La santé du futur bébé influencée par ce que mange son père ?


La conception d’un bébé se fait à deux et bien plus que l’on pense. Car papa aussi a une influence sur la santé de bébé sur ce qu’il fume et ce qu’il mange par son empreinte laissée par le spermatozoïde qui viendra féconder l’ovule
Nuage

 

La santé du futur bébé influencée par ce que mange son père ?

 

Lorsqu’un couple décide d’avoir un enfant, c’est à la future maman que l’on adresse les conseils de santé et de diététique : mange ci ou ça, c’est plein d’iode/de fer/de calcium, réduis ton exposition aux toxines, cesse de fumer, de boire ou de prendre certains médicaments, fais une cure de vitamine B9 pour réduire les risques de spina bifida, etc.

Et le futur père ? Le père, rien. Comme si le fait de ne pas accueillir l’embryon en son giron, de n’être qu’un simple pourvoyeur de gamètes, l’exemptait de se préoccuper de ses habitudes de vie et du contenu de son assiette…

Cette conception des choses pourrait bien changer suite à une étude canadienne d’épigénétique publiée ce 10 décembre par Nature Communications. Avant d’aller plus loin, il faut expliquer ce qu’est l’épigénétique.

Il y a d’un côté le génome, qui détermine le plan de construction et de fonctionnement de l’organisme, et, à côté de cela, l’épigénome, qui est en quelque sorte le registre des informations régulant la manière dont lesdits gènes s’expriment. Pour l’expliquer autrement, voici la métaphore du biologiste allemand Thomas Jenuwein, que j’ai trouvée, une fois n’est pas coutume, sur Wikipédia :

« On peut sans doute comparer la distinction entre la génétique et l’épigénétique à la différence entre l’écriture d’un livre et sa lecture. Une fois que le livre est écrit, le texte (les gènes ou l’information stockée sous forme d’ADN) sera le même dans tous les exemplaires distribués au public. Cependant, chaque lecteur d’un livre donné aura une interprétation légèrement différente de l’histoire, qui suscitera en lui des émotions et des projections personnelles au fil des chapitres. D’une manière très comparable, l’épigénétique permettrait plusieurs lectures d’une matrice fixe (le livre ou le code génétique), donnant lieu à diverses interprétations, selon les conditions dans lesquelles on interroge cette matrice. »

Autant le génome est très stable, autant l’épigénome est dynamique, qui dépend de l’environnement, des événements de la vie, de l’exposition aux produits toxiques, de l’alimentation… Or, une partie de ces informations épigénétiques sont transmises du parent à l’enfant. Lors de la fabrication des spermatozoïdes, certains des gènes contenus dans les gamètes reçoivent en effet un marquage chimique, que l’on peut considérer comme une sorte d’empreinte paternelle sur le génome transmis. Les auteurs de l’article paru dansNature Communications ont émis l’hypothèse que si ce marquage était altéré, par exemple par une carence alimentaire, cela se traduirait, dans la génération suivante, par des malformations ou des maladies.

Pour tester cette idée, ils ont choisi une carence en acide folique. Aussi connu sous le nom de vitamine B9, l’acide folique joue en effet un rôle important dans un des principaux mécanismes épigénétiques, la méthylation de l’ADN. Celle-ci module le niveau auquel les gènes s’expriment et elle est même capable de les réduire au silence, de les inhiber complètement. Perturber la prise d’acide folique avait donc, selon les chercheurs, de bonnes chances de perturber le marquage des spermatozoïdes. Les chercheurs ont donc élevé deux lignées de souris mâles. Servant de groupe témoin, la première avait droit, dès le stade embryonnaire et pour toute son existence, à une dose normale d’acide folique tandis que la seconde recevait une dose très réduite (14 % des apports recommandés).

Première conséquence : la seconde lignée montrait davantage de problèmes d’infertilité que la première. Surtout, on constatait des anomalies anatomiques chez 27 % des souriceaux dont les pères avaient été carencés en acide folique (contre 3 % dans le groupe témoin) : malformations crânio-faciales, défauts au niveau des membres, de la colonne vertébrale et des omoplates, ossification réduite du crâne, retard dans le développement des doigts et orteils. Les chercheurs sont donc allés voir ce qui se passait dans les spermatozoïdes. Les gènes étaient dans un état normal. En revanche, on notait, pour le second groupe, des changements de la méthylation de l’ADN dans des dizaines de régions différentes. En résumé, la carence en acide folique avait modifié la manière dont le marquage paternel se faisait sur les gènes transportés par les spermatozoïdes. Pour filer la métaphore de Thomas Jenuwein, le texte était bon mais pas la manière de l’interpréter.

Cette découverte met en lumière le rôle de l’épigénome du spermatozoïde sur le développement fœtal. Pour les auteurs de l’étude, c’est la première fois que l’on montre que la prise d’acide folique par le futur père (et pas seulement par la future mère) est importante pour obtenir une progéniture en bonne santé. Ce point peut être important dans les cas de malnutrition ou chez les personnes en surpoids car l’obésité altère la manière dont l’acide folique est utilisé par l’organisme.

L’article de Nature Communications prend aussi l’exemple du nombre de diabétiques aux Etats-Unis qui a explosé en une génération, passant de 6 à 20 millions :

 « Le rôle de l’épigénome des spermatozoïdes dans ce phénomène et dans d’autres maladies chroniques mérite une enquête approfondie », souligne l’article.

 Ce résultat arrive quelques jours après une autre étude, spectaculaire, sur la transmission d’une peur paternelle via les spermatozoïdes et l’on peut dire que ces travaux remettent un peu d’acquis dansla transmission héréditaire.

Pierre Barthélémy

http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr

2 réponses à “La santé du futur bébé influencée par ce que mange son père ?

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