Les routes du Québec n’ont pas vraiment une bonne réputation, avec le transport lourd, les gels et dégels qui n’aident pas à éviter les ballonnements, les trous et fissures. Avec cette nouvelle technologie plus précise, les routes seront probablement mieux entretenu. Mais, malheureusement, ce n’est que pour les grandes routes provinciales et aéroports … Certaines villes, auraient bien besoin d’un petit coup de pouce
Nuage
Le radiologiste des routes
La fourgonnette utilisée par le ministère des Transports du Québec pour documenter l’état des routes.
Le Soleil, Erick Labbé
Annie Morin
Le Soleil
(Québec) Il fut un temps où les techniciens du ministère des Transports du Québec sortaient leur ruban à mesurer et leur tablette à dessin pour documenter l’état des routes. Aujourd’hui, ils roulent à 100 km/h à bord d’une fourgonnette équipée de lasers et de caméras qui génèrent des images d’une précision à faire rêver un chirurgien.
Benoît Petitclerc est ingénieur et responsable du secteur du soutien technique au MTQ. Ce camion – le véhicule de mesure de l’état des chaussées,VMEC de son petit nom -,il en parle comme d’une révolution. Alors que la collecte de données manuelle était longue et comportait une part d’imprécision, le VMEC gobe une multitude d’informations aussi vite que le permettent les limites de vitesse sur les routes du Québec.
Ces informations permettent non seulement de localiser les ornières, les fissures et les autres défauts de chaussée, mais d’en connaître le profil exact en longueur et en largeur comme en profondeur. Le traitement informatique les reproduit en trois dimensions et colore même les sections problématiques en fonction du défaut et de sa gravité.
«Ça vient dire précisément c’est quoi le bobo», résume M. Petitclerc.
Toutes les routes provinciales, incluant les pistes d’aéroports provinciaux, sont ainsi auscultées aux deux ans. Le réseau supérieur en soutien au commerce extérieur, composé des principales autoroutes et routes en lien avec les provinces voisines, est roulé tous les étés.
Bon an, mal an, le camion prend ainsi des images de 16 000 à 20 000 kilomètres de chaussée. En comptant les essais, les correctifs et le temps de déplacement, les opérateurs doivent toutefois avaler trois fois plus de kilomètres sur une période de quelques mois à peine, généralement d’avril à octobre, puisque le sol doit être complètement sec pour que l’équipement fonctionne bien. Le réseau routier québécois compte 30 613 kilomètres de chaussée.
Cette régularité permet non seulement de connaître l’état, mais également l’évolution de la chaussée. L’information est utile quand vient le temps de planifier les investissements routiers. Les gestionnaires s’y réfèrent pour prioriser les chantiers. Les ingénieurs affectés à un projet particulier s’en servent pour déterminer les travaux requis.
Si une fissure suit la piste de roue sur une bonne distance, il y a ainsi de fortes chances que le sous-sol flanche et «ça va coûter plus cher», donne en exemple M. Petitclerc. S’il y a des craques un peu partout, c’est probablement la couche supérieure d’asphalte qui est à blâmer.
Création québécoise
Le VMEC est une création québécoise. Ce sont les ingénieurs et les techniciens du MTQ qui ont imaginé, testé et amélioré les composantes. Le système LCMS, pièce maîtresse située à l’arrière du véhicule, est d’ailleurs vendu à travers le monde par une entreprise de Québec, Pavemetrics, une spin off de l’Institut national d’optique (INO) qui l’a développé.
«On est une référence mondiale», ne se gêne pas pour dire Benoît Petitclerc. Le modèle actuel, un Mercedes Sprinter diesel dont la configuration date de 2008, vaut 650 000 $ avec tous ses équipements de pointe.
L’arrivée du VMEC ne veut pas dire que les fonctionnaires ne se fient qu’à la technologie. Les équipements sont vérifiés et calibrés chaque printemps, puis lors de chaque sortie. Une comparaison est faite avec les données historiques. Si des écarts importants sont constatés, les images vidéo du terrain ausculté sont ressorties pour s’assurer qu’il y a concordance.
«L’ultime personne qui dit si les données sont bonnes ou pas, c’est le représentant de la direction territoriale parce qu’il connaît son réseau», lance M. Petitclerc, fier de ce travail d’équipe.
Comme quoi l’oeil humain a encore un bel avenir devant lui.
LCMS
Le Soleil, Erick Labbé
LCMS
LCMS, c’est pour Laser Crack Measurement System. Ce système imaginé par le ministère des Transports et amélioré par l’INO mesure les ornières, les fissures et la texture des routes balayées. Il est composé de deux lasers très puissants, situés de part et d’autre du véhicule à l’arrière, qui sont juxtaposés à des caméras afin de reconstituer l’état de la chaussée en trois dimensions. La précision est telle qu’un caillou d’un demi-millimètre peut être capté.
Caméra numérique arrière
Le Soleil, Erick Labbé
Caméra numérique arrière
La caméra numérique située à l’arrière du véhicule filme la surface de la chaussée. Les images servent à valider les mesures prises par les instruments. S’il y a une fissure sur l’image qui n’est pas reproduite dans les données, ou vice versa, le personnel effectuant la validation sait qu’il y a un problème.
Encodeur optique
Le Soleil, Erick Labbé
Encodeur optique
L’encodeur optique attaché à la roue arrière gauche est le coeur de ce corps technologique. C’est lui qui donne la cadence à tous les équipements, de façon à ce qu’ils se déclenchent à un moment très précis, tous en même temps. L’encodeur optique émet 4000 impulsions par tour de roue, donc sur une distance de 2,2 mètres.
Antenne GPS
Le Soleil, Erick Labbé
Antenne GPS
Un système de positionnement GPS permet de donner la localisation du véhicule (latitude, longitude et élévation) avec une marge d’erreur maximale d’un mètre. Ces données sont ensuite couplées aux numéros de routes du Ministère. Il est possible de mettre en marche simultanément les nombreux équipements dès qu’un point GPS préidentifié est atteint.
Caméra numérique avant
Le Soleil, Erick Labbé
Caméra numérique avant
La caméra numérique installée à l’avant capte l’environnement de la route où circule le véhicule. C’est une référence visuelle pour les employés du MTQ, qui peuvent plus facilement identifier des endroits que des points GPS.
Profilomètre inertiel
Le Soleil, Erick Labbé
Profilomètre inertiel
Ce système est aussi composé de deux lasers installés sur un support à l’avant du véhicule. Ils suivent les pistes de roue de façon à établir l’indice de rugosité international. Cet indicateur est utilisé pour apprécier le confort de roulement et donc la qualité de la chaussée perçue par les automobilistes. Le profilomètre inertiel vit peut-être ses dernières heures puisque le LCMS peut maintenant faire le même calcul, mais les ingénieurs veulent être absolument convaincus que les données concordent avant de le retirer.