Le 24 décembre à midi, je suis sortie en manche courte dehors et j’ai vu une coccinelle. C’est exceptionnel. Depuis la fin d’automne et ce début d’hiver, la température nous a jouée un bien drôle de tour avec le phénomène El Nino. La suite, probablement que l’hiver va jouer au yo-yo avec nous, mais on annonce de la neige dans la semaine qui vient
Nuage
Un hiver de tous les records

Gilles Brien
Bio-météorologue, communicateur scientifique et auteur du livre «Les Baromètres humains: comment la météo vous influence»
Après la semaine de Noël la plus tropicale que le Québec ait connue en 60 ans, l’hiver qui débute s’annonce historique.
Le Climat Prediction Centerdu Service Météo National américain a publié le 17 décembre son aperçu à long terme pour les mois de janvier, février et mars 2016. Les régions du sud du Québec bordant les États-Unis risquent fort de connaitre un hiver très doux avec des températures au-dessus des normales jusqu’au printemps. Un printemps qui risque d’être hâtif si les choses ne changent pas… Le sol du sud du Québec, privé d’un manteau isolant de neige, continue à emmagasiner de la chaleur. Le résultat pourrait se faire sentir dans les prochains mois. Pour les précipitations, les quantités ne devraient pas s’écarter des normales. Le hic, c’est que ces précipitations «normales» ont plus de chances de tomber davantage sous forme liquide que solide.
Ces prévisions de nos voisins du Sud confirment la tendance à du temps anormalement chaud observé depuis le début de l’automne sur une bonne partie du continent. À Montréal seulement, la température normale moyenne en décembre tourne autour de -6 degrés Celsius. Or, cette année, le mercure reste accroché, de jour comme de nuit, à une valeur dépassant les 3 degrés Celsius! C’est du jamais vu de mémoire de météorologue.
À Environnement Canada, les prévisions mensuelles de température concordent en gros avec les prévisions américaines. On prévoit le même scénario pour cet hiver tout neuf qui commence: un mercure au-dessus des moyennes jusqu’en mars-avril. Quant aux précipitations, les quantités devraient être supérieures aux normales presque partout au Québec, sauf dans l’extrême ouest de la province où elles seront dans les moyennes.
On s’en doute, les avantages d’un hiver plus douillet l’emportent chez bien des gens: frais de chauffage à la baisse, virus de la grippe moins virulents, mobilité accrue, économies dans l’entretien du réseau routier. Uniquement à Montréal, l’absence de neige en décembre a fait épargner à la ville des dizaines de millions de dollars. Par contre, les conditions très clémentes cet automne ont joué contre le gouvernement dans ses négociations avec le front commun. Le temps doux a favorisé les mouvements de mobilisation, les grèves et les marches de protestation. La preuve: les syndicats ont fait des gains.
Chez les amateurs de sports d’hiver et beaucoup de commerçants, le manque de neige et de froidure fait grincer bien des dents. Mais dans l’ensemble, personne ne s’ennuie du vortex polaire de l’an dernier. Jamais le Québec n’avait eu si froid en 30 ans. Verrons-nous encore cette année un vortex du même genre nous tomber sur la tête en janvier?
Pour bien des météorologues, c’est la question à 100 000 degrés. L’effet El Nino, très puissant cette année, complique toute la configuration des vents en altitude. Si deux vortex polaires consécutifs ont pu glisser sur le Sud québécois en 2014 et en 2015, c’est en raison d’une certaine configuration des courants aériens. Cette configuration n’est pas la même actuellement. Les chances de voir basculer sur le sud du Québec un autre vortex polaire cet hiver sont donc plus faibles que l’an dernier.
Les Québécois en sont quittes pour un drôle d’hiver cette année. D’une part, des extrêmes de températures fracassent des records de chaleur en plein début de saison hivernale. Et d’autre part, un scénario de refroidissement brutal dans quelques semaines reste quand même probable. Les climatosceptiques peuvent toujours aller se rhabiller. Mais pas trop. Va faire chaud.
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