. À bout de souffle et surtout à bout de ressources, elle a abdiqué. Ils ont une fille de 14 ans, bouleversée.

Enseignant à la maternelle, M. Gaudreault a reçu un diagnostic de démence fronto-temporale en 2008. Les premiers signes de la maladie s’étaient manifestés depuis un moment déjà. Il faisait des crises d’angoisse, il avait des troubles d’humeur.

«On a cru qu’il souffrait d’épuisement professionnel. Jean travaillait fort et menait plusieurs projets de front», confie sa conjointe.

Lors d’un voyage, ç’a été la catastrophe. «Il était complètement déstabilisé, c’était plus qu’un burnout. Lors de l’annonce du diagnostic, j’ai beaucoup pleuré. Il ne semblait pas réaliser ce qui se passait, mais il m’a dit: «Quand tu n’en pourras plus, tu me placeras.»»

Depuis un an, son état s’est gravement détérioré. Au point de ne plus pouvoir se débrouiller seul.

«Il n’arrive plus à réchauffer des plats au four à micro-ondes. Il a une fixation sur les pommes et l’eau. Il se rendait constamment au dépanneur en acheter.»

Il peut tourner en rond et répéter la même rengaine pendant une heure. «C’est comme le supplice de la goutte d’eau.»

Après avoir essuyé de nombreux refus lors de demandes d’aide à domicile, elle a trouvé. M.Gaudreault se rendait à la maison Carpe Diem quotidiennement et une intervenante du CLSC venait à la maison.

«Ça allait relativement bien.» Mais au CLSC, on lui a dit qu’on avait trouvé un endroit pour héberger son conjoint. «Si je n’acceptais pas l’offre, on me coupait l’aide apportée. Que pouvais-je faire?», indique Brunette Jacques.

Désemparée, elle enverra sous peu une lettre au premier ministre Jean Charest, appuyée de signatures d’aidants vivant une situation similaire.

Elle écrit que son conjoint «est enfermé, il ne peut presque plus marcher sauf tourner en rond sur l’étage… et on dit qu’il est agité, écrit-elle. C’est normal, il a 58 ans et se retrouve dans un endroit très bien, mais pas adapté à sa situation. C’est un homme ayant toutes ses capacités physiques. Il n’a besoin que d’un accompagnement pour faire les petites choses simples de la vie.»

Son objectif? Dénoncer le manque de ressources à domicile et appuyer le projet d’une deuxième maison Carpe Diem à Trois-Rivières, juste à côté de la maison existante. On souhaite y héberger des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et apparentées en perte d’autonomie avancée et qui présentent des profils particuliers, comme lors de démence fronto-temporale.

À la maison Carpe Diem, les résidants sont appelés à participer à la vie collective, dans une ambiance familiale.

«On mise sur les forces de chacun, plutôt que sur leurs faiblesses, explique la directrice Nicole Poirier. Dans des milieux qui ne sont pas adaptés, les capacités deviennent des problèmes.»

Lorsqu’il fréquentait la maison Carpe Diem, Jean Gaudreault passait le balai, râtelait le terrain, faisait la vaisselle. Sans médication.

«Les gens qui ont une démence fronto-temporale ne se conforment pas au moule des institutions. Plus on va offrir des lieux souples, qui leur permettent une certaine liberté, mieux ce sera.»

En attendant, Brunette Jacques croise les doigts. Claudette Marchand aussi.

«L’amour se transforme, mais il est toujours là, dit-elle. C’est difficile de sortir son conjoint de sa maison. Je ne l’abandonne pas, je vais aller le voir souvent. Je veux qu’il soit bien, qu’il se fasse un «petit chez-soi confortable» ailleurs.»

Elle pourra du même coup enfin penser à elle. Ce qu’elle n’a pas fait depuis longtemps.

http://www.cyberpresse.ca

Naître drogué de parents accros


Quand je pense qu’on voudrait légaliser les drogues, alors qu’il y a tellement de conséquences pour le corps et le cerveau. Imaginez les bébés qui dans l’utérus rentre en contact avec les drogues, alcool, cigarettes et médicaments .. c’est un début de vie bien difficile pour ce petit être.
Nuage

 

Naître drogué de parents accros

Naître drogué de parents accros

Leur corps minuscule s’est habitué à l’héroïne, aux médicaments antidouleur ou à la méthadone dans l’utérus de leur mère. À la naissance, lorsqu’ils en sont brutalement privés, c’est la souffrance.

Photo: Alain Roberge, La Presse

Marie-Claude Malboeuf
La Presse

Chaque année, au Québec, près d’une centaine de bébés doivent être sevrés parce qu’ils naissent drogués et sont en manque d’opiacés, révèlent les toutes dernières données de l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS).

Leur corps minuscule s’est habitué à l’héroïne, aux médicaments antidouleur ou à la méthadone dans l’utérus de leur mère. À la naissance, lorsqu’ils en sont brutalement privés, c’est la souffrance. Après quelques jours, les bébés les plus touchés peuvent se mettre à trembler, à pousser des cris aigus, à vomir, à respirer péniblement, à s’agiter et à pleurer intensément dès qu’un bruit, une lueur ou un mouvement les perturbe. Certains symptômes peuvent mettre des semaines à disparaître.

Les mères ne viennent pas toutes de la rue ou de milieux pauvres, même si c’est souvent le cas.

«J’ai accouché des avocates et des notaires qui prenaient de l’héroïne de façon récréative», rapporte l’obstétricien montréalais Samuel Harper, qui suit la majorité des héroïnomanes enceintes.

Dans son bureau du CLSC des Faubourgs, dans le quartier Centre-Sud, il suit aussi la grossesse d’un petit nombre de femmes incapables de se passer de médicaments antidouleur. Dérivés du pavot, comme l’héroïne, ils leur ont été prescrits à la suite d’une opération ou pour soulager de violents maux de dos, et les choses ont mal tourné.

En Ontario, dans les deux dernières années, la forte popularité de ces médicaments a fait augmenter de 38% le nombre de bébés qui ont nécessité un sevrage, constate l’ICIS. Au Québec, leur nombre a parallèlement baissé de 21% – une donnée surprenante puisque le nombre de Québécois consommateurs d’opiacés d’ordonnance a bondi de 182% depuis 2000, tandis que les dépenses du gouvernement pour le paiement de l’un d’eux (l’OXyContin) ont augmenté de 1280%.

Les toxicomanes québécoises sont peut-être plus prudentes que les autres durant leur grossesse.

«Malgré nos efforts, il est aussi possible que plusieurs femmes passent encore inaperçues, avance le Dr Harper. Celles qui fonctionnent bien n’éveillent pas les soupçons et peuvent avoir déjà quitté l’hôpital quand les premiers symptômes de sevrage se manifestent, après quelques jours.»

Des milliers de bébés touchés

Les patientes du Dr Harper accouchent pourtant au Centre des naissances du CHUM, qui se trouve à l’avant-garde pour le dépistage et l’accompagnement des mères toxicomanes. Le centre en a dépisté 111 en 2010-2011 (39 abusaient de cannabis, 29 de cocaïne, 22 d’opiacés, 15 d’alcool et 6 d’amphétamines), et sevré 19 bébés.

Ailleurs, l’ampleur du problème est encore plus difficile à cerner, même si le dépistage des femmes enceintes devrait être «systématique», selon le Plan d’action interministériel en toxicomanie 2006-2011. On y lit que 5% des Québécoises font une consommation abusive d’alcool durant leur grossesse et que, dans certains secteurs, 10% se droguent alors qu’elles attendent un bébé.

Les gynécologues doivent poser plus de questions et envoyer plus souvent leurs patientes aux travailleurs sociaux, car plusieurs d’entre elles ont le réflexe de minimiser les quantités qu’elles consomment», plaide l’infirmière-chef du service de néonatalogie de l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, Patricia Geraldes.

L’an dernier, de 20 à 25 femmes accros à la cocaïne ou aux amphétamines ont accouché à son hôpital. Les femmes enceintes qui consomment du cannabis s’y comptent carrément par dizaines, mais elles ne sont pas nécessairement ciblées pour cette raison.

«On leur suggère quand même de fumer moins», indique la travailleuse sociale Maude Ménard.

Comme le tabac, le cannabis peut causer des retards de croissance. La cocaïne et les amphétamines aussi, en plus de provoquer chaque année des dizaines de naissances prématurées.

«À long terme, ces substances laissent même plus de traces dans le cerveau que les opiacés», affirme l’anesthésiologiste Édith Villeneuve, chef de la Clinique antidouleur du CHU Sainte-Justine.

Les bébés qui y ont été exposés restent hospitalisés jusqu’à ce que toute trace de drogue ait disparu de leur urine. Pour les soulager, il n’y a pas grand-chose à faire.

«Quand il s’agit d’une substance qu’on ne trouve que dans la rue et qui a pu être mélangée à toutes sortes de choses, ses effets sont plus néfastes, et c’est impensable d’en donner à un bébé, même à toutes petites doses», précise la Dre Villeneuve. Elle se rabat donc, à l’occasion, sur des médicaments qui servent à réduire l’anxiété ou l’hyperactivité, ou encore à induire la somnolence.

On donne parfois de la caféine aux bébés exposés à la cocaïne, dit de son côté Patricia Geraldes. En général, les mères n’ont eu aucun suivi de grossesse. Elles arrivent à la salle d’accouchement en pleine crise, sans carte d’assurance maladie. Mais d’autres nous arrivent très adéquates. Elles sont organisées et n’ont pas l’air d’avoir consommé. On le découvre parce que le bébé ne va pas bien.»

Ces mères ont beau être moins démunies, la travailleuse sociale Maude Ménard s’en inquiète.

 «Gérer un emploi tout en consommant, c’est une chose; être parent, c’en est une autre, dit-elle. La fatigue fragilise. Sans compter qu’avoir un enfant, c’est très confrontant. Ça peut aggraver les problèmes.»

***

Imiter Toronto et Vancouver

Depuis plus de 10 ans, le CHUM cherche à ouvrir un centre périnatal et familial en toxicomanie où les parents trouveraient tout sous le même toit: thérapies, diagnostics, soins médicaux, conseils éducatifs, dépistage, stimulation, gardiennage, etc.

Vancouver et Toronto ont déjà leur centre de suivi (Sheeway Project et Breaking the Cycle), et ils sont apparemment très efficaces.

«Si le bébé est stimulé après sa naissance, si on aide la mère à lui offrir de bonnes conditions de vie, il peut s’en tirer relativement bien. Même s’il a été exposé à la drogue, plusieurs effets se résorbent», souligne l’obstétricien Samuel Harper.

À Montréal, les parents doivent faire le tour de la ville pour obtenir les services dont ils ont besoin, se désole la travailleuse sociale Marielle Venne. Ce n’est pas très efficace. Souvent, ils n’osent pas tout dire à leur pédiatre, qui prescrit des examens inutiles.»

Déjà en 1999, le Comité permanent de lutte contre la toxicomanie a applaudi le projet du CHUM, mais le centre hospitalier est toujours à la recherche de partenaires pour le lancer.

***

Le crack moins nocif que l’alcool

Au risque de choquer, le Dr Samuel Harper est catégorique:

«Ce qui est légal – le tabac et l’alcool en grande quantité – est pas mal plus dangereux pour le foetus que certaines drogues illicites.»

Et le gynécologue n’hésite pas à le dire aux héroïnomanes enceintes qu’il suit au CLSC des Faubourgs, en plein coeur du quartier Centre-Sud, à Montréal.

«J’aime mieux que mes patientes arrêtent la cigarette que la méthadone, dit-il. Et j’aime mieux qu’elles prennent un peu de crack chaque jour plutôt que de se soûler une fois par mois.»

À fortes doses, l’alcool peut avoir un effet dévastateur, rappelle le Dr Harper.

«À cet égard, on devrait aussi s’inquiéter pour la dame qui déprime à la maison, et qui va sans doute passer inaperçue parce qu’elle a de l’argent», dit-il.

Pendant la grossesse, le banal Advil est plus problématique que la morphine», affirme de son côté l’anesthésiologiste Édith Villeneuve, chef de la Clinique antidouleur du CHU Sainte-Justine.

Chaque année, elle y traite une dizaine de femmes enceintes qui ont remplacé l’héroïne par la méthadone, plus une dizaine d’autres qui ont besoin d’opiacés pour supporter des douleurs chroniques ou aiguës. Et ce n’est pas une attitude égoïste, dit-elle.

Ces patientes ne veulent rien prendre parce qu’elles trouvent ça atroce pour leur bébé. Mais les douleurs fortes peuvent déclencher des contractions et interrompre la grossesse. Le sevrage est préférable, car il est assez simple quand une femme n’a rien pris d’autre que des opiacés achetés à la pharmacie. La moitié des bébés n’en auront même pas besoin.»

http://www.cyberpresse.ca