Le Saviez-Vous ► À partir de quel âge peut-on avoir des souvenirs ?


Quel est votre plus ancien souvenir ? Avez-vous des flashs d’images quand aviez 4 ou 5 ans ? En fait, c’est grâce à la maturité de l’hippocampe et du cortex frontal que notre mémoire garde des souvenirs passés. Je suis certaine que je me rappelle certaines choses avant 4 ans, un tracteur à pédale orange, une robe bleu pâle avec ruban, et encore bien des choses. À 5 ans par contre, j’ai beaucoup plus de souvenirs, comme des 3 couettes que ma soeur Céline me faisait assise sur la sécheuse, ma rentrée à la maternelle, mon petit frère qui venait me chercher après la classe etc
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À partir de quel âge peut-on avoir des souvenirs ?

 

Souvenirs des enfants

Un enfant joue au memory

©CATHERINE DELAHAYE / PHOTONONSTOP

Demandez à un enfant de trois ans s’il a apprécié sa fête d’anniversaire six mois plus tôt et, potentiellement, il peut vous en relater certains éléments. Reposez lui la question quelques années plus tard et vous constaterez qu’il n’en a plus aucun souvenir.

 Eh oui, les enfants perdent bel et bien la mémoire. Ce phénomène appelé « amnésie infantile », repéré vers la fin du 19e siècle, a opposé de nombreux scientifiques tentant de l’expliquer, dont Freud qui en faisait une problématique œdipienne.

Les enfants perdent la mémoire

Les philosophes ont été les premiers à émettre des hypothèses sur l’amnésie des enfants. Selon eux, le manque de perception de soi et l’acquisition encore imparfaite du langage empêcherait la création d’un souvenir. Etre capable de se poser en tant qu’individu est nécessaire pour forger une histoire, que le langage permettrait par la suite d’ordonner dans l’espace et dans le temps.

De nos jours les neuroscientifiques apportent d’autres explications. Notamment le fait qu’à la naissance, le cerveau du nouveau-né n’est pas tout à fait mature : l’hippocampe, une aire cérébrale nécessaire à la formation des souvenirs, ne finit de se développer qu’à l’âge de quatre ans. Situé dans les lobes temporaux (partie proche de la boîte crânienne, derrière les tempes), il permet de consolider la mémoire, participe aux processus d’apprentissage, à la gestion et à la production des états émotionnels et enregistre les évènements autobiographiques. Or le rôle majeur de l’hippocampe dans le processus de la mémoire n’est assuré que de manière imparfaite lorsque ce dernier est immature.

De récentes études américaines menées par les neuroscientifiques Paul Frankland et Sheena Josselyn ont démontré que les souris et les singes perdaient aussi les souvenirs de leur jeunes années. Ils estiment que la rapide croissance des neurones dans l’hippocampe, alors que celui-ci se développe encore, perturberait le circuit cérébral. D’une certaine manière, les anciens souvenirs stockés dans la mémoire à long terme s’enfouissent dans les abysses du cerveau jusqu’à devenir inaccessible. Le cortex préfrontal, une autre aire cérébrale importante pour la mémoire, est lui aussi sous-développé chez le jeune enfant et constitue le deuxième facteur de l’amnésie infantile.

Alors, à partir quel âge peut-on avoir des souvenirs ?

En 2014, Sciences et Avenir se posait déjà des questions sur cet étrange phénomène. Pour savoir à partir de quel âge nos souvenirs d’enfant s’effacent, l’université Emory d’Atlanta aux Etats-Unis a réalisé une étude statistique sur 83 enfants. Les chercheurs leur ont fait passer des tests de mémoire annuels pendant cinq ans. Résultats : alors que les enfants de 5 à 7 ans se souviennent de 63 à 72% de ce qu’ils ont vécu avant leur trois ans, ceux âgés de 8 à 9 ans ne se remémorent plus que de 35% de ces évènements. Leur conclusion est que l’enfant possède une faculté naturelle qui lui fait oublier ses anciens souvenirs, afin de mettre en place une mémoire autobiographique plus aboutie.

En conclusion ? Pour se remémorer un épisode de sa vie, il faut avant tout que le cerveau et les zones cérébrales associées à la mémoire finissent de se développer, vers quatre à cinq ans. Toutefois, il se peut que l’on se remémore des souvenirs pouvant remonter à plus tôt, tout comme il n’est pas certain que nous gardions tous les souvenirs à partir de cinq ans. Cela peut dépendre de l’intensité des évènements vécus et de la fréquence à laquelle les souvenirs nous sont remémorés. 

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Pourquoi ne gardons-nous (presque) aucun souvenir de notre prime enfance?


Quel est votre plus lointain souvenir ? Est-ce un vrai souvenir ou simplement un souvenir suite à des photos d’enfance ou bien par les récits raconter plusieurs fois par les parents ou autre ? Moi, j’ai des brides avant et pendant mes 4 ans. D’une chambre dont j’avais peur la nuit d’une boite de lumière, Mon premier jour à la maternelle à 5 ans et les 3 couettes que ma grande soeur me faisait entre autres
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Pourquoi ne gardons-nous (presque) aucun souvenir de notre prime enfance?

 

Child | Gep Pascual via Flickr CC License by

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Jeanne Shinskey

Le langage est un autre facteur primordial pour comprendre le fonctionnement de la mémoire chez les bébés.

Nous ne nous rappelons que de très peu d’événements qui ont eu lieu avant nos sept ans, et il est fort rare de garder des souvenirs de ses trois ou quatre premières années. Et quand nous essayons de nous remémorer cette période de notre vie, il est souvent difficile de savoir si nos souvenirs sont authentiques ou s’il s’agit de simples recompositions mentales issues des photos ou des histoires que nous ont racontées les autres.

Ce phénomène, connu sous le nom d’«amnésie infantile» tourmente les psychologues depuis plus d’un siècle –et nous ne le comprenons toujours pas très bien.

Il semblerait que si nous ne nous souvenons pas de cette période, c’est que la mémoire des nourrissons et des tout-petits n’est pas encore complètement développée. Pourtant, dès six mois, les bébés sont capables d’utiliser leur mémoire à court terme (gardant des souvenirs pendant plusieurs minutes), et leur mémoire à long terme (avec des souvenirs qui perdurent des semaines, voire des mois).

Une étude démontre ainsi que des enfants de six mois qui ont appris à actionner un levier pour actionner un train électrique se souviennent comment faire pendant deux à trois semaines après avoir joué. Les enfants d’âge préscolaire, quant à eux, sont capables de se rappeler d’événements qui remontent à plusieurs années. Il n’est cependant pas certain que ces souvenirs soient véritablement autobiographiques, c’est-à-dire qu’il s’agit d’événements personnellement pertinents qui se sont produits en un temps et un lieu spécifiques.

La mise en place progressive des processus fondamentaux de la mémoire

Évidemment, la mémoire des bébés n’est pas comparable à celle des adultes, puisqu’elle continue à se développer jusqu’à l’adolescence. D’ailleurs, l’amnésie infantile s’explique peut-être par la mise en place progressive des processus fondamentaux de la mémoire; c’est même la théorie la plus plausible à ce jour. Ces processus impliquent plusieurs régions du cerveau et incluent la formation, la consolidation et enfin la récupération des souvenirs.

Par exemple, l’hippocampe, que l’on pense responsable de la formation des souvenirs, continue à se développer au moins jusqu’à l’âge de sept ans. Ce qu’on nomme amnésie infantile chez les adultes (l’incapacité à se remémorer des souvenirs en deçà de trois ans et demi) ne vaut pas pour les enfants et les adolescents, dont les souvenirs peuvent remonter à plus loin. Ainsi, le problème est peut-être moins de former des souvenirs que de les consolider.

Mais cela n’explique pas tout. Le langage est un autre facteur primordial pour comprendre le fonctionnement de la mémoire chez les bébés. Entre leur première et leur sixième année, les enfants passent des premiers balbutiements à la maîtrise de leur langue maternelle, de sorte que d’importants changements de leur capacité d’expression chevauchent la phase d’amnésie infantile. Ces changements comprennent l’utilisation du passé, de mots liés à la mémoire comme «souvenir» et «oublier», et les pronoms personnels, comme «mon» ou «ma».

On peut en conclure que la capacité d’un enfant à verbaliser au sujet d’un événement au moment où celui-ci se passe prédit plus ou moins à quel point il s’en souviendra des mois ou des années plus tard. Dans le cadre d’une expérience, des tout-petits ayant fréquenté les services d’urgence après des blessures courantes ont été interrogés. Les enfants de plus de 26 mois, qui pouvaient déjà parler de l’événement à l’époque où il s’est produit, s’en rappelaient jusqu’à cinq ans plus tard, alors que ceux de moins de 26 mois, qui ne pouvaient pas en parler à l’époque où il s’est produit, ne se rappelaient presque rien voire rien du tout. Cela tend à prouver que les souvenirs formés en phase de pré-verbalisation sont perdus s’ils ne passent pas par le langage.

L’influence de la culture et de l’environnement social

Cependant, la plupart des recherches qui se penchent sur le rôle de la langue dans la mémoire se concentrent sur une forme particulière d’expression, la narration, et sur sa fonction sociale. Quand les parents évoquent des souvenirs communs avec de très jeunes enfants, ils leur enseignent implicitement des compétences narratives – à savoir quels types d’événements sont importants à retenir, et comment structurer un récit pour se faire comprendre.

Contrairement à une simple description factuelle, la capacité à évoquer des souvenirs revêt une fonction sociale, puisqu’elle suppose un partage d’expérience avec les autres. C’est ainsi que les histoires que l’on raconte en famille maintiennent l’accessibilité des souvenirs au fil du temps, tout en améliorant la cohérence du récit en termes de chronologie des événements, de thématique et de charge émotionnelle. Plus une histoire est cohérente, mieux elle sera retenue. Les adultes maoris (peuple autochtone de Nouvelle-Zélande) ont des souvenirs d’enfance très anciens: ils arrivent à se remémorer des événements vécus à l’âge de deux ans et demi. Ce record absolu, que l’on n’a retrouvé dans aucune autre société jusqu’ici, est lié à la façon si évocatrice dont les parents maoris racontent les histoires familiales.

La capacité à évoquer des souvenirs revêt des fonctions sociales différentes en fonction des cultures, ce qui induit des différences culturelles en termes de quantité, de qualité et d’ancienneté des souvenirs autobiographiques précoces. Les adultes ayant grandi dans des environnements qui valorisent l’autonomie (Amérique du Nord, Europe) ont tendance à rapporter des souvenirs d’enfance plus anciens et plus nombreux que les adultes qui ont connu des cultures plus attachées à la dépendance entre les membres de la famille (Asie, Afrique).

Les récits se précisent

Dans les cultures qui favorisent l’autonomie, les souvenirs évoqués par les parents ont davantage trait aux expériences individuelles des enfants, à leurs préférences et à leurs sentiments, et moins à leurs relations avec les autres, aux routines sociales et aux normes comportementales. Par exemple, un enfant américain se rappellera avoir reçu une médaille d’or à l’école maternelle alors qu’un enfant chinois se souviendra plutôt d’avoir appris telle chanson à l’école maternelle.

Bien qu’il y ait encore beaucoup de choses que nous ne comprenons pas sur l’amnésie infantile, les chercheurs progressent. Il y a notamment de plus en plus d’études prospectives longitudinales qui étudient des individus sur le long terme, depuis leur enfance. Cela permet d’obtenir des récits précis des événements, ce qui vaut mieux que de demander rétrospectivement à des adolescents ou des adultes de se rappeler d’événements passés qui ne sont pas documentés. De plus, à mesure que les neurosciences avanceront, il y aura sans doute davantage d’études associant le développement du cerveau au développement de la mémoire. Cela devrait nous aider, outre les récits, à développer d’autres façons de mesurer la mémoire.

Toutefois, même si nous ne pouvons pas nous rappeler explicitement d’événements spécifiques vécus dès notre plus jeune âge, l’accumulation de souvenirs liés à notre prime enfance laisse des traces qui influencent durablement notre comportement. Les premières années de notre vie sont donc paradoxalement à la fois celles que nous oublions et celles qui marquent à tous jamais les adultes que nous sommes.

Cet article a été initialement publié sur le site The Conversation

http://www.slate.fr/