Un étrange poisson pourrait révolutionner l’exploration spatiale


Bien des expériences, des études spatiales ont été utiles à l’humanité, et encore aujourd’hui, les recherches pourraient servir autant pour le commun des mortels que pour les voyageurs de l’espace
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Un étrange poisson pourrait révolutionner l’exploration spatiale

 

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Le dipneuste africain, un étrange poisson. Capture d’écran Gentside

La révolution de l’exploration spatiale ne viendra peut-être pas d’un moteur ultra moderne ou d’une source d’énergie novatrice. Mais tout simplement d’un poisson de la famille des Protopterus, le dipneuste africain. Ses capacités d’hibernation intéressent particulièrement les scientifiques et pour cause, il peut dormir pendant des années sans mourir!

Parvenir à transposer une telle capacité à un système médical permettant de mettre les humains en biostase, ou en «arrêt réversible de la vie», pourrait avoir des applications cruciales. Cela pourrait par exemple permettre de maintenir un personnes blessée ou malade en vie plus longtemps, ou encore envoyer des astronautes endormis pour de longs voyages dans l’espace.

C’est pourquoi des chercheurs de l’université de Singapour ont tenté de percer les secrets du poisson africain et leur étude publiée en mars dernier, a réussi à lever un peu plus le voile sur l’animal.

DORMIR EN ATTENDANT LA PLUIE

Le dipneuste africain est célèbre pour ses nombreuses aptitudes hors-normes dans le monde des poissons. Tout d’abord, il possède une sorte de poumon, presque plus adapté que ses branchies. Ajouté à cela, en cas de grande sécheresse, le dipneuste s’enterre et entre en hibernation, appelée estivation, en attendant que les conditions soient plus favorables.

Il peut ainsi rester cinq ans sans boire, ni manger, ni même produire de déchets. Pour percer le secret de cet étrange sommeil, les chercheurs menés par Ip Yuen Kwong ont étudié l’expression génétique du poisson au cours de l’estivation, et au moment d’en sortir. Leur but était de comprendre comment l’organisme du dipneuste régulait son activité pour lui permettre de survivre aussi longtemps.

Selon les scientifiques, les gènes assurant la destruction des déchets de l’organisme sont très actifs au cours de l’estivation. Cela permet au poisson de ne pas accumuler de déchets nocifs dans son foie. Au contraire, les gènes coagulant et ceux liés au métabolisme du fer sont désactivés: ainsi, le sang ne s’arrête pas de couler et le corps ne gaspille pas d’énergie.

Au moment du réveil, enfin, le corps du dipneuste se remet à produire des molécules permettant de transformer ses réserves de sucres et de graisses en énergie.

LA BIOSTASE, DÉJÀ  DANS LES PROJETS SPATIAUX

«Si la biostase peut être réalisée chez l’homme, les chirurgiens auraient plus de temps pour opérer des patients au cours de moments critiques où la circulation du sang arrête, et le rêve du voyage spatial sur de longues distances pourrait être réalisé», ont écrit les chercheurs dans leur communiqué.

En effet, l’Univers est grand, extrêmement grand. Et pour pousser notre exploration, les missions doivent être de plus en plus longues. Aller sur Mars prendrait 180 jours environ. Aussi, maintenir tout un équipage endormi pendant les mois ou les années de voyage présente de nombreux avantages: réduction de l’espace et des réserves nécessaire, réduction du risque de dépression lié à l’ennui ou l’isolement.

La technique envisagée actuellement n’est pas très éloignée de la cryogénie. Les astronautes pourraient être mis dans des capsules où la température se situerait entre 5 et 10°C. Automatiquement, leur corps devrait alors ralentir. Des tests ont déjà été menés et les résultats sont prometteurs, bien que certains doutes persistent. Mais qu’en est-il de l’état cognitif des personnes restées endormies si longtemps?

Les astronautes ne peuvent pas se permettre de mettre plusieurs jours ou semaines à retrouver leurs esprits s’ils viennent d’atterrir sur une autre planète. Les voyages de plusieurs années à travers l’Univers ne sont donc pas pour tout de suite. Mais qui sait, peut-être que le dipneuste africain sera la clé des conquêtes interstellaires.

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Irons-nous sur Mars en vaisseau-couchettes ?


Le projet Mars One est toujours d’actualité. C’est un très long voyage qui demande beaucoup d’organisation. La NASA semble aller dans la direction des films de science-fiction et voit un grand avantage a faire le voyage en dormant
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Irons-nous sur Mars en vaisseau-couchettes ?

 

L’ article ci-dessous vient de paraître dans le deuxième numéro d’un nouveau magazine consacré à la recherche, Thinkovery (148 p., 15 €), émanation papier du site Thinkovery.com, dont j’ai déjà parlé ici et qui propose des vidéos où les scientifiques exposent leurs résultats de manière pédagogique. La rédaction a bien voulu me confier une chronique intitulée « L’imaginaire des sciences », dans laquelle je confronte la science-fiction à la réalité…  Je remercie Thinkovery de m’autoriser à reproduire ce texte.

Pierre Barthélémy

Quel point commun entre 2001, Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, Alien, le huitième passager de Ridley Scott et le plus récent Interstellar de Christopher Nolan ?

Au-delà de la réponse évidente – la promenade spatiale –, ce qui relie ces trois films, c’est la manière dont les astronautes passent une partie du voyage : ils roupillent. Ou plutôt, ils hibernent.

Etant donné les distances véritablement astronomiques qui séparent les différents corps du Système solaire (sans parler des années-lumière qu’il faudrait parcourir pour se rendre autour d’autres étoiles), il y a un véritable intérêt à ne rien faire pendant le parcours et la NASA, qui garde l’expédition vers Mars dans un coin de son agenda, l’a bien compris, qui envisage sérieusement de passer de la fiction à la réalité.

Via son Institute for Advanced Concepts, l’agence spatiale américaine a ainsi confié à la société SpaceWorks l’étude d’un projet de voyage vers la Planète rouge – six mois pour l’aller, six mois pour le retour –, au cours duquel les astronautes seraient placés en biostase, quelque part entre sommeil et coma. A l’occasion du 65e Congrès international d’astronautique qui s’est tenu début octobre 2014 à Toronto, SpaceWorks a, par la bouche de l’ingénieur Mark Schaffer, fait le point sur l’avancée de ses travaux. L’idée consiste à placer les explorateurs spatiaux dans un état de torpeur en faisant baisser de 3 à 5°C leur température corporelle, afin de réduire et de ralentir leur métabolisme. Rien de bien sorcier là-dedans puisqu’on s’inspire directement de pratiques médicales éprouvées depuis plusieurs années :

« Des protocoles existent dans la plupart des grands hôpitaux pour induire une hypothermie thérapeutique chez des patients », a expliqué Mark Schaffer.

La manœuvre est en général pratiquée chez les personnes ayant subi un arrêt cardiaque – afin de préserver leur encéphale le temps que le cœur reparte – ou un accident vasculaire cérébral, mais aussi chez les nourrissons dont le cerveau n’est pas assez oxygéné. Suite à l’accident de ski dont a été victime Michael Schumacher fin 2013, le CHU de Grenoble a ainsi eu recours à cette technique pour protéger le cerveau de l’ancien champion du monde de Formule 1. Simplement, dans le cadre de l’hypothermie thérapeutique, les patients ne sont maintenus que quelques jours dans cet état de torpeur.

Or, comme le reconnaît Mark Schaffer, « pour des missions humaines vers Mars, il faudra repousser ce maximum à 90 ou 180 jours ».

Le protocole présenté par SpaceWorks prévoit de refroidir les astronautes grâce au système RhinoChill de la société américaine BeneChill : un tuyau diffusant un produit réfrigérant est introduit dans la cavité nasale car seule une membrane la sépare du cerveau. En se diffusant, ce produit fait baisser la température de l’encéphale puis du reste du corps, le sang rafraîchi dans la matière grise gagnant ensuite tout l’organisme. Placées sous monitoring, les marmottes de l’espace seraient alimentées par intraveineuse et, leur système digestif se mettant lui aussi en sommeil, il faudrait uniquement récupérer leur urine. Un système robotisé activerait quotidiennement la stimulation électrique des muscles pour les empêcher de fondre pendant le voyage. C’est joli sur le papier mais SpaceWorks n’a pour l’instant pas précisé comment on validera l’innocuité du protocole « Belle au bois dormant » sur de si longues périodes…

Ce que la firme américaine a en revanche calculé avec précision, c’est le bénéfice qu’il y aura à envoyer vers Mars des dormeurs dans un vaisseau-couchettes. Outre le fait qu’on ne risque pas d’avoir de disputes à bord, le gain de place et de poids qu’entraîne l’hibernation générale est considérable. Moins de mètres cubes, d’électricité, de nourriture : pour un équipage de quatre personnes, on pourrait ainsi économiser plus de 50 % de la masse du vaisseau et passer d’un gros « bidon » de 475 mètres cubes et de 41,3 tonnes à une structure de 105 m3pour 19,8 t. Par ricochet, il faudrait aussi moins de carburant pour expédier tout ce matériel dans l’espace. Quand on sait que le prix du kilo mis en orbite tourne autour des 10 000 dollars, rabioter 20 tonnes revient à économiser quelque 200 millions de billets verts… Quant aux futurs explorateurs martiens, on leur conseillera juste de ne pas vexer le « taulier » informatique qui les surveillera : on se souvient que, dans 2001, Odyssée de l’espace, le superordinateur Hal fait une hécatombe parmi les membres d’équipage en désactivant leurs caissons d’hibernation.

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