Les inconnus de l’Atacama


– 300 à 1000 ans avant notre ère des tombes ont ressurgit pour être découverte à notre époque au Pérou. Des squelettes sont tellement bien conservés depuis des millénaires que même des tissus sont encore présents ainsi des ornements des élites.
Nuage

Les inconnus de l’Atacama

 

Un défunt de la culture Tambo, au nord de l'Atacama. Des roseaux sont fixés aux oreilles.

Les roseaux fixés aux oreilles de ce défunt de la culture de la rivière Tambo, au nord de l’Atacama, dépassaient à l’origine de sa tombe. Servaient-ils à communiquer avec les vivants ?

Projet Tambo, Université de Wroclaw

Une culture précolombienne inconnue a été découverte dans le delta de la rivière Tambo au Nord-Est de l’Atacama

L’une des tombes en forme de puit aménagé à l’aide de galets. On note les jolies poteries colorées qui faisaient partie du matériel funéraire.

Projet Tambo, Université de Wroclaw

Les marges des déserts sont le berceau de cultures. Un phénomène illustré une fois de plus par la découverte d’une culture inconnue dans le delta de la rivière Tambo, au Nord du désert de l’Atacama, au Pérou. Plus de 150 tombes datant du VIIe siècle au IVe siècle avant notre ère ont été découvertes par les archéologues polonais, péruviens et colombiens du projet européen Tambo, dirigé par Józef Szykulski, de l’Université de Wroclaw. Elles témoignent d’une culture qui a précédé dans la région celle de Tihuanaco (- 300 à 1000).

L’une des momies retrouvées accompagnée d’un arc (en haut).

Projet Tambo, Université de Wroclaw

Ces tombes et le matériel funéraire qu’elles renfermaient sont intacts, car rien ne signalait leur présence à la surface de la zone où elle se trouvent. L’aridité extrême qui règne dans l’Atacama a préservé une large part des matières organiques. Ainsi, certains des corps étaient encore enveloppés de nattes, de linceuls de coton ou encore dans de filets de pêche, ce qui montre au passage que la pêche faisait partie des activités de subsistance de la population locale. D’épaisses coiffes en laine de camélidé auraient eu la fonction de casques.

Cette interprétation guerrière est confortée par la présence dans certaines tombes masculines de massues se terminant par des masses de pierre ou de cuivre. Selon J. Szykulski, il s’agirait d’objets de prestige attestant de la présence de l’élite dans la nécropole. Plusieurs défunts ont aussi été retrouvés accompagnés d’arcs et de carquois remplis de flèches à pointes d’obsidienne (un verre volcanique). C’est d’autant plus remarquable que les témoignages d’arcs sont très rares au Pérou. Autre détail intéressant : le squelette d’un jeune lama atteste que l’introduction dans la région de ce camélidé domestique est plus précoce que ce que l’on pensait. Or, outre les habituelles poteries, le mobilier funéraire contient des instruments de tissage richement décorés, ce qui signale l’importance sociale de la laine et de son exploitation. Par ailleurs, les défunts étaient accompagnés de nombreux bijoux, parmi lesquels des objets de cuivre et de tumbaga, un alliage d’or et de cuivre largement utilisé par les cultures précolombiennes.

Pour J. Szykulski, des différences de statut sont clairement observables entre les défunts. Cette nécropole est manifestement celle d’une société d’agriculteurs hiérarchisée et dirigée par une élite. Or, dans le Sud du Pérou, aux limites orientales du désert de l’Atacama, le ruissellement des pluies estivales tombant sur les Andes crée des oasis. Comme dans la vallée du Nil au néolithique, l’augmentation de l’aridité de l’Atacama au cours des siècles avant notre ère a amené les habitants d’un désert autrefois verdoyant à se concentrer dans les oasis. La compétition pour les ressources augmentant, des élites ont émergé, qui ont organisé la vie sociale par des systèmes militaires (pour se défendre des concurrents) et religieux (pour maintenir la cohésion des groupes). L’importance de cette organisation sociale est visible dans la présence d’armes de prestige et d’offrandes pour l’au-delà.

Plus étonnant, plusieurs défunts ont été retrouvés avec une sorte de coiffe comportant deux roseaux fixés aux oreilles. À l’origine, les roseaux dépassaient sans doute du sol. Les archéologues y voient une sorte de système de communication entre le défunt et le monde extérieur. Comme si le groupe utilisant la nécropole avait voulu se réserver la possibilité de continuer à demander conseils aux grands hommes enterrés !

Pour en savoir plus

Le site du projet Tambo, mené par des archéologues de l’Université de Wroclaw.

Bernhard Eitel, Les marges de désert, berceau des civilisations, Pour la Science N°375, janvier 2009.

L’auteur

Francois Savatier est journaliste à Pour la Science.

http://www.pourlascience.fr

Une réponse à “Les inconnus de l’Atacama

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s