L’enquête pour la destitution du Président des États-Unis a longtemps été en suspens, mais il semble qu’elle soit maintenant engagée par les démocrates. Cela, changera-t-il quelque chose, surtout que le procès sera au sénat qui est majoritairement républicain donc derrière le président ? Ce que bien des gens espère est que cela ne donnera pas un coup pouce pour un 2e mandat pour Donald Trump
Nuage
La procédure de destitution officiellement lancée contre Trump

La présidente de la Chambre des représentants, la démocrate Nancy Pelosi, a annoncé qu’une enquête pour la destitution du président Trump serait entamée.
PHOTO : ASSOCIATED PRESS / ANDREW HARNIK
Les révélations sur un entretien téléphonique entre le président Trump et son homologue ukrainien cet été ont réussi là où le rapport Mueller sur la Russie a échoué : convaincre les leaders démocrates de lancer une procédure de destitution.
La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, qui avait jusqu’ici servi de pare-feu à cette démarche en raison des risques électoraux qu’elle pose, a fini par annoncer, mardi après-midi, le lancement de la procédure, aussitôt dénoncée par Donald Trump.
Au cours d’un point de presse de six minutes, la démocrate la plus puissante du Congrès a accusé le président d’avoir violé la loi et ses responsabilités constitutionnelles en interdisant la transmission de la plainte d’un lanceur d’alerte au Congrès et en demandant à un autre pays d’intervenir pour favoriser sa réélection.
Le président doit rendre des comptes. Personne n’est au-dessus de la loi. Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des démocrates
Dans les minutes qui ont suivi l’allocution de Mme Pelosi, le président Trump, qui est à l’Assemblée générale de l’ONU, à New York, a dénoncé dans une série de tweets une nouvelle chasse aux sorcières
et un harcèlement présidentiel
.
L’enquête sur la destitution n’incombera pas à un seul comité, comme cela avait été le cas lors de l’enquête sur le Watergate visant le président républicain Richard Nixon, en 1974. Mme Pelosi a précisé que les six comités investiguant déjà sur divers sujets liés à Donald Trump et à son administration poursuivront leurs enquêtes sous le parapluie de l’enquête sur la destitution
.
Nancy Pelosi a procédé à cette annonce nucléaire après avoir rencontré les leaders démocrates et l’ensemble de son caucus.
Plusieurs élus démocrates modérés ou représentant des districts qui ne sont pas acquis à leur formation ont changé de cap au cours des derniers jours, ce qui a fait augmenter la pression sur les leaders démocrates, qui avaient jusqu’ici joué de prudence.
La carte de la transparence abattue sur le tard
En après-midi, avant l’annonce des démocrates, le président avait joué la carte de la transparence, mais c’était trop peu trop tard.
J’ai autorisé la publication demain de la transcription complète, entièrement déclassifiée et non censurée de ma conversation téléphonique avec le président Zelensky d’Ukraine
, avait-il déclaré sur Twitter.
Pas de pression et, contrairement à Joe Biden et son fils, PAS de quid pro quo [échange de bons procédés entre deux parties
], a-t-il ajouté, critiquant une chasse aux sorcières
, comme il l’avait fait pour l’enquête sur la Russie.
Vous verrez que c’était un appel très amical et tout à fait approprié
, a-t-il soutenu à propos de l’entretien du 25 juillet, qui est dans la ligne de mire des démocrates depuis les révélations de plusieurs médias américains selon lesquels cette conversation est au centre de la plainte d’un lanceur d’alerte que la Maison-Blanche a refusé de partager avec le Congrès.
Les démocrates le soupçonnent d’avoir fait pression sur son homologue ukrainien pour qu’il lance une enquête sur une société gazière qui comptait le fils de Joe Biden au sein de son conseil d’administration. Ils croient que Donald Trump pourrait l’avoir menacé, directement ou implicitement, de bloquer l’aide financière de près de 400 millions de dollars destinée à la défense du pays dans son conflit avec la Russie.
L’aide financière a ultimement été autorisée la semaine dernière, après plusieurs semaines.
Selon plusieurs médias, la conversation ukrainienne n’est cependant pas la seule au cœur de la plainte du lanceur d’alerte, qui travaillerait pour la communauté du renseignement.
Le président du Comité du renseignement de la Chambre, Adam Schiff, a indiqué que le lanceur d’alerte était pour sa part prêt à témoigner devant la commission. Il a dit espérer qu’il comparaîtrait cette semaine.

Nancy Pelosi et Donald Trump
PHOTO : REUTERS / AL DRAGO ET KEVIN LAMARQUE
Biden attaque, Trump contre-attaque
Avant son discours devant l’Assemblée générale des Nations unies, à New York, Donald Trump a encore nié avoir fait pression sur l’Ukraine afin de tenter de nuire à son rival démocrate Joe Biden.
Combatif, il a dit juger ridicules
les discussions sur une procédure de destitution à son endroit, accusant les démocrates d’agir par pur calcul politique.
Je mène dans les sondages. Ils ne savent pas comment m’arrêter
, a-t-il soutenu, même si les principaux candidats à l’investiture démocrate le devancent dans les intentions de vote.
M. Trump a affirmé qu’il avait retardé l’aide américaine à l’Ukraine parce que les pays européens n’avaient pas payé leur juste part pour soutenir le pays.
Pour sa part, Joe Biden, meneur de la course à l’investiture démocrate, avait appelé à lancer la procédure de destitution si le président refusait de coopérer avec les enquêtes du Congrès, notamment sur l’affaire ukrainienne, dans laquelle il est impliqué malgré lui.
La pression montait dans les rangs démocrates
La perspective de l’ouverture d’une procédure de destitution est controversée, mais de plus en plus de démocrates dits modérés s’y sont ralliés, outrés par l’affaire ukrainienne.
Selon le décompte du New York Times, 180 représentants démocrates (sur un total de 235) soutiennent désormais cette option, et ce nombre croît d’heure en heure. Un ex-républicain devenu indépendant s’est joint à eux.
La Chambre, à majorité démocrate, est chargée d’ouvrir cette procédure de mise en accusation. Puis le Sénat, contrôlé par les républicains, qui restent en majorité fidèles à M. Trump, serait chargé du procès
.
La Chambre des représentants n’a pas encore le nombre de vote requis pour lancer la procédure. Pour ouvrir une procédure de destitution, la majorité simple des élus qui votent est requise. Si l’ensemble des 435 représentants votaient, le chiffre magique serait alors de 218, mais il serait moins élevé si les élus votaient en moins grand nombre.
Fine stratège, Nancy Pelosi arguait que déclencher cette procédure, très impopulaire dans les sondages, alors que Donald Trump serait certainement acquitté par un Sénat républicain pourrait coûter aux démocrates les élections en novembre 2020.
Les démocrates ont ravi 43 sièges aux républicains lors des élections de mi-mandat de 2018; 21 d’entre eux l’ont fait avec des marges inférieures à 5 %.
Au grand dam des progressistes, Mme Pelosi, 79 ans, s’est donc longtemps dressée en pare-feu pour protéger les démocrates modérés de la Chambre, qui ont remporté leurs sièges dans des circonscriptions plus conservatrices et craignaient de ne pas survivre lors des prochaines élections.
Une trentaine d’élus démocrates a joint les rangs des partisans d’une procédure de destitution depuis le témoignage de l’ex-procureur spécial Robert Mueller devant la Chambre cet été.
L’affaire ukrainienne a fait céder plusieurs digues.
D’une part, les élus les plus à gauche ne se gênent plus pour interpeller directement leurs leaders, à l’image d’Alexandria Ocasio-Cortez, qui a affirmé, ce week-end, que le plus grand scandale national n’est pas le comportement du président qui viole la loi, c’est le refus du parti démocrate de le destituer pour cela
.
De l’autre, plusieurs modérés ont ces derniers jours annoncé qu’ils étaient désormais ouverts à une procédure de destitution, à condition que les allégations soient prouvées.
Chez les candidats à la primaire démocrate, les plus progressistes, Elizabeth Warren en tête, mais aussi Bernie Sanders et Kamala Harris, tous sénateurs, appellent depuis déjà plusieurs mois à lancer une procédure de destitution.
Appel téléphonique
Au cœur d’une partie importante de l’affaire : une conversation téléphonique organisée cet été entre les dirigeants ukrainien et américain.
La plainte d’un lanceur d’alerte, membre des services de renseignement américains, déposée en août dernier, concernerait en partie cet appel, selon notamment le Washington Post.
Les démocrates soupçonnent M. Trump d’avoir tenté de pousser M. Zelensky à enquêter sur la famille Biden, en utilisant notamment une aide militaire comme levier de pression.
Si M. Trump a admis publiquement avoir mentionné Joe Biden et son fils, Hunter, qui a travaillé pour un groupe gazier ukrainien à partir de 2014, lors de cette conversation, il dément fermement toute pression.
Sophie-Hélène Lebeuf
https://ici.radio-canada.ca/